Les cirques, les amphithéatres, étoient des écoles, des exercices de futeur ; l’enchantement des Syrènes introduit la volupté dans les cœurs, la fait régner dans l’univers ; elle inspire les Poëtes dramatiques, & rend le métier de Comédien infame.
Il étudia Aristote, prit pour commentaire, comme il le dit, ses cinquante années d’expérience, & fit après cette lecture, trois Discours sur le Poëme Dramatiques.
Ces danses étoient des intermèdes, des délassemens, comme elles le sont encore dans les entr’actes de nos pieces dramatiques ; elles ranimoient le plaisir. […] L’art dramatique est l’art de peindre ; chaque drame est un tableau général d’une action composée d’une suite de tableaux, chaque acte, chaque scène en est un ; une danse doit faire une scène, & par conséquent un tableau.
La sagesse lui donna toujours la préférence, & c’est un vrai scandale de sacrifier les intérêts de la religion & de la vertu à quelque talent dramatique, quelque supérieur qu’il puisse être. […] pour élever un théatre à Moliere sur les débris de l’univers dramatique qui ne s’embarrasse point de lui. […] Rousseau, il est vrai, est inférieur à Moliere dans le dramatique, mais très-supérieur dans tous les autres genres de poësie, si même on peut être appellé supérieur d’un homme qui n’est rien.
Cette dame, d’ailleurs si vertueuse, eut le malheur d’affoiblir & de faire presque évanouir deux conversions les plus importantes en ce genre, d’un grand roi, l’amateur le plus déclaré, & du plus grand poëte dramatique, par l’air contagieux du théâtre qu’on leur fit respirer.
Et de notre temps le docte Scaliger a parlé de la Dramatique.
Il est vrai, et voilà le mal du genre dramatique ; il met dans la nécessité de donner de mauvais exemples, de composer et de jouer des rôles vicieux, de faire dire des sottises.
Voici les termes de ce Poète élégant & judicieux ; « Une Comédie où l’on rencontre des sentimens & des mœurs, quoi qu’elle soit sans grace, sans force & sans art, plait quelques fois d’avantage au Spectateur, & l’attache plus fortement que ces Vers magnifiques & harmonieux qui ne signifient rien5. » Je terminerai cet article par une remarque du Père Brumoy ; il semble conseiller aux Auteurs Dramatiques de ne se point donner la peine de bien écrire leurs Poèmes, parce que le Sublime du stile n’est jamais saisi aux représentations.
Aussi le grand art des auteurs dramatiques est-il d’inspirer la passion de leur héros.
Un bel esprit dramatique est un Poète affamé qui attend une portion d’une représentation pour avoir du pain, ou un libertin qui satisfait par le portrait du vice son cœur dépravé, comme un Peintre, qui peint des nudités, pour débiter sa marchandise ou repaître sa passion.
La nation dramatique est une espece d’association & de cotterie, dont le théatre est le lien. […] que de matiere il eût fourni à nos Dramatiques ?
Une telle peinture ne seroit pas assez vive pour frapper la multitude qui s’assemble dans les Théâtres, parce que ce seroit leur peindre une chose très-éloignée de leurs Mœurs : le Poëte Dramatique se sent peu de génie pour exprimer cette tranquillité d’ame. […] J’avoue que le Poëme Dramatique est fait pour être représenté, & je soutiens en même tems qu’il n’est jamais bon, quand il ne se fait pas lire.
Et de là vient peut-estre que vostre Horace, grand imitateur des Grecs, parlant du Dieu qui preside à la Poësie dramatique, Ie l’ay vev , s’escrie-t’il, dans vne solitvde escartée, qvi enseignoit des Vers , il ne dit pas, qui les recitoit ; Et les Nymphes et les Satyres, qvi les estvdioient sovs lvy , il ne dit pas, qui les escoutoient.
Dieu n’a point élevé des théatres pour rendre les hommes heureux dans le paradis terrestre, où tous les biens étoient réunis ; on n’y jouoit point de comédies, à moins qu’on ne donne pour une piece dramatique la tragique scène qui perdit l’homme, & qui fut le modelle de toutes les autres, par la séduction & ses effets.
Paul nous défend les discours frivoles, les paroles de bouffonnerie ; mais c’est ce qui fait la matiere des divertissemens dramatiques ; & ce qui est le plus intolérable, c’est que si un Acteur prononce quelque parole impie ou licencieuse, c’est alors qu’on rit aux éclats, & qu’on est le plus satisfait.
Huet appelloit Montaniana, c’est-à-dire, un recueil des dits & gestes de Montagne, est une mine féconde où les dramatiques vont prendre des scènes, & où les beaux esprits vont puiser des sophismes, des sarcasmes, des traits d’histoire, des passages d’auteurs, dont ils se parent dans les conversations. […] Défauts si communs à tous les poëtes, sur-tout dramatiques, & à tous les suppôts de la Scène.
