Je ne sais pas même au vrai s'ils récitaient, s'ils chantaient, ou s'ils dansaient, ni si ces choses entraient séparément ou conjointement en tout ou en partie en leurs représentations. […] La Comédie fut considérée comme une peinture naïve et plaisante de la vie commune, et la Tragédie, comme un portrait magnifique et sensible de la fortune des Grands ; et ces deux sortes de Poèmes se récitaient plus ou moins sérieusement, selon la qualité des personnages que l'on y représentait ; mais sans danser ni chanter, sinon en quelques endroits où le chant de quelques vers pouvait faire quelque partie agréable et comme nécessaire de la représentation. Nous avons un exemple dans l'Andromaque d'Euripide, où nous lisons des Vers Elégiaques que je pense avoir été chantés. […] Le Chœur seul y chantait et dansait, pour marquer ordinairement les intervalles des Actes, ou pour donner quelque grâce extraordinaire au Poème ; mais toujours avec la bienséance convenable à ces belles représentations.
Dès qu’il y a eu des hommes, il y a eu sans doute des chants & des danses ; on a chanté & dansé depuis la création jusqu’à nous ; & il est vraisemblable que les hommes chanteront & danseront jusqu’à la destruction totale de l’espèce. […] Toutes les veilles des Fêtes de Vierges, les Jeunes-filles s’assemblent devant les portes des Eglises qui lui sont consacrées, & passent la nuit à danser en rond & à chanter des Cantiques à son honneur. […] A la Fête des Junonies, on conduisait deux Vaches blanches, suivies de deux imâges de Junon-reine ; ensuite marchaient vingt-sept Jeunes-filles, vêtues de robes traînantes, qui chantaient une Hymne en l’honneur de la Déesse. […] Ainsi toute Hymne était faite pour être chantée & dansée. On fesait la même chose dans les Daphnéphories ; les Jeunes-filles dansaient & chantaient des Hymnes, que par cette raison on nommait Parthénies (du Grec Parthenos, fille).
N’allez pas dès l’abord, sur pégase monté, Crier… d’une voix de tonnerre ; Je chante le vainqueur des vainqueurs de la terre. […] « Déesse, chantez la colère d’Achille, fils de Pélée ; cette colère pernicieuse qui causa tant de malheurs aux Grecs. » Virgile n’est aussi nullement pompeux à l’ouverture de l’Enéïde. « J’ai autrefois fait retenir les forêts du son de mes chalumeaux… je chante maintenant les terribles combats, & ce chef des Troyens, qui, forcé par le destin de s’éxiler de sa patrie, vint aborder aux rivages de Lavinium. » M. de Voltaire, le Poète épique des Français, n’est pas moins simple au commencement de la Henriade : Je chante ce Hèros qui règna dans la France, Et par droit de conquête & par droit de naissance.