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152. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre premier. Origine des Spectacles. » pp. 1-14

Ils portèrent cet art à la plus grande perfection ; ils le rendirent par là encore plus dangereux qu’il ne l’était auparavant ; et depuis ce temps, ses résultats moraux ont toujours été de flatter les passions du cœur, et de faire éprouver successivement aux spectateurs l’amour et la haine, la compassion et la cruauté. […] Comme tous les vers se faisaient alors sans étude et sans science, la noblesse ne dédaigna pas d’en faire ; tel qui, par le partage de sa famille, n’avait que la moitié ou le quart d’un vieux château, allait quelque temps courir le monde en rimant, et revenait acquérir le château. […] Lorsque les grands seigneurs ne furent plus que des courtisans, que le plaisir et l’ambition fixèrent à Paris, on vit cette capitale surchargée d’une multitude de citoyens désœuvrés, dont on crut devoir occuper le loisir, selon le goût du temps, par des représentations pieuses qui furent l’enfance et le bégaiement de nos tragédies, de nos opéras et de nos comédies. […] Les basochiens et les enfants sans souci eurent la préférence : ils avaient pour auteurs les meilleurs poètes du temps. […] Les enfants sans souci s’étaient aperçus que ce n’était pas en jouant des moralités, ou en ne représentant que les mystères de la religion, qu’ils amusaient le peuple ; ils y joignirent des farces assorties au goût corrompu du temps : ce qui attira contre eux un arrêt du parlement qui les supprima en 1584.

153. (1697) Lettre à Mme la Marquise de B. « A MADAME LA MARQUISE DE B… » pp. 302-316

Remarquez, s’il vous plaît, Madame, que je ne vous parle que de votre temps. […] sous un Héros qui remet les beaux Arts Dans un éclat plus grand que du Temps des Césars ; Sous un Roi si puissant, si glorieux, si juste, Dont la superbe Cour ternit celle d’Auguste ; Sous un Roi qui sans cesse occupe mes cent Voix, Et qui n’a point d’égaux, quoi qu’il soit tant de Rois ; Est-il quelque Talent qui doive être inutile ? […] L’Histoire, où tant de fois pour remplir mes projets J’ai trouvé de grands Noms, et pris d’heureux Sujets, Comme Andromaque, Oédipe, Iphigenie, Horace, Où chaque Passion parle avec tant de grâce : L’Histoire, où des Héros les Exploits éclatants Savent se garantir des Insultes du Temps, Si souvent dépouillée en faveur de la Scène N’offre plus à mes yeux d’Action qui surprenne. […] Depuis combien de temps la fidèle Thalie Dans un Habit lugubre est-elle ensevelie, Le front ceint de Cyprès, les yeux baignés de pleurs, Sans qu’un autre Molière appaise ses douleurs ?

154. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XX. Spectacles condamnés par les saints Pères et par les saints conciles. » pp. 168-178

Saint Augustin, qui écrivait son Traité de la pénitence près d’un siècle après la conversion des empereurs, et dans un temps où les spectacles étaient purgés de tout levain d’idolâtrie, n’a pas laissé de les interdire aux chrétiens ; il ordonne d’abord aux pénitents de s’abstenir des jeux et des spectacles : Cohibeat se a ludis et spectaculis hujus seculi 19. […] Saint Ephrem, qui vivait dans le sixième siècle, avertissait les fidèles de ne pas consumer un temps précieux aux jeux du théâtre, se souvenant de la menace portée dans Isaïe : « Malheur à vous qui faites la débauche, et qui dansez au son des instruments ! […] Si nous voulions remonter jusqu’au temps des apôtres, nous trouverions l’un des canons qu’ils firent à Antioche ; c’est le martyr saint Pamphile qui l’a rapporté, et nous l’avons dans la bibliothèque d’Origène : il défend les jeux de théâtre, ainsi que les excès contre la tempérance31. Mais revenons sur nos pas pour chercher dans les fastes de l’Eglise, en un temps où elle commençait à prendre le dessus sur les idolâtres, les empereurs ayant embrassé la foi chrétienne.

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