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40. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome II « La criticomanie. » pp. 1-104

Et puis, qui ne voit que la différence des fortunes, après que le frein a été rompu et le pas franchi, a dû produire les mêmes effets que la différence des rangs, et que la fille d’un riche négociant, par exemple, qui épouse un petit commis sans fortune, peut se croire aussi bien fondée que la pauvre de Sotenville à mépriser son mari et à fouler aux pieds les engagements qu’elle a pris avec lui, lorsqu’il vient à lui plaire moins qu’un amant ? […] L’effet de cette comédie ne se borne pas à engager les femmes à se moquer de la morale pour punir leurs vieux maris et autres ; elle encourage également les maris à punir de la même manière leurs vieilles épouses ; ce qu’ils ont fait et font, comme chacun sait, avec les gradations et toute l’extension dont je viens de montrer que la leçon fut susceptible. […] Rousseau, pour prouver que Molière n’a pas voulu en faire un homme vertueux, l’effet de cette comédie a dû être pour les trois quarts et demi des spectateurs le même que si cet auteur célèbre avait eu réellement l’intention de se moquer d’un homme vertueux. Le public ne fait pas de syllogismes, ni ces raisonnements profonds ; on ne doit pas être obligé de les faire pour détermine l’effet d’une comédie. […] encore bien éloigné peut-être, et que nous ne pouvons pas espérer de voir, où la cause pourra être plaidée et jugée au tribunal d’un public désintéressé et impartial, que le comble du mal aura forcé enfin à rétrograder de ce côté là, en regardant et jugeant alors les causes et les effets de la révolution morale aussi sainement que nous-mêmes, lorsque nous fûmes accablés de malheurs et forcés aussi d’un autre côté à retourner sur nos pas, avons régardé et jugé les causes et les effets de la révolution politique d’où nous sortons.

41. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE I. Du sombre pathétique. » pp. 4-32

Il n'est pas possible qu'un homme d'esprit, comme l'est certainement l'Auteur, n'ait fait ici qu'une sottise ; la plaie est bien plus profonde, il y a dans cette pièce plus d'irréligion que de ridicule ; et si elle s'établit jamais sur le théâtre public, comme elle a été déjà jouée sur des théâtres particuliers, elle produira les plus mauvais effets. […] La tragédie est imparfaite, si elle ne produit cet effet : partout du sang, des morts, des forfaits. […] Se cache sous l'effet d'un saint zèle : l'hypocrisie se cache sous les dehors du zèle, le véritable effetdu zèle exclut l'hypocrisie. […] Que ma bouche, ô mon Dieu, par un suprême effort : l'impérieux effet d'un miracle suprême. Je ne connais ni les efforts, ni les miracles suprêmes ; les bonnes œuvres sont-elles des effets impérieux d'un miracle ?

42. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre XIV. De l’usage de composer des Pièces, ou des Rôles pour un ou plusieurs Acteurs. » pp. 219-233

L’imagination qui s’exerce sur un sujet qui lui plaît, & qui est forcée de l’abandonner, par l’attention qu’elle prête au peu d’effet que les idées qu’il lui présente, produiront dans la bouche d’un tel Acteur, s’ouvre une autre route malgré elle, & dans ce changement qui lui repugne, son feu se rallentit ; elle ne ressent que le travail d’un enfantement involontaire. […] Ainsi un Auteur Dramatique est dans une nécessité absolue d’avoir toujours le Comédien sous les yeux pour juger par son jeu des effets de chaque partie de son ouvrage. […] L’amour propre aveuglé par ce choix dans celui-ci, le gonfle d’orgueil, & l’Auteur est le premier à en ressentir les effets.

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