Il vint en France, & changea de rôle : il fit le savant & l’artiste, & se fait recevoir dans tous les Atteliers & les Académies. Revenu chez lui, il se fait tambour dans ses armées, mousse dans les vaisseaux, & monte par dégré, est reçu lieutenant, capitaine, colonel, velt-maréchal, pilote, enseigne, capitaine de vaisseaux, amiral ; il épouse une gourgandine, & la fait couronner Impératrice ; il fait faire la barbe à tous ses peuples, les obligeant de se raser malgré eux ; comme si le Roi de France vouloit forcer tous les François à reprendre la barbe ; sur-tout il fait bâtir un Théatre, & joue la comédie au milieu de la neige & des glaces ; cependant il fait mourir son fils ainsi : sur un échafaud, sa sœur dans un couvent, & une infinité de gens dans les tourmens, & il est toujours dans la débauche. […] Le triomphateur fut un Seigneur de la Cour, amiral de la flotte ; c’est lui qui, assis sur un trône, environné des officiers, reçut tous les honneurs.
Sa réputation se répandit de tous côtés, et l’on en vit venir de pays très éloignés pour recevoir le voile de sa main. […] Elle répondit courageusement au tyran qui voulait la séduire : J’ai un époux à qui je garde fidèlement la foi que je lui ai donnée, j’ai reçu de sa main les plus riches habits des vertus, les plus magnifiques parures de la modestie ; il a ceint ma tête d’une couronne immortelle, il m’a couverte des pierres précieuses de sa grâce, son sang adorable est le vermillon qui pare mes joues ; en l’aimant je deviens plus chaste, ses caresses me rendent plus pure, quand je m’unis à lui il embellit ma virginité. La voilà cet enfant dont le petit corps peut à peine porter les chaînes qui le lient, et recevoir le glaive qui le perce : « Fuitne in ille corpusculo vulneri locus ?
[Nous avons reçu l’Opéra des Vénitiens, parmi lesquels il fait le principal amusement du Carnaval].