Sur ce point seul je me flatte de ne vous point céder. […] Malgré l’étendue de la matière, je tâcherai d’être le plus court qu’il me sera possible ; il n’appartient qu’à vous d’être long et d’être lu, et je ne dois pas me flatter d’être aussi heureux en écarts. […] Ainsi elle nous flatte et nous élève tout à la fois, par l’expérience douce qu’elle nous fait faire de la tendresse de notre âme, et par le courage qu’elle nous inspire pour réprimer ce sentiment dans ses effets, en conservant le sentiment même. […] Vous prétendiez un moment auparavant, que les leçons de la Tragédie nous sont inutiles, parce qu’on n’y met sur le Théâtre que des héros, auxquels nous ne pouvons nous flatter de ressembler ; et vous blâmez à présent les pièces où l’on n’expose à nos yeux que nos citoyens et nos semblables ; ce n’est plus comme pernicieux aux bonnes mœurs, mais comme insipide et ennuyeux que vous attaquez ce genre. […] Je ne sais si je me trompe, mais il me semble que l’éloignement où nous tenons les femmes de tout ce qui peut les éclairer et leur élever l’âme, est bien capable, en mettant leur vanité à la gêne, de flatter leur amour-propre.
En effet, comment peut-on accorder ces actions séculières, qui flattent les sens, et donnent du plaisir à la chair, avec les larmes d’une âme vraiment pénitente, qui s’afflige pour rendre honneur à la Justice de Dieu, par la haine qu’elle a conçu contre le péché, et contre elle-même ?
Si le but de la comédie n’est pas de flatter ces passions, qu’on veut appeler délicates, mais dont le fond est si grossier : d’où vient que l’âge où elles sont les plus violentes, est aussi celui où l’on est touché le plus vivement de leur expression ?