Telle est de mon honneur l'impitoyable loi, Lorsqu'un ami l'arrête, il n'a d'yeux que pour soi; Et dans ses intérêts toujours inexorable, Veut le sang le plus cher au défaut du coupable. » On écoute avec plaisir ces paroles barbares d'un père à un fils, à qui il donne charge de le venger.
C’est pourquoy j’ay ajoûté, eû égard à nôtre foiblesse & à nôtre experience ; parce que quoyque la corruption du cœur soit commune à tous les hommes, & que le panchant soit une des suites du peché avec lequel nous naissons tous ; ce penchant neanmoins n’est pas également violent dans tous les hommes, & cette foiblesse n’est pas également à craindre dans tout âge, dans tout sexe, & dans toutes sortes d’états ; ainsi ceux à qui une funeste experience n’a que trop appris, qu’ils ne se trouvent jamais dans ces assemblées libres & enjoüées, à ces bals, qui ne sont faits que pour entretenir la galanterie, à ces balets & à ces danses, où l’on ne s’étudie qu’à exprimer par geste, la passion dont on est possedé, ceux qui écoutent avec un singulier plaisir ces airs languissans & passionnez, ces concerts de voix & d’instrumens, où tout ce que la musique a de plus animé, porte jusqu’au cœur les sentimens les plus tendres ; ceux qui sont charmez de ces comedies, où des hommes & des femmes paroissent sur un Theâtre, pour exprimer le plus naturellement & le plus vivement qu’il leur est possible, la plus dangereuse de toutes les passions ; ces personnes, dis-je, me demandent, s’il y a peché grief de voir & d’entendre ce qui excite, & ce qui allume cette passion, à quoy elles n’ont que trop de panchant ; n’est-ce pas demander s’il y a du peché à chercher l’occasion du peché, & à s’exposer au danger de le commettre ? […] Dans les concerts qui entrent souvent dans ces divertissemens, si ce que l’on chante n’est passionné, & n’amollit le cœur, peut-on seulement les écouter ? […] Ne faut-il pas que ceux qui la representent, s’ils veulent plaire & être écoutez avec applaudissement, expriment cette passion vivement ? […] Or, s’il y a du danger de s’accoûtumer à entendre des sentimens & des maximes contraires à la Religion que nous professons, si l’Eglise même employe son authorité, pour défendre la lecture des livres suspects, si la compagnie des personnes qui ont toûjours ces maximes dans la bouche, ou qui reglent leur vie selon ces sentimens, est dangereuse, parce qu’ils les inspirent à ceux qui les frequentent ; y aura-t-il moins de danger à les voir exprimer, representer, approuver, écouter les applaudissemens que l’on donne à ceux qui les font le mieux sentir, & qui les font entrer dans l’esprit par la beauté des vers, & des pensées si noblement exprimées ? […] Il n’est pas moins inutile d’ajoûter, que quoyque l’on ne voye guere de pieces de Theâtre sans amour, & que pour l’y faire entrer, on n’a pas même égard à la verité de l’Histoire, pourvû qu’on ne sorte point de la vray-semblance ; neanmoins on n’y represente que des passions legitimes, qui ont pour fin le Mariage, que Dieu même a authorisé, & institué le premier ; parce que l’esprit de ceux qui les voyent representer, ne s’attache qu’à ce qui luy plaît, & fait abstraction des circonstances qui les peuvent justifier ; car ce n’est pas une chose que les Acteurs puissent regler dans ceux qui écoutent, ni arrêter dans les limites qui sont permises, comme fait le Poëte dans ses Vers ; au contraire les spectateurs n’en reçoivent souvent que ce qu’elles ont de criminel ; & elles agissent ensuite selon la difference des dispositions qu’elles rencontrent ; & l’on peut dire, que souvent la representation d’une passion couverte de ce voile d’honnêteté, a plus infailliblement son effet, que les autres les plus illegitimes, parce qu’on est moins sur ses gardes, qu’on s’en défie, & qu’on s’en défend le moins ; aussi agit-elle plus à coup sûr, & sans qu’on se précautionne des remedes qui pourroient en empêcher l’impression : d’où il s’ensuit que ces spectacles sont toûjours dangereux pour tout le monde, & qu’un Chrétien ne doit jamais se fier à sa propre vertu.
