Thomas d’Aquin, sur la représentation d’une farce de quelques misérables histrions, sentit combien leur art pouvoit être utile, & décida qu’il y avoit de l’injustice à le condamner sans restriction : S. […] M. de Voltaire dit qu’un jour nos neveux, en voyant l’impertinent ouvrage de cet oratorien contre l’art des Sophocles & les œuvres de nos grands hommes imprimés en même-temps, s’écrieront : « Est-il possible que les François aient pu ainsi se contredire, & que la plus absurde barbarie ait levé si orgueilleusement la tête contre les plus belles productions de l’esprit humain ? […] Riccoboni a traité son art plus mal encore que La Mothe n’a traité celui des vers. […] C’est ainsi que cet auteur, qui posséde si bien son art, mais que son art n’aveugle point, sçait réunir les intérêts de l’homme de lettres, du philosophe & du chrétien. […] Le Flamen ne se doutoit pas que l’art de Térence fut celui de Locuste.
» Oui, sans doute, la source en est en nous, mais l’art du théâtre la purifie. […] Voilà, selon moi, tout l’art de Molière, et je ne conçois rien de plus utile aux mœurs. […] « Les femmes en général n’aiment aucun art, ne se connaissent à aucun. […] Rousseau n’emploie, et qu’il ne manie avec beaucoup d’art, pour attaquer les mœurs du théâtre. […] » Et à votre avis, Monsieur, qu’est-ce que l’art du Peintre, du Musicien, et surtout du Poète ?
Le préjugé barbare contre la profession de Comédien, l’espèce d’avilissement où nous avons mis ces hommes si nécessaires au progrès et au soutien des arts, est certainement une des principales causes qui contribuent au dérèglement que nous leur reprochons ; ils cherchent à se dédommager par les plaisirs, de l’estime que leur état ne peut obtenir. […] Pour être utile il faut être agréable, et ma plume a perdu cet art-là. […] [NDE] Jean le Rond d’Alembert, « Genève », in L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, Paris, A.