Mais de quelque beauté que brille ce chef-d’œuvre de Jean-Jacques, ma réponse sera toujours celle-ci : le même volume qui renferme sa lettre contre les théâtres, contient également ses pièces de théâtre ; et on lit à la note 66 de cette même lettre les paroles suivantes échappées à l’auteur du devin du village : « Je n’ai jamais manqué volontairement une représentation de Molière… J’aime la comédie à la passion… » Qu’en pensez-vous, M. le Laïc, et que diriez-vous si un personnage auguste s’était chargé de me fournir, par le courrier d’aujourd’hui, un argument de plus : lisez l’ordonnance du Roi du 8 décemb. 1824, qui a pour but de favoriser l’art dramatique et de procurer aux jeunes comédiens les avantages d’une instruction graduée.
On ne voit pas le cortège, mais seulement le personnage qui mérite le plus d’attention.
Dans une de ces Hôtelleries, espèce de divertissement assez commun dans les Cours d’Allemagne, quand le bon goût y étoit moins connu ; dans une Hôtellerie, dis-je, tenue pour célébrer le Mariage d’une Princesse de Danemarck avec un Duc de Holstein, la Reine fit le personnage de coupeuse de bourses, & le Prince Royal son Fils, celui de Garçon Barbier.
Ainsi dans la vie les riches & les pauvres ne sont que des personnages de comédie.
L'Observateur veut que tout le monde ait également de l’esprit et il n’examine point quel est le personnage.
Rodogune de son côté ne me paraît pas avoir plus de grandeur d’âme que sa rivale, lorsqu’elle prend le parti, pour se venger, de faire assassiner Cléopâtre : ainsi tout ce que ces deux femmes entreprennent, ne me paraît point s’accorder avec la grandeur des personnages tragiques.
Suivit une mascarade singuliere, composée de tous les divers personnages des piéces de Shakespear qui promenoient sa statue dans un char de triomphe, & la conduisirent à la grande place, où Garrik la couronna de laurier. […] Au jour marqué, parurent sur la riviere d’Arne, un grand nombre de barques chargés d’échafauts, & de personnages qui représenterent l’enfer : on y voyoit du feu, des roues enflammées, divers autres genres de supplices : parmi quantité de dragons & de serpens monstrueux, on voyoit des hommes, dont les uns portoient des figures horribles, des démons ; les autres tous nuds pour représenter les ames des damnés, jettoient des cris & poussoient des hurlemens aussi affreux que s’ils avoient été en effet dans les tourmens ; mais rien ne pouvoit être plus tragique que ce qui termina cette scene : au moment que le peuple, avide de ces folles représentations, paroissoit le plus attentif, le pont construit de bois, se trouvant trop chargé, tomba tout à coup : tous ceux qui étoient dessus, furent précipités dans les eaux ; & plusieurs y périrent : ceux qui se sauverent, furent la plupart estropiés & toute la ville dans la désolation.
Ne joue-t-on pas au théâtre toutes sortes de personnages ? […] Rousseau dans la Préface où il prétend excuser ses obscenes Epigrammes, dit avec raison : Les contes de la Fontaine tous licentieux qu’ils sont, sont incomparablement moins dangereux que les Eneïdes d’Ovide, & les Opéras de Quinaut, qui n’ont pourtant rien de licencieux, ni même d’équivoque ; mais, dit-on, ce ne sont pas ses propres sentiments qu’exprime l’actrice, ses propres foiblesses qu’elle détaille, ce sont ceux du personnage qu’elle joue ; qu’importe l’habit dont elle est couverte, le nom qu’on lui donne, est-ce moins l’objet du vice ?
L’imbécile Public s’était imaginé depuis longtemps que l’Achille de Racine, le Britannicus, la Phèdre, l’Athalie, Atrée, Thyeste, Pyrrhus, Electre, Orosmane, Zaïre étaient des personnages vraiment tragiques : qu’il est heureux, ce Public, d’avoir un précepteur comme Jean-Jacques Rousseau pour le tirer de son aveuglement ! […] « Qu'un jeune homme n’ait vu le monde que sur la Scène, le premier moyen qui s’offre à lui pour aller à la vertu est de chercher une maîtresse qui l’y conduise, espérant bien trouver une Constance ou une Cénie […] C'est ainsi que, sur la foi d’un modèle imaginaire […] “nescius auræ fallacis”, le jeune insensé court se perdre, en pensant devenir un Sage. »dy Voilà donc un jeune homme tellement épris de la Vertu Scénique qu’il ne trouve d’objet estimable que celui qui ressemble le mieux à deux personnages de Théâtre, Constance et Cénie : donc le Théâtre a le pouvoir de faire aimer la Vertu.
