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10. (1620) L’Honneur du théâtre « Prologue » pp. 39-42

Sans vanité, Messieurs, les louanges que l’histoire peut mériter sont légitimement redoublées sur nos personnes, vu que nous retirons de l’enfer ce que Pluton pensait être garroté dans ses plus profondes cavernes ; nous puisons dans les eaux ce que Neptune pensait avoir de plus caché, et nous faisons descendre de là-haut les Dieux immortels, trop heureux de paraître sur ce théâtre pour publier leurs amours, leurs batailles, et leurs trophées, qui n’emportent autre prix que votre bonne attention. Et puisque la vertu cherche le jour, et désire d’être vue ; serions-nous méprisables d’étaler notre marchandise devant ceux qui n’en sauraient tirer que tout honneur et profit, et nous la louange de les servir, et nous évertuer de rappeler l’antiquité, imitant les plus capables d’entre les Grecs et les Romains ; comme un Euripide, un Néviusd, et dix mille autres qui charmaient les oreilles des spectateurs, par la naïve représentation de leurs comédies, trop plus agréables que les grands jeux Olympiques et Romains, où les plus ignorants pouvaient mériter le prix d’une insigne victoire.

11. (1772) Réflexions sur le théâtre, vol 9 « Réflexions sur le théâtre, vol 9 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE NEUVIEME. — CHAPITRE I. Réformation de Moliere. » pp. 4-28

L’Académie vient de donner son éloge pour sujet du prix, & de couronner son enthousiaste. […] Il semble qu’aujourd’hui elle veuille lui faire réparation d’honneur, en proposant son éloge pour le sujet du prix qu’elle distribue tous les ans. […] En 1767 elle proposa pour sujet de son prix l’Eloge de Corneille. […] Dans une éloge de Corneille qui concourut pour le prix, composé par l’Abbé de Langeac on trouve ces mots, que je prie d’entendre sans tire. […] Une Académie en corps a eu le courage de faire concourir pour le prix de pareilles absurdités, un ouvrage périodique (Mercure novembre 1768) de les publier, d’en faire honneur à leur Auteur !

12. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. —  CHAPITRE V. Tribunal des Comédiens. » pp. 128-140

J’avoue même que l’illusion de la représentation y contribue ; l’impression, il est vrai, dissipe le prestige, & les représentations suivantes font bientôt évanouir le triomphe momentané de la derniere ; mais c’est toujours autant de prix, d’argent & d’encens. […] Les oracles prédisent sa réussite & sa chûte, menacent de ne pas faire valoir, & assurent que quand on ne joue pas avec confiance de cœur & d’affection, les meilleures choses perdent leur prix. […] C’est à ce prix qu’on devient un héros, & que les piéces qu’on présente sont des chefs d’œuvres. […] C’est l’habit qui pare l’homme, il est vrai, qui en impose, qui dans un monde frivole en fait tout le prix ; mais qui n’ôte, ni ne donne aucun mérite.

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