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73. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre IV.  » pp. 97-128

Tout ce que la Réligion a de plus auguste étoit défiguré dans presque tout l’Occident, par les coutumes les plus ridicules. […] Nous avons vu ci-dessus jusqu’à quel excès de ridicule, il porta l’amour du théatre : ses mœurs s’en ressentoient. […] Le ridicule y étoit par tout mêlé, il s’habilloit en cavalier, quoiqu’Evêque ; & après avoir écrit sur la théologie, & donné des réglemens à son Diocèse, il faisoit l’amour en plumet. […] Ces grands noms ne doivent pas en imposer, ce sont des grands acteurs qui jouent des piéces sur le théatre du monde, pour être à la tête des Royaumes, ils n’en sont ni moins injustes, ni moins ridicules : que seront les Poëtes & les comédiens qui mettront ces événemens sur la scéne ? […] Cette idée est du dernier ridicule : le grand N… ne l’est pas moins.

74. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre VI. Des Sçènes. » pp. 257-276

Il serait ridicule de leur faire dire au milieu d’une rue, ou dans une sale trop fréquentée, ce qu’ils pouvaient dire dans leur cabinet, ou bien ailleurs. […] Il est ridicule qu’un Acteur se dise à lui-même ce qui s’est fait, ce qu’il a vu ou ce qui doit arriver ; le Spectateur voit qu’on cherche à l’instruire, & que c’est à lui seul qu’on parle : une pareille mal-adresse le révolte & lui rappelle qu’il est au Spectacle. […] Jamais un pareil ridicule ne sera reproché aux Français ; ils ont des goûts, des caprices singuliers ; mais ces légers déffauts ne tirent point à conséquence, ils veulent, autant qu’il est possible, que l’agréable & le beau se rencontrent dans leurs plaisirs de fantaisie. […] Buchanan, Heinsius, si amateurs des règles, ont souvent négligé la liaison des Scènes dans les singulieres Tragédies latines qu’ils ont composées, qu’on trouvera assez ridicules de nos jours33.

75. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE VI. Où l’on examine si le Bal public proposé par M. Rousseau ne serait pas plus préjudiciable aux mœurs de Genève, que le spectacle qu’il proscrit. » pp. 211-224

« Voir un grave Sénat faire en rond une danse, Et sauter dans la salle ainsi tout en cadence, Cela serait bien beau, Monsieur. » Je n’outre point ici le ridicule, prenez-y garde. […] Je ne sais Monsieur, si ce Bal modeste s’établira à Genève, suivant votre avis : mais je sais bien qu’il ne sera jamais à couvert de l’ennui, ni du ridicule. […] Ils ont toujours vu, jusqu’à présent, dans un ivrogne un homme dégoûtant et ridicule, à qui l’on doit craindre de donner sa confiance. […] Ce ne serait point dans la Comédie nos Marquis qu’on vous proposerait d’imiter, puisqu’on les joue, qu’on les tourne en ridicule, que leur fatuité est toujours punie, et qu’on les bastonne même quelquefois : si ce sont là des appâts pour engager les gens à se faire Marquis à Genève, il faut que les têtes y soient bien autrement tournées qu’ailleurs ; mais si l’on y pense comme partout où l’on a du bon sens, on se gardera bien de s’emmarquiser à pareil prix.

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