Il est vrai que ces pieux personnages qui ont voulu changer les temples et les mosquées en Eglises, ont mis à leur théâtre dévot des conditions qui ne s’observent guère, et qui en écartant le danger affadissent le sel du spectacle. […] On voit de même que les personnages assortis aux caractères réussissent mieux ; un homme emporté prendra mal un ton doux et tendre, un esprit doux et modéré n’est pas fait pour les fureurs d’Oreste, le masque du vice embarrasse la vertu, le masque de la vertu ne sied pas bien au vice : Rien n’est beau, j’y reviens, que par la vérité.
La femme qui jouait le rôle de Chimène, me toucha et par la beauté et par la tendresse des sentiments de son personnage. […] Mais ce regret ne dura pas longtemps, j'appris bientôt que cette femme qui représentait sur le théâtre des personnages si vertueux, n'était dans le particulier rien moins qu'une Chimène.
Comme si on y faisait un aveu, que le Théâtre ne peut subsister sans galanterie, on crée un personnage, un Misaël amoureux de Judith, un jaloux follement transporté, pour ne la quitter jamais, et pour lui faire tenir le langage des amants sans religion, se prosterner aux pieds de Judith372, l’appeler beauté immortelle, faire cent réflexions sur ses appâts, et ne parler que de mouvements jaloux qui l’agitent sans cesse 373, c’est son caractère et l’exercice qu’on lui donne. […] Qu’il sied bien à de telles gens, de faire les personnages des Saints, et de chanter publiquement les louanges Divines, après que Dieu a si souvent fait entendre aux hommes qu’il ne voulait être loué que par ceux qui pratiquent la vertu. « Rectos decet laudatio », dit le Prophète Roi, et saint Basile expliquant ces paroles, remarque que c’est pour cette raison que Dieu fit taire le démon qui l’appelait Saint ; que saint Paul imposa silence à la Pythonisse qui lui donnait des louanges, et que Dieu défend aux pécheurs d’annoncer ses justices.
Le Journal des Savans (Août 1770) a prétendu faire l’éloge de Mélanie, & il fait sa condamnation : Le génie de ce drame & la qualité de quelques-uns de ses personnages lui a enleve l’avantage de briller sur le Théatre. […] Les personnages sur le Théatre n’avoient rien de choquant, rien qui pût dégrader le plus saint ministère. […] Personnage absolument étranger, & déplacé dont on n’a point d’exemple.
Grégoire la fille de la gourmandise et du péché, et que c’est en sens qu’il est écrit : « Que le peuple s’assit pour manger et pour boire et qu’il se leva pour jouer. » C’est une réponse que nous devons donner à tout ce qu’on nous objecte des Saints Pères, avec d’autant plus de raison qu’à les examiner sans prévention et à peser toutes leurs paroles, il est aisé de voir que s’ils sont tant déchainés contre la Comédie, ça a été parce que de leur temps, l’excès en était criminel et immodéré, et que s’ils l’avaient trouvée, comme elle est aujourd’hui conforme aux bonnes mœurs et à la droite raison, ils ne l’auraient pas tant décriée, et auraient crû, comme saint Thomas, qu’il n’y avait point de mal à y assister, mais c’était quelque chose de si horrible et de si infâme que la Comédie, comme la jouait du temps de nos pères, qu’il n’y a personne à l’heure qu’il est, (je parle des gens du monde et de ceux encore qui sont les moins retenus) qui ne les condamna comme ont fait les Pères, et ce n’est pas une chose étonnante que ces saints Personnages aient employé toute la force de leur zèle contre la chose la plus scandaleuse qui fut dans l’Eglise. […] S’il était vrai que les Comédiens fussent infâmes pour monter sur le Théâtre et pour jouer la Comédie, je voudrais savoir en vertu de quoi les jeunes gens dans les Collèges, les personnes les plus sages, et quelquefois les plus qualifiées, les Princes mêmes et les Rois, les Prêtres et les Religieux, qui tous pour se divertir, et sans scandale, représentent des personnages dans des Comédies, ne sont point infâmes ; et que les Comédiens le sont, eux qui ne font pas autre chose ? […] Il était beau de voir les Prêtres, les Diacres et les Ministres des Autels représenter des personnages, à quoi je ne puis donner d’autres noms que ridicules, en l’honneur de saint Estienne, de saint Jean, ou des saints Innocents !
