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5. (1586) Quatre livres ou apparitions et visions des spectres, anges, et démons [extraits] « [Extrait 2 : Livre VI, chap. 7] » p. 590

Car sa raison est que Dieu ne veut pas que ceux qui sont dedans les Enfers retournent comptere ce qui se fait en ces lieux, afin d’obvier au malheur qui en pourrait sourdre : Les damnés qui retourneraient au monde, souffleraient ès entrailles des hommes la fureur et la rage des tourments qu’ils endurent : Ainsi les Poètes Tragiques feignent que l’Ame de Thyeste sortant des Enfers, brouille et renverse tout l’état de sa famille, met en trouble sa maison, acharnef Egiste à vengeance, incite à fureur Clytemnestre, lui souffle le venin de jalousie en l’Ame, et la fait meurtrière de son mari : et l’acte commis, pousse Oreste à venger sur Egiste et sa mère la mort de son père, et les tuer tous deux, afin qu’après leur mort, il fût tourmenté de l’horrible regard des Erinyes et Furies qui lui représentent devant les yeux l’énormité et gravité du délit perpétré. […] Elles ne brouillent pas nos maisons et familles, ains composent et redressent ce qui pourrait y être de déréglé et mal ordonné.

6. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre IX. Suite de la Rosiere. » pp. 213-230

Tous les ans au mois de mai se tiennent les grands jours : les peres & les meres de familles, s’assemblent devant le Juge qui reçoit leur suffrage ; celui qui pendant l’année s’est attiré quelque reproche est exclus du droit de le donner. […] Le Curé lui fait une exhortation & lui donne sa bénédiction, après quoi le Seigneur la conduit chez ses parens où elle invite sa famille & ses amies. […] De retour chez elle, l’Héroïne donna à soupé à ses compagnes & à sa famille. […] La fête finit par un soupé que les garçons donnerent à la famille, le tout s’y passa dans la plus grande decence, les garçons avoient pris un engagement entr’eux de ne se rien permettre dans cette fête qui pût blesser la modestie, & de se distinguer toute leur vie par la plus exacte régularité des mœurs. […] C., putas, inveniet fidem , quels Citoyens, quels Peres de famille, quels Magistrats préparent à l’Etat cette irreligion succée avec le lait.

7. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre V. De la Dépense des Spectacles. » pp. 75-88

Il en est comme du jeu, les petites sommes qu’on y expose causent à la fin la ruine des familles ; à l’Opéra, par exemple, où les places coûtent douze livres, chaque représentation va communément à vingt mille livres, à deux représentations par semaine, voilà plus de deux millions par an. […] Pour récompenser le livre et les travaux du Commissaire Lamarre, le Roi, par une ordonnance du 5 février 1716, ordonna pour lui l’augmentation d’un neuvième par place, que l’on mit sur le compte de l’Hôtel-Dieu, à la charge de s’arranger avec la famille de Lamarre pour une somme convenable, et que le surplus appartiendrait aux pauvres. […] Pour payer une Actrice, on laisse manquer du nécessaire à sa femme, à ses enfants, à ses domestiques : le créancier n’est pas payé, l’ouvrier satisfait, la famille élevée, le pauvre soulagé, mais que dis-je, les pauvres ? […] Oui, je la blâme, parce qu’elle est inutile, pernicieuse pour les mœurs, ruineuse pour les familles. […] Deux Danseuses et deux Chanteuses causent plus de trouble et de scandale, font faire plus de banqueroutes à un Marchand, de dettes à un Seigneur, de vols aux enfants de famille, que les trois cents courtisanes.

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