Vous n’êtes pas le Christ ; non, mais vous êtes chrétien, et en cette qualité vous êtes obligé de vivre, d’agir et de parler comme lui ; vous êtes son serviteur, vous êtes tenu de le suivre ; vous êtes son disciple, vous devez l’imiter ; vous êtes un de ses membres, vous devez être animé de son esprit.
Que doivent faire les autres, qui ne le valent pas & se font un devoir & une gloire de l’imiter ? […] Freron même qui rougit de sa licence, & souvent l’imite dans ses feuilles, ne le traite-t-il pas de grand homme ? […] Le théatre, après avoir volé les pieces Espagnoles, a voulu imiter la Cour d’Espagne ; il fait des grands, le grand Corneille, le grand Racine, le grand Moliere, le grand Voltaire, le grand Panard, le grand Marmontel, &c. […] Tout est pantomime, les yeux, les mains, la tête, la posture, le ton de la voix, le tour de la phrase, le souris, la démarche, tout peint, tout est imité ; maîtres, amis, parens, gens graves, stupides, savans, &c. rien n’épargne, rien n’est épargné.
Quand un Comédien s’en fait honneur, ou il se borne à l’art de la représentation, c’est-à-dire, à tout ce qui convient à soi-même, ou à la scène, pour bien imiter ses personnages ; ou il entend par là, l’art du Drame, qui lui-même comprend la critique. […] Quelques modernes, en petit nombre, ont imité les anciens, mais ils les ont presque toujours surpassés dans leurs copies, & alors même on ne doit imputer leur traduction qu’à une certaine paresse dont le génie le plus actif secoue le joug difficilement.