Si les peintures immodestes raménent naturellement à l’esprit ce qu’elles expriment, & que pour cette raison on en condamne l’usage, combien plus sera-t-on touché des expressions du théâtre où tout paroît effectif, où ce ne sont point des traits morts & des couleurs seiches qui agissent, mais des personnages vivans, de vrais yeux, ou ardens, ou tendres, ou plongés dans la passion ; que vraies larmes dans les acteurs qui en attirent d’aussi véritables dans ceux qui regardent ; enfin, de vrais mouvemens qui mettent en feu tout le parterre ? […] Pour le comprendre, il ne faut que considérer quelles impressions font sur l’ame les images les moins animées par elles-mêmes ; il ne faut que considérer quel est le sentiment naturel qui accompagne la lecture d’un évenement profâne, la vue d’une peinture immodeste ou d’une statue indécente : si ces objets, tout inanimés qu’ils sont, se retracent naturellement à l’esprit, si on ne peut même en sentir toute la beauté & toute la force sans entrer dans la pensée de l’Auteur ou dans l’idée du Peintre, quelle impression ne font pas les spectacles, où ce ne sont pas des personnages morts ou des figures muettes qui agissent, mais des personnages animés qui parlent aux oreilles, qui trouvent dans les cœurs une sensibilité qui répond aux mouvemens qu’ils ont taché d’y produire, jettent toute une assemblée dans la langueur, & la font brûler des flammes les plus impures ? […] tout le but de son travail est qu’on s’agite avec le personnage qui s’agite, qu’on s’associe à la douleur d’une femme affligée, qu’on prenne part au ressentiment d’un homme offensé qui exagére l’outrage qu’il a reçu ; & si l’effet n’accompagne pas l’exécution de sa piece, ne regarde t-on pas le secret de l’art comme manqué ? […] Mais ce ne sera pas certainement celui qui formant le plan d’une République parfaite, commençoit à en bannir tout acteur, & même tout auteur de théâtre : non pas dans un temps où le spectacle fut une école de dissolution, comme vous voulez le supposer toujours ; mais dans un temps où les Magistrats de la Grece punissoient un auteur comme un empoisonneur public, pour avoir seulement altéré le caractere d’un Héros en y mêlant une passion ; dans un temps où l’auteur le plus célebre d’Athènes fut condamné par un jugement public, pour avoir mis sur la scène un personnage impie qui parloit avec trop peu de respect de la Religion.
C'est vous qui dans ces représentations malheureuses profanez la sainteté du mariage, qui déshonorez devant tout le monde ce grand Sacrement : Car celui qui représente ces personnages infâmes, est moins coupable que vous qui les faites représenter, que vous qui l'animez de plus en plus par votre passion, par vos ravissements, par vos éclats, et par vos louanges, et qui travaillez en toutes manières à embellir et à relever cet ouvrage du Démon.
Quelle perversité n’est-ce point, dit un grand personnage, d’aimer ceux que l’on condamne, de mépriser ceux que l’on applaudit, d’adorer l’ouvrage dont on blâme l’ouvrier ?
