Ce blason est plus facile à entendre & à exécuter, il est plus du goût des acteurs & des spectateurs. […] En marchant, sur-tout en dansant, on entend à chaque pas un petit carrillon très-harmonieux, comme un tambour de Basque, qui enchante l’oreille des amans. […] Les Romains, ombrageux sur leur autorité, s’imaginerent qu’il vouloit par là préparer le peuple à lui accorder les honneurs royaux, & faire entendre qu’il étoit supérieur aux Rois, en faisant servir le diademe de jarretiere.
Un étranger, un sourd, qui n’entendroit pas les discours, mais verroit ce qui s’y passe, y trouveroit les mêmes écueils, où son innocence feroit naufrage. […] Dans une éloge de Corneille qui concourut pour le prix, composé par l’Abbé de Langeac on trouve ces mots, que je prie d’entendre sans tire. […] Voici du délire : Ecoute, toi qui te prépares à courrir la carriere de Corneille, si la simplicité des mœurs, la force d’être insensible aux ridicules que t’attirera le mépris ou l’ignorance des petites choses, l’austérité de la vertu, l’impatience de toute domination, le dédain de l’or, l’opiniâtreté au travail, sont des affections inséparables de ton jeune cœur, si un pouvoir impérieux te tient enfermé seul avec la gloire & la vertu, si un respect soudain s’empare de tous tes sens, & les prosterne devant ses effigies sacrées, releve-toi, adore Corneille, quand le feu de ton génie s’emparera de ton ame, quand dans le délire de l’extase tes sens seront fermés à tout autre sentiment qu’à celui de l’admiration, quand tous les objets anéantis autour de toi, tu ne verras plus, tu n’entendras plus, ne respirant qu’à peine, les yeux fixés au ciel, & cherchant le temple de mémoire, le nom de Corneille au dessus de celui des Homeres & des Sophocles, écrie toi, j’ai du génie ; Corneille, adopte moi pour ton fils, c’est moi qui suis ta postérité, digne rejetton d’une si noble tige, je laisserai mon nom comme le tien, la gloire de mes descendans, & l’honneur de ma patrie au-dessus des Monarques les plus vantés, &c.
Mais indépendamment de ces raisons générales de sagesse, ceux-mêmesj qui voudraient le plus accorder à tout le monde la lecture des Ecritures, doivent convenir qu’elle n’est pas faite pour le théâtre ; que c’est la défigurer, l’avilir, la déshonorer ; que bien loin d’en faire la nourriture de l’âme fidèle, on en fait l’amusement de la frivolité, souvent du vice et de l’impiété ; qu’au lieu de servir à la sanctification des fêtes, elle en devient la profanation ; que les Pères, en conseillant cette lecture aux âmes bien disposées, n’ont jamais entendu qu’on dût la livrer au parterre, la couper en actes, la cisailler en scènes, la travestir en comédies, la faire jouer par des hommes et des femmes sans mœurs, avec des habits, des gestes, des discours pleins de mollesse et de dissolution. […] L’homme du monde n’en entend qu’avec dégoût la lecture ; celui dont le théâtre vient d’éteindre la piété, la soûtiendra-t-il ? […] La plupart des gens qui n’ont aucune connaissance de l’Ecriture, sur la foi de l’Acteur et du Poète, en croient tout ce qu’ils voient et entendent au théâtre.