Les Ouvrages dramatiques des Grecs en ont fourni la prémière idée. […] Nous voulons, sans doute, que nos Ouvrages dramatiques soient plus célèbres que nos Théâtres, au lieu que les Salles de Spectacles des Etrangers méritent souvent plus d’attention que leurs Drames.
Il interrogera les Histrions & les Auteurs dramatiques, Tragædi & Histriones audiendi in calamitate propriâ eloquentes .
Le genre Dramatique prit chez eux une nouvelle forme ; ils le tirèrent par dégrés de l’avilissement où il paraissait devoir rester toujours, & le portèrent enfin au comble de la perfection.
Il s’agit d’Isaac Laffémas, avocat au Parlement de Paris, auteur dramatique, protégé de Richelieu.
le rapport du procès, trop précipité pour être approfondi, se sentira de la légèreté du style dramatique.
Mais quelque soit la raison qu’on ait eue de l’insérer dans les Poèmes Dramatiques, je trouve qu’il y fait presque toujours un mauvais éffet.
Cet historien, de la race des Incas, anciens Empereurs du Pérou, ajoute que dans le palais de ses ancêtres on donnait ce divertissement à leur Cour, on y représentait des pièces dramatiques dans le goût du pays, apparemment fort différent du nôtre, comme dans tout le reste, en ceci surtout ; que tout s’y passait avec beaucoup de décence et de modestie ; que les lois de la pudeur y étaient inviolablement observées.
Je suis pourtant persuadé que les innombrables pièces que les Jésuites ont données dans leurs collèges ; l’idée et le goût du théâtre, qu’ils ont partout inspiré, sans doute sans le vouloir, aux enfants, à leurs familles, au public ; cette espèce de décision pratique de gens très respectables, qui lève insensiblement tous les scrupules ; la connaissance des Auteurs, la lecture des livres dramatiques, qu’ils ont facilitée et accréditée ; ces danses, ces décorations, ces habits, ce jeu, qu’ils ont pompeusement mis sous les yeux ; que tout cela est une des causes imperceptibles de leur suppression.
C’est cette même Didon qu’a fait, après bien d’autres, paraître sur le théâtre un Auteur célèbre, que diverses charges de magistrature, et des poésies sacrées ne permettent pas de soupçonner capable de mettre de l’indécence dans ses poésies dramatiques.
Mais une pièce dramatique régulière, partagée en scènes et en actes, formant un dessein, un nœud, un dénouement, accompagnée de chant, de danses, de machines, où l’on ne parle qu’en chantant, où l’on ne marche qu’en dansant, un spectacle où tout est réuni pour flatter le cœur, l’esprit, les yeux, les oreilles, que l’histoire de l’Opéra appelle « le spectacle universel, le triomphe de l’esprit humain, le grand œuvre par excellence », et qui en effet bien mieux que celui des Chimistes, fait couler des fleuves d’or dans la main des Acteurs, et une pluie d’or dans le sein des Danaé qui habitent ce pays des Fées ; on ne le connaissait qu’en Italie, il avait été ébauché en faveur de la maison de Médicis, à qui on doit en Europe la naissance des arts et du luxe.
Les noms sacrés, dont on abuse, pour justifier la composition des ouvrages Dramatiques, & les dangers des spectacles, les textes prétentendus favorables, les anecdotes fabriquées, les sophismes des autres & les miens ; tout cela n’étoit que du bruit… Guidé par la Foi, ce flambeau lumineux, devant qui toutes les lueurs du tems disparoissent, devant qui s’évanouissent toutes les rêveries sublimes & profondes de nos foibles esprits forts… Je vois sans nuages &c., que les Loix sacrées de l’Evangile, & la morale profane, le Sanctuaire & le Théatre, font des objets inalliables. […] « Tous les suffrages de l’opinion, de la bienséance &c, fussent ils réunis en faveur de l’art Dramatique, il n’a jamais obtenu l’approbation de l’Eglise, dit Mr. […] Dorat, autre maître tout récent de l’art, & grand adorateur du Théatre, nous dit, dans ses refléxions sur l’art dramatique : 1°.
Je ne doute pas que le goût aujourd’hui dominant du théatre ne contribue à cette haine & à ce mépris, & je ne comprends pas comment les Communautés Religieuses ont pu s’aveugler sur leurs intérêts, jusqu’à le favoriser, à composer, à faire représenter des pieces dans leurs maisons, à donner des règles de l’art dramatique, dont une bonne politique devoit les rendre ennemis déclarés.
Qu’est-ce qu’une fable dramatique ?
Dans les représentations dramatiques, le plus souvent, que d’aventures tragiques, que d’événements terribles, de catastrophes sanglantes, de scènes d’horreur, de désespoir, de sang, de meurtre, de suicide, qui familiarisent les hommes avec les idées de crime et de destruction, et les livrent sans défense au délire fougueux de leurs passions !