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79. (1825) Encore des comédiens et du clergé « DISCOURS PRELIMINAIRE. » pp. 13-48

La plupart de ceux qui sortent des collèges jésuitiques, lorsqu’ils entrent dans le monde et qu’ils y occupent des postes importants, ne veulent pas que des subordonnés raisonnent, et leur permettant de s’abandonner à la morale des intérêts, ce n’est qu’à cette condition qu’ils leur accordent une orgueilleuse protection. […] Non seulement le fanatisme de tout temps montra une opposition marquée à l’enseignement des sciences, aux progrès de la civilisation ; mais il s’est encore efforcé de proclamer comme un axiome qui aujourd’hui en impose à beaucoup d’honnêtes gens, et qui consiste à dire : Que l’ignorance est le partage nécessaire du peuple… qu’il est dangereux pour l’état et pour la religion de lui accorder une instruction approfondie… et que moins il est éclairé, plus il est aisé de le gouverner. […] Toujours ils seront les adversaires irréconciliables des rois, auxquels ils n’accorderont des instants de paix qu’autant qu’ils les auront subjugués, avilis et rançonnés.

80. (1825) Encore des comédiens et du clergé « CHAPITRE VII. De l’inconséquence de quelques prêtres ignorants envers les Comédiens, et de leur fanatisme mis en opposition avec l’autorité du pape et avec la conduite éclairée du haut clergé et des ecclésiastiques sensés en France. » pp. 134-140

Mais remontons au temps de Molière dont le cadavre éprouve le refus de sépulture en terre sainte de la part du curé de Saint-Eustache, tandis que le curé de Saint-Joseph la lui accorde.

81. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre III. Autre continuation des Mêlanges. » pp. 45-87

Aucun passion n’exerce un plus severe despotisme sur ses esclaves ; les tributs n’adoucissent point son empire : plus on lui accorde plus elle exige. […] Le Dieu du Goût, dans le Temple de Voltaire, lui accorde une des premieres places parmi les poëtes négligés, mais non parmi les bons poëtes. […] Ce Prélat qui aimoit la danse leur accorda autant de terrein qu’ils en pourroient entourer en se tenant par la main & dansant en rond. […] Ce trait, s’il est vrai, paroît imité de la fondation de Carthage, où l’on accorda à Didon autant de terrain qu’elle pourroit en occuper avec le cuir d’un bœuf. […] On sera bien étonné d’apprendre que le Gouvernement n’ayant jamais pu extirper les brigands, a cru, par une sorte de politique, devoir prendre le parti de leur accorder la protection, & de se servir d’eux comme dans les armées on se sert des maraudeurs, des hussards, ou sur mer des pirates.

82. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre II. Suite d’Elisabeth d’Angleterre. » pp. 33-82

L’Église Judaïque ne vit jamais un pareil monstre dans les successeurs d’Aaron, ni l’Église Catholique dans les successeurs de Saint Pierre ; on ne reçoit pas même les bâtards dans le ministère sans une dispense expresse qui s’accorde rarement, & jamais les femmes sous aucun prétexte ; l’Église Britannique n’y regarde pas de si près, elle doit sa puissance à l’amour des femmes & à l’adultère, elle est adultère elle-même, en se séparant de son époux par l’hérésie & le scbisme, peut-elle n’être pas par reconnoissance favorable au beau sexe & à la bâtardise ? […] Apollon toujours équitable prétend qu’ils ont raison tous deux  ; elle lui en fit les plus vifs reproches, & ses lettres contribuèrent à faire porter le fameux Édit de Nantes que Louis XIV s’est fait un devoir & un mérite de révoquer, Édit qui donne aux Huguenots plus qu’on ne leur avoit jamais accordé, il fut dressé part les Ministres Huguenots qu’Henri en chargea ; il n’en auroit pas fait davantage quand il étoit à leur tête, peut-être n’eut-il pas osé en faire tant. […] Ces guerres fournissent bien des scènes, des secours refusés d’obord, & ensuite accordés, des généraux de troupes sont envoyés & sont rappelés ; un désintéressement affecté, & des villes retenues en otage, un Souverain reconnu & renvoyé, un mariage arrêté & rompu, une bague donnée & redemandée, des articles signés & abandonnés. […] Cependant les Écossois révoltés contre Marie, lui déclarètent la guerre, animés & soutenus par Elisabeth, ils la poursuivirent si vivement qu’ils la prirent prisonnière ; elle s’échappa, & demanda un asyle à Elisabeth qui le lui accorda avec la plus tendre démonstration & les plus belles promesses ; à peine fut-elle sur les terres, que par une insigne trahison elle fut arrêtée & renfermée dans la tour de Londres où elle demeura dix-huit ans, sans que la Reine d’Angleterre daignât la visiter, ni même voulût lui accorder une audience qui lui fut souvent demandée ; elle ne sortit de sa prison que pour perdre la vie sur un échaffaud. […] Cette grâce qu’on accorde aux plus coupables, lui fut inhumainement refusée, elle disposa de sa sépulture, distribua à ses domestiques tout ce qui étoit en son pouvoir, les consola de la manière la plus affectueuse, embrassa toutes ses femmes, & donna sa main à baiser aux hommes ; à l’exemple de Saint Louis, elle donna à son fils les avis les plus pieux & les plus sages, qu’elle chargea son premier Officier de lui porter de sa part, ensuite elle se retira dans son cabinet, & passa la nuit en prière.

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