Iamais les ouurages des hommes ne donneront de l’admiration à vn Chrestien qui sçait que Dieu l’a choisi pour son enfant.
Gresset peut-il dire que les maximes de l’Evangile sont inalliables avec l’art du Théâtre ; ne représente-t-on pas avec succès dans les Collèges des sujets tirés de l’Ecriture, n’en représente-t-on pas sur nos Théâtres publics ; l’Evangile n’a-t-il pas fourni le sujet de l’Enfant prodigue, y a-t-il donc dans la morale de cette pièce quelque chose de contraire à la morale du Christianisme, les Espagnols n’ont-ils pas leurs Auto Sacramentalesd ? […] Mon Enfant, me dit-il, je ne sais point confondre les choses indifférentes, avec les criminelles.
Car peut-on, par exemple, rien entendre de plus sale qu’une Règle de Despaute que l’on fait dire dans une Comédie ou Farce à un enfant pour leçon, que les Ecoliers disent tous les jours sans crime ? […] Il me dit qu’étant un jour chez un Comédien, je crois qu’il me dit Beauvalle, pour les affaires de son ministère (car à cela près, les Messieurs de Saint Sulpice n’ont pas plus de commerce avec vos bons amis, que les Juifs en avaient, avec les Samaritains) ce Comédien fit venir devant lui toute sa famille, assez nombreuse et assez jolie ; il lui fit le détail de l’éducation qu’il donnait à ses enfants, il lui parla de leur génie, de leurs petits talents, de ce à quoi il les croyait propres, et de la profession à laquelle il les destinait. Ce Prêtre qui ne manquait pas d’esprit, remarqua qu’il n’en destinait point pour la Comédie, et lui dit qu’il était surpris que de tant d’enfants qu’il avait, il n’en réservât pas un seul pour lui succéder. Le Comédien soit qu’il ne s’aperçût pas du dessein du Prêtre, soit qu’il fût sincère et de bonne foi, lui sut mauvais gré de sa remarque, s’en formalisa, et lui dit que quoi qu’il fût Comédien, il ne prétendait pas que ses enfants le fussent, qu’il n’estimait pas assez sa profession pour cela. […] Il demeura d’accord de tout cela, en ajoutant cependant, j’ai une grosse famille à nourrir, je n’ai pas d’autre métier pour l’entretenir, je ne puis me résoudre à la voir mourir de faim après l’avoir mise au monde : tout ce que je puis faire, c’est de mettre mes enfants dans un autre chemin que celui dans lequel je suis malheureusement engagé.
De même un Pécheur qui se rend coupable d’un crime qui attire les censures ecclésiastiques, comme la Simonie, l’Usure, s’il étoit dénoncé, cesseroit d’être enfant de l’Eglise, conservant néanmoins l’habitude de la foi, celle-ci n’étant incompatible qu’avec la seule infidélité, selon le Concile de Trente1 ;l’Avocat a donc grand tort, Mademoiselle, de s’imaginer que l’Excommunication des Comédiens supposeroit en eux la tache d’hérésie, (pag.