« Qu’on mette, dit-il, pour voir, sur la scène Française, un homme droit et vertueux, mais simple et grossier… qu’on y mette un sage sans préjugés qui, ayant reçu un affront d’un spadassin, refuse de s’aller faire égorger par l’offenseur ; et qu’on emploie tout l’art du théâtre pour rendre ces personnages intéressants, comme Le Cid, au peuple Français, j’aurai tort si l’on réussit. […] Rousseau ne peut se refuser : voici ce que je viens de lire. […] Du reste, que l’on se rappelle la position de ce personnage : il accable son ami de reproches, humilie Oronte, apostrophe les Marquis, et leur impose silence, confond et refuse Célimène, domine d’un bout de la pièce à l’autre, efface tout, n’est jamais effacé, et sort du théâtre ennemi de la nature entière, autant admiré qu’applaudi. […] Ce n’est pas assez d’être aimé : les désirs partagés ne donnent pas seuls le droit de les satisfaire ; il faut de plus le consentement de la volonté, le cœur accorde en vain ce que la volonté refuse.
Mais doivent-ils se refuser aux raisons les plus évidentes, & peuvent-ils ne pas ressentir quelque douleur, en prévoyant que les Spectacles seront difficilement détruits, par l’attachement que les Peuples ont fait voir de tous tems pour cette sorte d’amusement ; & qu’ainsi un grand nombre d’hommes Chrétiens, qui y sont employés, seront toujours chargés de la haine de l’Eglise ?
Les sophismes, dit Gresset, les noms sacrés6 & vénérables dont on abuse pour justifier les spectacles, les textes prétendus favorables, les anecdotes fabriquées, tout cela n’est que du bruit, & un bruit bien foible pour ceux qui ne refusent point d’écouter les réclamations de la Religion, & qui reconnoissent que lorsqu’on est réduit à disputer avec la conscience, on a toujours tort.