Cambise fils de Cirus, élevé mollement, & pensant bien différemment de son père qui vivoit le plus durement ; Cambise étoit plongé dans les délices, & noyé dans les odeurs ; il envoya une ambassade au Roi des Éthiopiens avec des riches présens, & entr’autre des vases précieux remplis de parfums : le Roi accepta tout le reste, mais refusa les vases ; ils ne sont bons , dit-il, qu’à des femmes, & ne sont propres qu’à rendre efféminés & ma Cour & moi-même .
La doctrine générale qui en résulte, c’est que la bonne éducation des filles consiste à leur donner une entiere liberté, les laisser courir seules, sur leur bonne foi, le bal, la comédie, les compagnies, & voir qui bon leur semble, comme la Léonor, dont cette conduite indulgente a fait une héroïne, tandis que la vigilance & la retraite ont fait de sa sœur Isabelle une intrigante & une effrontée ; que le soin & l’attention à éloigner les jeunes gens des dangers du crime, ne servent qu’à leur en donner plus d’envie, & leur faire chercher les moyens de se satisfaire, & que la sévérité même qu’on a pour eux, les autorise à secouer le joug, & leur est une excuse légitime ; que ces sévères instituteurs en sont toûjours la duppe, & se couvrent de ridicule ; que malgré toutes leurs mesures, l’amour, inépuisable en ressources, rend inventifs les plus innocens, & trouve enfin mille moyens pour réussir ; qu’après tout c’est un vain scrupule de se refuser à la galanterie, mal commun, dont personne n’est exempt ; qu’il est de la sagesse de ne pas être plus sage que les autres ; qu’on ne peut compter ni sur les femmes, ni sur les filles ; qu’il faut s’y attendre, s’en faire un jeu, & n’avoir pas l’inutile foiblesse de s’en embarrasser.
Pourquoi donc refuser à Gherardi, & à cent autres l’honneur de la reformation ?