Malgré ces heureuses conjectures, j’engage monsieur de Longepierre, qui paraissait disposé à attendre la Tante de mademoiselle De Liane, & à charger son Neveu de ses affaires ; je l’engage, dis-je, à s’en rapporter à mon mari, & à ne pas laisser repartir seul monsieur D’Alzan. […] Qu’il est doux, ô mon Ursule, d’avoir dans son mari, un chef éclairé, vigilant ; un protecteur sage, tendre ; d’y voir un père, un ami, & sur-tout un amant !
Quoique sa femme, ses domestiques, toute sa maison, en fussent infectés, le Duc brava tous les risques, il a visita assidument, & la gagna si bien, que méprisant toutes les loix de la bienséance, elle l’épousa peu de temps après la mort de son mari. […] Cependant la femme de campagne craignant avec raison pour son état, engagea son prétendu mari à faire casser son premier mariage. […] La Déesse vint au milieu de la nuit, comme Proserpine fut reçue dans les ténebres à la Cour de son mari Pluton. […] La Princesse étoit mariée, sous les yeux de son mari & de son beau pere, Italiens, qui ne sont pas traitables sur la jalousie, qui n’ignoroient pas ses amours, & ne pouvoient se dissimuler les motifs d’un si bisarre voyage. C’étoit beaucoup s’exposer lui même, & exposer la Princesse à la mettre mal avec son mari.
Comme on n'y représente que des galanteries ou des aventures extraordinaires, et que les discours de ceux qui y parlent sont assez éloignés de ceux dont on use dans les affaires sérieuses; on y prend insensiblement une disposition d'esprit toute romanesque, on se remplit la tête de héros et d'héroïnes ; et les femmes principalement y voyant les adorations qu'on y rend à celles de leur sexe, dont elles voient l'image et la pratique dans les compagnies de divertissement, où de jeunes gens leur débitent ce qu'ils ont appris dans les Romans, et les traitent en Nymphes et Déesses, s'impriment tellement dans la fantaisie cette sorte de vie, que les petites affaires de leur ménage leur deviennent insupportables; et quand elles reviennent dans leurs maisons avec cet esprit évaporé et tout plein de ces folies, elles y trouvent tout désagréable, et surtout leurs maris qui, étant occupés de leurs affaires ne sont pas toujours en humeur de leur rendre ces complaisances ridicules, qu'on rend aux femmes dans les Comédies, dans les Romans et dans la vie romanesque.