Ces principes ne sçauroient être contestés par personne ; mais ceux qui se montrent contraires à la liberté du théâtre, prétendent que, dans ce cas, leur application est dangereuse. […] Il seroit dangereux de souffrir un plus grand nombre de théâtres. […] La multiplicité des petits spectacles est dangereuse pour le peuple ; elle corrompt ses mœurs, et favorise la paresse. […] La multiplicité des spectacles ne sauroit donc être dangereuse. […] Ce bruit a cependant très-rarement des suites dangereuses.
On l’accusait d’avoir du goût pour les combats et la chasse des bêtes féroces, et il les fit tuer toutes à même temps : « Omnes feras uno momento jussit interfici. » On disait qu’il aimait les jeux du cirque et du théâtre, il n’y parut plus, il ne les permit plus, même les jours solennels de sa naissance et de son couronnement, où ils étaient d’usage : « Ne solemnibus quidem natalibus, vel imperialis honoris gratia putabat celebrandos. » Tant il savait être son maître, et dans l’âge le plus tendre égaler la force et la sagesse des vieillards : « Adolescentem videres senilem ferre sententiam. » Il y avait à Rome une Courtisane d’une beauté parfaite, qui corrompait la jeune noblesse, d’autant plus dangereuse que c’était une Comédienne (car dans toutes les affaires de galanterie il se trouve toujours quelque héroïne de théâtre) : « Scenicæ cujusdam forma et decore Romæ adolescentes nobiles deperire. » Valentinien ordonne qu’on la fasse venir à la Cour. […] Jésus-Christ est notre objet et notre terme, le seul digne de nous ; méprisons tout le reste, pour ne nous occuper que de lui : « Ad Christum oculos dirige, averte à spectaculis et omni sæculari pompa. » Cherchez des plaisirs plus purs et de plus beaux spectacles : le ciel et la terre vous en offriront ; l’éclat de ces astres, qui perce les sombres ténèbres de la nuit ; cette vaste mer et ses abîmes, cette terre et l’émail de ses campagnes, les innombrables troupeaux qui la couvrent ; la variété du plumage, la douceur du ramage de ses oiseaux ; tout l’univers, théâtre de la puissance divine, ne vaut-il pas les fragiles et dangereuses décorations d’une scène criminelle, qui loin de vous satisfaire, ne peut que troubler le repos de votre vie par les justes remords qu’elle fait naître ? […] « Qui non respexit in vanitates et insanias falsas. » Mais quels sont surtout ces folies, ces faux biens, ces vains plaisirs, si réellement dangereux ? […] Ambroise semble avoir voulu analyser et décomposer le théâtre pour le foudroyer en détail, et le renverser, en détachant toutes les pierres de ses fondements, Arrêtons-nous à la danse, l’un des plus ordinaires, des plus recherchés, des plus dangereux ornements de la scène.
Tous ces grands divertissemens (dit M. le Duc de la Rochefoucauld, qui avoit beaucoup fréquenté le Théatre) sont dangereux. […] Rien n’est plus dangereux que toutes nos représentations théatrales, elles mettent du faux dans l’esprit, elles échauffent l’imagination, affoiblissent la pudeur, mettent le désordre dans le cœur ; & pour peu qu’on ait de la disposition à la tendresse, on en hâte & on précipite le penchant ; on augmente le charme, & l’illusion de l’amour est d’autant plus dangereux, qu’il est plus adouci & plus modeste. […] Ce spectacle si dangereux, qu’il renferme tous les périls, une musique molle, des danses lascives, des expressions passionnées ; enfin tout ce que l’imagination frappée d’une illusion la plus agréable, peut joindre à l’ivresse des sens, lui paroissent des écueils où la modestie & la pudeur sont forcées d’échouer4. […] Aussi que de jeunes sujets en qui l’on avoit admiré les germes des talens les plus intéressans pour la patrie, ne sont devenus que des citoyens inutiles & dangereux, immolés à l’oisiveté & au libertinage ; que pour avoir été respirer imprudemment aux théatres cet air de frivolité & de corruption qui pervertit le jugement, & fait perdre le goût de toute espece d’application, C’est l’aveu que faisoit le Prince de Conty, en écrivant contre les spectacles. […] Le premier essai l’ébranla tellement qu’il congédia sur-le-champ ces suppôts d’Apollon : & par ce prélude il jugea des funestes impressions que cause le dangereux Théatre de l’Opéra.