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55. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — QUATRIEME PARTIE. — Tragédies à corriger. » pp. 180-233

d’où il suit que le Spectateur s’irrite plutôt qu’il ne s’afflige de son malheur. […] A l’égard de Géta qui, non moins innocent que Justine, succombe comme elle à leur commun malheur, et dont on dit communément que la mort est la catastrophe de la Pièce, je ne suis pas de cet avis ; parce que je donne au terme de Catastrophe un sens tout différent. […] Ils voulaient que les Spectateurs fussent persuadés de la fatalité forcée, qui entraînait les hommes comme les Dieux ; mais ils ne les empêchaient pas de se laisser aller ensuite à tous les mouvements de la nature, de gémir et de pleurer sur les malheurs des personnes que le Destin punissait. […] Je conviens que dans le dernier cas l’humanité l’emporte, et que l’on souhaiterait de voir finir les supplices de ces malheureux ; mais dans l’autre, la compassion n’est pas si forte, l’esprit et le cœur n’ont pas les mêmes ressorts : il est fort ordinaire de plaindre les hommes qui subissent la peine de mort ordonnée par la Justice ; mais j’ai toujours vu que l’on souhaitait aux grands scélérats des malheurs encore plus grands que ceux qu’on leur fait souffrir dans un Livre ou dans une action tragique.

56. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE V. En quoi consiste le Plaisir de la Comédie, & de ce Sel qui assaisonnoit les Comédies Grecques. » pp. 131-144

La vue des malheurs des autres nous fait faire réflexion que nous en sommes exemts, & la compassion que nous avons des Malheureux flatte notre amour propre. […] Je n’aurois pas aimé ce qui les auroit trop enfoncées ; mais ce que des malheurs en peinture avoient de piquant, ne faisant qu’effleurer la peau, soulageoit ma démangeaison, comme le soulagement qu’on trouve à se gratter.

57. (1804) De l’influence du théâtre « DE L’INFLUENCE DE LA CHAIRE, DU THEATRE ET DU BARREAU, DANS LA SOCIETE CIVILE, » pp. 1-167

A de si grands désordres, dont les malheurs du temps ont trop laissé développer le germe dangereux, il n’est évidemment qu’un seul remède, et pour l’obtenir, il faut recourir à la religion. […] As-tu donc appris ses malheurs ? […] Mais, ne nous le dissimulons pas, les obstacles que les malheurs de la révolution ont élevés, s’opposeront encore longtemps au succès de ces pieux établissements. […] En vain j’entends le poète satirique élever la voix, et s’écrier avec Boileau : « Malheur ! […] faut-il s’étonner si, appelé au secours de l’infortune et du malheur, le jurisconsulte honnête et délicat a peine encore aujourd’hui à trouver les égards dus à la dignité de ses augustes fonctions ?

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