Chacun sçait que les principaux Directeurs du Christianisme ne font point de scrupule de fournir aux frais des Opera, d’en donner le spectacle dans leurs Palais, & méme des gens deuouez au seruice de l’Eglise, qui ont d’excellentes voix, paroissent sur les Theâtres publics, pour y joüer vn personnage en chantant. […] On fait sonner bien haut en Espagne le zele de la Religion, & toutefois en Espagne on void introduire sur les Theâtres publics des personnages en habit Ecclesiastique, ce qui ne seroit soufert en France en quelque maniere que ce fust. […] Ils en vsent de méme à proportion en d’autres rencontres, & introduisent quantité de personnages muets que nous nommons Assistans, pour bien remplir le Theâtre ; ce qui satisfait la veüe, & cause aussi quelquefois de l’embarras. […] Il est vray que lors qu’ils representent vne piece qui n’est vniquement que pour les plaisirs du Roy, les Gentils hommes de la Chambre ont ordre de donner à chaque Acteur pour ses ájustemens necessaires vne somme de cent escus ou quatre cens liures, & s’il arriue qu’vn méme Acteur ayt deux ou trois personnages à representer, il touche de l’argent comme pour deux ou pour trois. […] S Vr ce qui Nous a esté representé par le Procureur du Roy, Que certains Personnages sans employ, portans l’épée, qui ont en diuerses occasions excité des desordres considerable en cette Ville, ayant depuis peu de jours, auec la derniere temerité, & vn grand scandale, entrepris de forcer les portes de l’Hostel de Bourgogne, se seroient attroupez pour l’execution de ce dessein auec plusieurs Vagabonds, lesquels assemblez en tres-grand nombre, estant armez de Mousquetons, Pistolets & Epées, seroient à force ouuerte entrez dans ledit Hostel de Bourgogne pendant la Representation de la Comedie qu’ils auroient fait cesser, & ils y auroient commis de telles violences contre toutes sortes de personnes, que chacun auroit cherché par diuers moyens de se sauuer de ce lien, où lesdits Personnages se disposoient de mettre le feu, & dans lequel, auec vne brutalité sans exemple, ils maltraittoient indifferemment toutes sortes de gens.
Un mélange de bassesse, de fausseté, de ridicule orgueil, et d’indigne avilissement, qui le rend propre à toutes sortes de personnages, hors le plus noble de tous, celui d’Homme, qu’il abandonne. […] Dans la Tragédie, les personnages avancés en âge, sont des tyrans, des usurpateurs ; dans la Comédie, des jaloux, des usuriers, des pédants, des pères insupportables, que tout le monde conspire à tromper.
Henri IV Roi de Castille, la Reine sa femme & toute sa Cour noyée dans la volupté, étoient de vrais personnages de théatre. […] Ils exposeront des vérités, horribles sans doute, ils les embéliront par des épisodes & des personnages imaginaires ; c’est-à-dire qu’ils affoibliront l’horreur du crime, qu’ils nous accoutumeront, nous familiariseront pour ainsi dire, avec des scélerats, nous feront un jeu, un amusement des forfaits & des folies.
Jamais semblable à elle-même, & toujours semblable à elle-même, ce nouveau Prochée se transformoit en toute sorte de personnages, & plaisoit dans tous. […] Tout est frippons dans cette Comédie, Valet, Servante, Maître, qui est le principal personnage, & qui rend frippons tous les autres.
Il en est des spectateurs & de l’Acteur, comme des personnages. […] On l’appercevra dans le choix de ses lectures, dans la préférence des scenes, dans les sentimens, les bons mots, le caractere des personnages, l’éclat des décorations, la beauté des Actrices, &c.
Ils en obtinrent ensuite la permission, pourvu qu’ils y conservassent toujours le personnage d’arlequin. […] Je ne citerai ni l’ancienne comédie, où l’on nommoît les personnages, ni la moyenne, dans laquelle on se servoit de masques ressemblans aux personnes que l’on vouloit désigner, mais la moderne, qui étoit la plus épurée.
C’est un mensonge perpétuel, dit-il, des personnages feints, des événemens fabuleux, des discours supposés, des Dieux, des Déesses imaginaires, des enchantemens, &c.
Dans les Satyriques, on deguisoit les Acteurs, en faunes, en Bergers, & en autres personnages champetres.
Quinto, l’on reconnaît oculairement que ce qu’ils en font est seulement pour le quêteag et pour le gain, comme ils feraient d’une taverne ou négociationah et qu’ils veulent devenir histrions, joculateursai et bateleurs car, comme dit Panormitanusaj in titulo « Cum decorem », un personnage est réputé histrion, bateleur et joculateur quand par deux fois il retourne causa questus ak à faire jeux ou spectacles publics, et ainsi en propres termes le déclare Panormitanus In dicto titulo « Cum decorem » divine domus.
On est tout étonné, en le parcourant, d’y trouver une liste ou une catégorie nombreuse de personnages dans tous les rangs et de toutes les opinions politiques et religieuses, que ce loup enragé, attaque avec furie et qu’il cherche à blesser par ses morsures envenimées.
[NDE] Nicolo Barbieri (1576-1641), acteur et auteur dramatique italien, créateur de personnages de la Commedia dell’arte (Beltrame, Scapino).
