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94. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Livre second. » pp. 2-7

Etroitement liées à cette règle primitive, source de toutes les autres lois, qui n’en sont que le développement, elles ont dans tous les temps employé toute leur autorité, qu’elles tiennent de la religion même, pour empêcher toutes les représentations théâtrales, si l’ascendant du vice l’eût permis, ou pour en arrêter les désordres.

95. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre II. Suite d’Elisabeth d’Angleterre. » pp. 33-82

Carlos n’hésita plus, il prit ses mesures pour s’évader secrétement, mais il fut découvert & arrêté ; on lui fit le procès par ordre de son père ; il fut condamné comme désobéissant, hérétique & rebelle. […] Elle élargit d’abord tous les prisonniers arrêtés pour cause de Religion, précipitation imprudente ; il pouvoit y en avoir, & il y en savoit en effet accusés de conspiration contre la Reine sa sœur, qu’il étoit de son devoir de punir. […] Ces guerres fournissent bien des scènes, des secours refusés d’obord, & ensuite accordés, des généraux de troupes sont envoyés & sont rappelés ; un désintéressement affecté, & des villes retenues en otage, un Souverain reconnu & renvoyé, un mariage arrêté & rompu, une bague donnée & redemandée, des articles signés & abandonnés. […] Cependant les Écossois révoltés contre Marie, lui déclarètent la guerre, animés & soutenus par Elisabeth, ils la poursuivirent si vivement qu’ils la prirent prisonnière ; elle s’échappa, & demanda un asyle à Elisabeth qui le lui accorda avec la plus tendre démonstration & les plus belles promesses ; à peine fut-elle sur les terres, que par une insigne trahison elle fut arrêtée & renfermée dans la tour de Londres où elle demeura dix-huit ans, sans que la Reine d’Angleterre daignât la visiter, ni même voulût lui accorder une audience qui lui fut souvent demandée ; elle ne sortit de sa prison que pour perdre la vie sur un échaffaud. […] On n’avoit donc aucune juridiction sur elle, aucun droit de l’arrêter, de lui faire le procès, de la condamner, de la punir.

96. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-huitieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre IV. Henri IV. » pp. 121-168

Saint Louis, à la discrétion de ses ennemis, malgré le horreurs de sa prison, & les tourmens qu’on lui fait souffrir, ne voulut jamais changer de religion, refuse même la couronne de l’Egypte qu’on lui offrit ; Henri arrêté à la Cour avec le Prince de Condé, à la premiere menace, abjure sa religion & se fait Catholique ; à peine est-il délivré qu’il abjure la Religion Catholique & redevient Protestant, & reprend les armes contre son Roi ; il redevient Catholique, quand on l’assure qu’il n’y a que le Canon de la Messe qui puisse le faire régner. 7°. […] On arrête & on amene à Henri un Courier dépêché par la Ligue à la Cour d’Espagne, & dans ses papiers on trouve une lettre qui porte : On peut ajouter foi à tout ce que le Courier dira de vive voix. […] Il ne perd pas un instant, échappe au danger d’être arrêté, & remet tout à Henri. […] S’il n’étoit pas parti, comment n’a-t-il pas été arrêté ? […] Un courier, un espion arrêté, des papiers surpris, des secrets découverts, ce stratagême de se servir de la personne, de la main, de la lettre de créance, pour pénétrer, pour tromper l’ennemi, sont si communs dans l’histoire & si naturels, que le moins adroit s’en serviroit.

97. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. Aveux importans. » pp. 83-110

Elles n’oublient rien pour se conserver l’air de jeunesse, elles veulent tromper les hommes, & je ne sais si elles n’espèrent pas de tromper la mort, elles veulent toujours être l’objet de l’amour des hommes, afin d’avoir part à tous les plaisirs quand la vieillesse a répandu ses caractères sur leur tein, elles tirent le rideau dessus pour la rendre invisible ; vous les voyez ces femmes idolâtres du monde & de la volupté ensevelir leurs têtes sous un amas de poudre pour confondre la blancheur de leurs cheveux avec cette blancheur étrangère ; elles comblent avec du fard les enfoncemens de leur visage, elles ombragent les rides de leur front avec des boucles, des rubans, des dentelles ; ce qu’elles font de plus prudent, c’est d’embaumer leur corps avec des parfums pour arrêter l’odeur qui sort de leur cadavre : dans cet équipage elles se mêlent dans toutes les sociétés, dans toutes les parties, au bal, à la comédie, elles y tremblent de foiblesse, à peine distinguent-elles les couleurs, après avoir été les idoles du monde, elles le châtient des crimes qu’elles lui ont fait commettre ; ce sont des spectres qui le poursuivent, il les fuit, il en a horreur. […] Cette idée est une belle chimère que les femmes ont intérêt d’accréditer pour couvrir leur passion d’un voile, & faire croiré qu’aussi respectables que belles, elles sont de ces Venus admirables, qui renfermées dans cette métaphisique de sentimens, joignent aux grâces & à la beauté dont elles se croyent toujours richement pourvues, une vertu sublime, inaccessible aux tentations de la volupté grossière, que quoique tout passe par le corps avant d’arriver à l’esprit, leur esprit & leur cœur ne s’y arrêtent jamais ; que quoique leur toilette ne produise & ne puisse produire que des tentations charnelles, ce n’est pourtant que pour l’esprit qu’elles offrent des nudités, & mettent du rouge ; que ce n’est qu’à l’esprit qu’on adresse la tendresse du chant, le feu des regards, les attitudes, la danse, le langage du geste. […] Ciran, livre plein d’erreurs que le Roi supprima & fit arrêter l’Imprimeur, ce livre contribua à l’emprisonnement de son Auteur, M.

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