Mais, persuadé que les vertus & les talens sont la vraie noblesse, & qu’on ne fait tant valoir ses titres que pour suppléer au défaut de mérite, je ne puis comprendre les contradictions des amateurs du théatre continuellement entétés de noblesse, qui la mettent au-dessus de tout, & qui cependant traitent avec tant de considération, & comblent de présens & d’éloges les suppôts de la scène, qui ne sont la plupart que peuple.
Il n’y a point de sage gouverneur qui laissât tenir à ses élèves ou leur permît d’entendre de pareil entretien, et je ne puis comprendre qu’on laisse aller les jeunes gens à la comédie quand on a quelque soin de leur éducation.
Au reste, je ne comprends pas à quel dessein l’on va fouiller dans les tombeaux des Poètes anciens et troubler leurs mânes impurs ; si ce n’est pour faire revivre les impudicités du Paganisme et pour empoisonner les vivants par la corruption des morts.
Les esprits de ceux qui sont du dernier ordre & des plus basses conditions d’un état, ont si peu de commerce avec les belles connaissances, que les maximes les plus générales de la morale leur sont absolument inutiles ; c’est en vain qu’on les veut porter à la Vertu par un discours soûtenu de raisons & d’autorités ; ils ne peuvent comprendre les unes, & ne veulent pas déférer aux autres, &c.… Toutes ces vérités de la sagesse sont des lumières trop vives pour la faiblesse de leurs yeux. […] « Les Anciens distinguaient deux sortes d’Acteurs : les Mimes ou Bateleurs, & les Comédiens dont le nom comprend maintenant ceux qui jouaient les Comédies & les Tragédies ; & comme ces deux sortes de gens étaient différens aux choses qu’ils représentaient, en la manière de représenter, aux lieux où ils jouaient & aux habits qu’ils portaient, ainsi qu’on le peut prouver aisément, ils furent aussi traités différemment.