Le second drame appellé la Centenaire, quoi qu’assez mal conçu, est mieux entré dans cet esprit, il est plus ingénieux dans le détail, c’est le revers de l’ombre de Moliere que l’auteur a voulu imiter ; celle ci, quoique peu de tems après la mort du poëte, suppose tous ses personnages morts comme lui, pour les avoir tous dans ses enfers, & les fait venir l’un après l’autre au tribunal de Pluton, accuser les critiques de Moliere, & par les réponses & le jugement du tribunal, fait indirectement la justification & l’éloge de l’accusé, ce qu’il fait souvent avec esprit. […] Les personnages sont ordinairement épisodiques ; ici ils sont le fond de la piéce, & en forment l’intrigue.
Par exemple, Monsievr, & cecy se remarque plus particulierement dans leurs Tragedies, s’ils sont de la Secte d’Epicure, tous leurs personnages sont generalement Epicuriens, voire mesme les Femmes & les Enfans, qui blasphement contre la Prouidence de Dieu, & nient l’Immortalité de l’Ame.
Enfin, ne pouvant se dispenser de faire entrer dans leurs Pieces des méchans & même des scélérats, & de les faire parler conformément à leur caractere, ils eurent soin de prémunir l’esprit des Spectateurs contre le poison du vice, en introduisant sur la scene le Chœur composé de Personnages vertueux & innocens, qui prenoient part à l’action ; s’intéressoient pour la vertu opprimée ; détestoient l’injustice, & corrigeoient, par des maximes pleines de sagesse & de gravité, ce qu’il y avoit de repréhensible dans la conduite & dans les discours de quelques-uns des Interlocuteurs.
Quoiqu’on ne nomme personne, ce qui occasionneroit bien des corrections un peu vives, on désigne si bien les personnages, comme Aristophane, qu’il est aisé de lever le masque : ce qui est arrivé cent fois à Moliere.
Elle est la parodie vivante de son personnage.
» Tel, dit le Sage (car son oracle peut avoir ces trois sens différents), tel celui qui se repaît de mensonges, de fables, de personnages, de spectacles ; il nourrit des vents, il se nourrit de vents, il mène paître les vents : « Qui nititur mendaciis, hic pascit ventes.
Mais il est faux que ce fut sur le Théâtre public qu’Héliogabale osât faire le personnage de Vénus « Agebat præterea domi fabulam Paridis, ipse Veneris personam subiens, ita ut subito vestes ad pedes desinerent. […] C’étaient les Doyen, Maîtres et Confrères de la Confrérie de la Passion et Résurrection de Notre Sauveur Jésus-Christ fondée en l’Eglise de la Trinité grande rue Saint-Denis, qui avaient droit de faire représenter par personnages plusieurs beaux Mystères. […] , qu’on n’en fera que très rarement, qu’on prendra toujours des sujets de piété, et qu’il n’y paraîtra point de personnage de femme ni de fille. […] On le souffre néanmoins en certaines occasions ; mais j’ai ouï dire à des Visiteurs de l’Oratoire, qu’on observe partout inviolablement de ne laisser jamais paraître sur le Théâtre aucun personnage de fille ni de femme. […] Si cette loi peut souffrir quelque explication en certaines rencontres, ce ne doit pas être, ce me semble, pour un sujet aussi peu décent et aussi peu utile qu’il l’est de faire paraître des femmes sur un Théâtre, et de faire représenter par des Ecoliers un personnage qu’ils n’exerceront jamais.
Saint Charles ordonne ensuite que chaque Prédicateur pour persuader plus efficacement le peuple de tous les maux que produit la Comédie70, « il emploiera les preuves dont se sont servis ces grands personnages, savoir, Tertullien, Saint Cyprien Martyr, Salvien et saint Chrysostome ». […] A l’égard des Comédies où l’on représente des choses mauvaises, il y a du péché d’y assister quand le plaisir a pour objet les choses déshonnêtes ; mais il n’y en a point, disent-ils, quand le plaisir vient de la manière ingénieuse et spirituelle qui se trouve dans l’invention et dans la représentation : par exemple, par rapport à l’Acteur qui fait bien son personnage ; quelques Auteurs sont de ce sentiment. […] On répond donc premièrement, que la distinction que l’on fait de la chose représentée d’avec la manière de la représenter ; ou de l’habileté de l’Acteur qui fait bien son personnage, d’avec ce qu’il représente, est l’effet d’un raisonnement spéculatif et trop subtil, dont l’application ne peut avoir lieu dans la pratique, en matière d’impureté.