C’est pourquoy j’ay ajoûté, eû égard à nôtre foiblesse & à nôtre experience ; parce que quoyque la corruption du cœur soit commune à tous les hommes, & que le panchant soit une des suites du peché avec lequel nous naissons tous ; ce panchant neanmoins n’est pas également violent dans tous les hommes, & cette foiblesse n’est pas également à craindre dans tout âge, dans tout sexe, & dans toutes sortes d’états ; ainsi ceux à qui une funeste experience n’a que trop appris, qu’ils ne se trouvent jamais dans ces assemblées libres & enjoüées, à ces bals, qui ne sont faits que pour entretenir la galanterie, a ces balets & à ces danses, où l’on ne s’étudie qu’à exprimer par geste, la passion dont on est possedé, ceux qui écoutent avec un singulier plaisir ces airs languissans & passionnez, ces concerts de voix & d’instrumens, où tout ce que la musique a de plus animé, porte jusqu’au cœur les sentimens les plus tendres ; ceux qui sont charmez de ces comedies, où des hommes & des femmes paroissent sur un Theâtre, pour exprimer les plus naturellement & le plus vivement qu’il leur est possible, la plus dangereuse de toutes les passions ; ces personnes, dis-je, me demandent, s’il y a peché grief de voir & d’entendre ce qui excite, & ce qui allume cette passion, à quoy elles n’ont que trop de panchant ; n’est-ce pas demander s’il y a du peché à chercher l’occasion du peché, & à s’exposer au danger de le commettre ? […] Dans les concerts qui entrent souvent dans ces divertissemens, si ce que l’on chante n’est passionné, & n’amollit le cœur, peut-on seulement les écouter ? […] Ne faut-il pas que ceux qui la representent, s’ils veulent plaire & être écoutez avec applaudissement, expriment cette passion vivement ? […] Or, s’il y a du danger de s’accoûtumer à entendre des sentimens & des maximes contraires à la Religion que nous professons, si l’Eglise même employe son authorité, pour défendre la lecture des livres suspects, si la compagnie des personnes qui ont toûjours ces maximes à la bouche, ou qui reglent leur vie selon ces sentimens ; est dangereuse, parce qu’ils les inspirent à ceux qui les frequentent ; y aura-t-il moins de danger à les voir exprimer, representer, approuver, écouter les applaudissemens que l’on donne à ceux qui les font le mieux sentir, & qui les font entendre dans l’esprit par la beauté des vers, & des pensées si noblement exprimées ? […] Il n’est pas moins inutile d’ajoûter, que quoyque l’on ne voye guere de pieces de Theâtre sans amour, & que pour l’y faire entrer, on n’a pas même égard à la verité de l’Histoire, pourvû qu’on ne sorte point de la vray-semblance ; neanmoins on n’y represente que des passions legitimes, qui ont pour fin le Mariage, que Dieu même a authorisé, & institué le premier ; parce que l’esprit de ceux qui les voyent representer, ne s’attache qu’à ce qui lui plaît, & fait abstraction des circonstances qui les peuvent justifier ; car ce n’est pas une chose que les Acteurs puissent regler dans ceux qui écoutent, ni arrêter dans les limites qui sont permises, comme fait le Poëte dans ses Vers ; au contraire les spectateurs n’en reçoivent souvent que ce qu’elles ont de criminel ; & elles agissent ensuite selon la difference des dispositions qu’elles rencontrent ; & l’on peut dire, que souvent la representation d’une passion couverte de ce voile d’honnêteté, a plus infailliblement son effet, que les autres les plus illegitimes, parce qu’on est moins sur ses gardes, qu’on s’en défie, & qu’on s’en défend le moins ; aussi agit-elle plus à coup sûr, & sans qu’on se précautionne des remedes qui pourroient en empêcher l’impression : d’où il s’ensuit que ces spectacles sont toûjours dangereux pour tout le monde, & qu’un Chrétien ne doit jamais se fier à sa propre vertu.
Aussi voyons-nous que les Spectacles changent comme les mœurs, et qu’il n’y a point d’Auteur qui n’étudie le goût dominant de sa nation pour le bien rendre ; point d’Acteur qui ne fasse tous ses efforts pour entrer dans les sentiments du rôle qu’on lui donne, et pour les communiquer à tous ceux qui l’écoutent. […] Le Diable, toujours attentif à faire valoir son œuvre, remue toutes les passions de ceux qui représentent et de ceux qui regardent, de celles qui déclament et de celles qui écoutent, pour faire un assemblage monstrueux de pensées lascives et de désirs criminels. […] Mais, vous êtes autant inconséquents que déraisonnables, lorsqu’il s’agit de justifier ce qui flatte vos passions, et ce qui nourrit votre mollesse et votre oisiveté, autrement il y a longtemps que vous auriez vu, avec toute l’Eglise dont vous devez écouter les lois, que les Spectacles sont la ruine des bonnes mœurs. […] Vous nous soutenez toujours qu’il n’y a point de mal ; mais qui, de vous ou des successeurs des Apôtres que vous devez écouter comme Jésus-Christ, et que vous ne pouvez mépriser sans le mépriser lui-même, jugera cette question. […] Examinez ceux qui travaillent pour le Théâtre, ceux qui récitent, ceux qui écoutent, et vous trouverez dans le plus grand nombre des personnes qui vivent sans espérance et sans foi.