La multitude des voix, le bruit confus de tant d’instrumens, auroient empêché qu’on entendît les paroles ; & la musique n’étoit chez eux qu’un moyen de leur donner plus de force ou plus de douceur. […] Les joueurs de flutes servoient aux Acteurs à prendre, à soutenir ou à rétablir les inflexions de voix propres aux différentes passions qu’ils représentoient ; ils les aidoient dans leur déclamation, comme nos souffleurs secondent aujourd’hui leur mémoire. […] Peut-on mêler sa voix aux violons, sans perdre tout-à-fait de vûe ce qu’on vient d’entendre ? […] Ecoutez la voix du bon goût, que vous sacrifiez à votre cupidité.
LUZI, 1764 : minois séduisant, air fin, taille finie, voix délicieuse, débit aisé, jeu délicat, ensemble charmant… Encore quelques pas, belle Mignone, & vous atteignez Dangeville. […] Caillot : Sa présence inspire la joie ; son Jeu ravit ; sa voix gracieuse & sonore remue les cœurs. […] Beaupré : De la vivacité ; de la finesse ; l’air coquet ; une jolie voix, mais déja cessante. […] Messieurs, Gélin, (un jeu senti, de la chaleur, mais une voix cessante). […] Non, mon ami : comme on n’y représente que des Dieux, des Héros, des Magiciens, des Forcenés, la voix humaine par excellence y conviendrait peu.
Elles ne sont jamais non plus comptées par la voix publique, parmi les bonnes : mais le Spectateur, quand même il est instruit de leurs défauts, les leur pardonne, en faveur du plaisir qu’elles lui causent quelquefois dans la chaleur de la Représentation. […] Il songe moins aux paroles qu’il chante, qu’aux modulations de sa voix, qui ne sort de sa bouche qu’avec une contrainte qu’elle n’auroit pas, si la Nature seule, agitée par la Passion, la faisoit sortir : c’est ce qui fait que la voix d’un homme qui chante va toujours en s’abaissant, si elle n’est soutenue par un instrument, au lieu que dans une conversation animée, notre voix va toujours en s’élevant. […] Je réponds qu’elle agit sur nous par les vibrations de l’air agité suivant une certaine mesure : elle produit ses effets, par des instrumens, & elle les produit encore mieux par la voix Humaine, dont les sons nous frappent plus agréablement que tous ceux des instrumens de Musique. C’est le son de la voix que nous entendons qui nous fait impression, & non les paroles chantées dont nous perdons souvent une partie. C’est pour cela qu’il faut que la voix sorte par un bel organe ; les mêmes paroles chantées avec la même justesse, les mêmes Modulations, ne nous feront pas la même impression, si les oreilles ne sont pas frappées d’un si beau son, au lieu que nous n’exigeons pas le bel organe du Déclamateur ; la voix d’Antoine que Cicéron trouvoit si propre à émouvoir, étoit, dit Quintilien, une voix rauque, & l’Auteur d’Athalie a possédé plus que personne, le talent de la Déclamation, quoique la Nature ne lui eût pas donné une belle voix, & qu’il fût incapable de chanter un seul air avec justesse ; il ne savoit pas prendre les tons du Musicien, & en déclamant il prenoit toujours ceux de la Nature.