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88. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE IV. Spectacles singuliers. » pp. 106-127

Des buchers où on brûle des morts, & des convois qui les conduisent, des Palais à double rang de colomnes, des statues, un temple du soleil, un peuple immense, une épaisse forêt, un port de mer, une flotte de vaisseaux, des matelots : tout cela se voit à l’opéra, mais ce n’est qu’en peinture. […] L’entrée de la salle est annoncée par une galerie intérieure, qui enveloppent tout le pourtour, & fournit quantité d’issues fort commodes, On entre par sept portiques égaux, trois partagés se présentent en face, conduisent à un vestibule intérieur, orné de colomnes Dorique à la grecque, canelées & couronnées d’un entablement architrave, dont les moulures sont remplies d’ornement. […] Là se présentent deux grands escaliers qui conduisent aux loges, & deux autres au Parterre.

89. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE IV. Extrait des Lettres de M. Clément. » pp. 85-106

Trois Prêtres habillés en Rois, conduits par une figure d’étoile qui paroissoit à la voûte, alloient à une crêche, où ils offroient des dons à un enfant. […] Ses œuvres sont un cours complet de galanterie, non pas grossiere, elle en seroit moins dangereuse, mais la plus fine, la plus artisée, la plus insinuante, qui conduit également au crime. […] Un Comédien est un menteur réfléchi, qui doit conduire artistement son mensonge.

90. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VII. Est-il de la bonne politique de favoriser le Théâtre ? » pp. 109-129

Il n’y a rien qui gâte plus les bonnes mœurs, la simplicité et la bonté naturelle du peuple, et qui a d’autant plus d’effet que leurs paroles, gestes, mouvements, actions, sont conduits avec tout l’artifice possible, et laissent une vive impression dans l’âme. […] Si on ne peut les morigéner en effet, qu’on sauve au moins les apparences, qu’il y ait une ombre de bon ordre : « Teneat scenicos, si non veras saltem umbratilis ordo. » Que l’honnêteté en impose à des gens sans honneur : « Honestas imperet inhonestis. » Qu’il y ait quelque loi pour ceux qui n’ont aucune connaissance de la bonne vie ; il faut un gouvernement à ceux qui ne savent pas se conduire eux-mêmes, il faut un tuteur à ces troupeaux d’hommes, « gregibus hominum », pour arrêter leurs passions effrénées, comme on en donne aux enfants dans la faiblesse de l’âge. […] Peu de gens se conduisent par la raison, et agissent par de bonnes vues ; on regarde la volupté comme le souverain bonheur.

91. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — QUATRIEME PARTIE. — Tragédies à corriger. » pp. 180-233

Je n’appelle pas de ce nom la mort ou la punition d’un homme : le personnage qui forme le nœud de l’action, qui la conduit et qui la termine, est celui, selon moi, sur qui la catastrophe tombe ; soit qu’il en périsse, soit qu’il en reste chargé d’opprobre, ou couronné de gloire, suivant que l’action l’exige ; je m’explique. […] Si Britannicus meurt, quoi qu’innocent ; c’est pour servir au caractère de Néron, et le faire détester davantage : Si Géta est assassiné, sans l’avoir mérité ; c’est pour mieux peindre la cruauté de son frère : si Hyppolite périt ; c’est pour charger le crime de Phèdre : ainsi ce n’est pas sur les personnages qui meurent que tombe ce qu’on appelle la catastrophe ; mais sur ceux qui commencent et qui conduisent l’action à une bonne ou à une mauvaise fin, et qui excitent le plaisir ou l’indignation des Spectateurs suivant les circonstances du sujet. […] Stilicon donne le nom à la Tragédie de Thomas Corneille, non parce qu’il meurt, mais parce que c’est lui qui commence l’action, qui y donne le mouvement, et qui la conduit à sa fin.

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