que l’avarice des pères produit la mauvaise conduite des enfants ; enfin dans toutes, cette vérité si utile, que les ridicules de la société y sont une source de désordres. Et quelle manière plus efficace d’attaquer nos ridicules, que de nous montrer qu’ils rendent les autres méchants à nos dépens ? En vain diriez-vous que dans la Comédie nous sommes plus frappés du ridicule qu’elle joue, que des vices dont ce ridicule est la source. […] Molière, selon vous, a eu dessein dans cette Comédie de rendre la vertu ridicule. […] Quoique le Misanthrope divertisse les spectateurs, il n’est pas pour cela ridicule à leurs yeux : il n’est personne au contraire qui ne l’estime, qui ne soit porté même à l’aimer et à le plaindre.
Dans cette idée, il donna au public les raisons qu’il avoit de condamner la comédie, & de vouloir en dégoûter les autres : mais ces raisons étoient ridicules. […] Gresset prive la scène des caractères qu’on s’attendoit d’y voir, de la peinture vive & saillante, de plusieurs ridicules de la société. […] Après tous ces ridicules, jettés sur la nation, M. de Voltaire ajoute qu’elle s’en fût sauvée ; que le théâtre se seroit relevé de son premier état d’infamie, sans les déclamations éternelles des Calvinistes & des Jansénistes. […] Les poëtes comiques, selon lui, s’attachent uniquement à tourner la bonté & la simplicité en ridicule, à rendre les vieillards la dupe & le jouet des jeunes gens. […] Il est ridicule de croire « que les valets, en s’exerçant à voler adroitement sur le théâtre, s’instruisent à voler dans les maisons & dans les rues ».
Au sujet du Festin de Pierre, il fut imprimé une Critique faite par un Ecclésiastique, où l’on se récrie beaucoup sur ce que, dans cette Piéce, les intérêts du Ciel sont remis entre les mains d’un Valet, & sur ce que Dom Juan est puni par une ridicule fusée. […] Mais on peut ajouter que, dans cette Piéce, il se trouve une correction bien plus essentielle ; car si la femme de George Dandin est visiblement coquette, elle est aussi visiblement ridicule ; & c’étoit bien là l’intention de Moliere, qui, sur l’infidélité conjugale, portoit plus loin que personne le chagrin & la jalousie, que, dans l’autre siecle, on voyoit si fort à la mode. […] Quand un vice ou un ridicule n’existent plus, on s’apperçoit moins de la nécessité de l’Ouvrage qui les a détruits. […] On sçait bien que le ridicule tombe sur un homme qui emploie, & qui outre les expressions de la Religion, pour un intérêt charnel, ainsi que dans le Tartuffe ; mais ces peintures, quoique naïves, sont trop sujettes à être mal interprétées. […] Après avoir parlé avec toute la délicatesse que la circonstance exigeoit, il reconnoît Moliere pour le fléau du ridicule, il loue M. de la Chaussée de la pureté de ses Piéces, & convient que, par le bien qu’il en a entendu dire, ses Piéces semblent concourir au but que la Chaire se propose, de rendre les hommes meilleurs.