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100. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE I. Préjugés légitimes contre le Théatre. » pp. 4-29

Entendez-vous la scène muette & si énergique des yeux languissamment mourans & noyés dans le plaisir, vivement animés & lançant mille feux ? […] Quel langage, lorsque d’intelligence ils se confient leurs feux, & mutuellement les allument ! […] Vous ne voyez le feu que quand la maison est embrasée ; voudrez-vous, pourrez-vous l’éteindre ? […] Malade insensé, le feu brûle vos entrailles, le Médecin vous déclare en état de mort, & vous vous applaudissez d’une parfaite santé !

101. (1789) Lettre à un père de famille. Sur les petits spectacles de Paris pp. 3-46

tous les jours sept à huit mille habitans de Paris répandus dans les salles de Janot, d’Audinot, de Nicolet, soit aux Boulevards, soit à la foire de Saint-Germain, soit à la foire de Saint-Laurent, n’ont pas de remparts plus assurés contre un élément non moins redoutable que l’eau ; par-tout les édifices de ces histrions sont de bois, du moins en grande partie, et les gens qu’amène une imprudente curiosité ont du feu sur leurs têtes, sous leurs pieds, autour d’eux, au théâtre, dans les combles, dans les coulisses, dans les souterrains. Une étincelle peut embraser en une demie heure ces légères charpentes incessamment desséchées par la chaleur de tant de lampes, de lustres et de foyers ; si le feu prenoit, les issues sont si étroites, la descente des escaliers est si roide qu’on ne pourroit s’enfuir. […] Cependant elle s’est enflammée subitement pour l’Olive, à qui elle prend le menton, à qui elle promet de l’argent s’il répond à ses feux. […] Dans la prison, tandis qu’elle est étendue sans connoissance, un hideux geolier transporté d’amour, l’œil en feu, les mains tremblantes de desir, la contemple, lui prend les bras et les mains, paroît à tous momens prêt de se porter aux derniers attentats.

102. (1822) De l’influence des théâtres « [De l’influence des théâtres] » pp. 1-30

Le Chevalier Dubois, colonel du guet, demeurait rue Mêléed et avait une porte de sortie sur le boulevard, vis-à-vis le coin de celle de Lancry, le Tivoli de cette époque, tenu par le sieur Thoré, qui n’eut de rival pour ses feux que Lavarinière, si bien remplacé aujourd’hui par les deux Ruggieri. […] Après m’être assuré qu’il n’y avait rien de mieux dans le voisinage, je m’armai d’un courage dont je ne me croyais vraiment pas capable, et je fis tomber tout le poids de ma vorace colère sur un morceau de viande qui voyait le feu pour la troisième fois, et dont il fallut se contenter, faute d’autre chose, mais non sans maudire ces pompeuses enseignes, qui promettent tout et ne tiennent rien, comme la plupart des ouvrages de nos jours, demandez plutôt à…. […] C’est dans ce dernier, que se montent les arlequinades, expulsées de chez Nicolet, et sans feu ni lieu, depuis l’incendie de Lazari57, bergamiste célèbre, aussi léger dans ses métamorphoses, qu’improvisateur comique et spirituel dans ses canevas, genre de pièces non écrites, dont il fit longtemps la vogue. […] » me répondit-il. « Cette légende modeste convenait autrefois ; Michot, Damas, Varenne, Julie et les deux Tabraise étaient le noyau de cette troupe, que le père du Tonnelier 65, sous la protection d’un prince66, gouvernait avec un talent que, pour les progrès de l’art, Thalie devait éterniser comme le feu sacré de Vesta !

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