Par Mr. le chevalier de Mouhy, ancien officier de cavalerie, pensionnaire du roi, de l’académie des sciences et belles-lettres de Dijon. […] Ces dangers reconnus par un homme du monde, par un ancien militaire qu’on n’accusera certainement pas de vains scrupules, ou d’une morale exclusivement rigoureuse ; sont encore des problèmes pour des gens qui se croient dévots, qui à certains égards peuvent l’être, et qui fréquentent le théâtre avec la même sécurité que les églises. […] Quel humiliant sujet de comparaison avec ces anciens peuples auxquels nous nous croyons si supérieurs ! […] Voyez dans un ouvrage intitulé : Réflexions sur les théâtres, Populence et la considération des comédiens 1777, les gains énormes des anciens baladins. […] Pour un exemple récent qui a éclaté (celui du jeune d’Argent) il y en a dix mille anciens ; et dix mille modernes qui n’éclatent pas.

Aussi n’avons-nous qu’une même Troupe pour nous donner également tous ces spectacles, à la différence des Anciens qui avaient leurs Tragédiens et leurs Comédiens distingués. […] Quant à la Tragicomédie c’était, selon les Anciens, une Pièce dont le sujet était comique, et où l’on introduisait néanmoins des personnes illustres, qui rendaient par leurs bouffonneries leur grandeur ridicule ; nous en avons un exemple dans l’Amphitrion de Plaute. […] Décembre 1548. qui interdit cet ancien usage donna naissance à celui-ci. […] Une Troupe y vint jouer l’Hôtel de Cluny en la rue des Mathurins, qui est cet ancien Palais de Julien l’Apostat ; ils y firent dresser un théâtre de leur autorité, et ils y jouerent quelques Pièces. […] L’Opéra au Faubourg saint-Germain, la Troupe du célèbre Molière dans l’une des Salles du Palais Royal ; et l’Hôtel de Bourgogne, où les Comédiens du Marais et les Italiens représentaient leurs Pièces alternativement en differents jours de la semaine, cette place leur ayant été cédée par l’ancienne Troupe.

Ce sont des restes des anciens spectacles. Le théâtre subsiste en entier : il est à bien des égards porté à un degré de perfection bien supérieur aux anciens théâtres, et malgré un vernis de politesse et de décence qu'on y a répandu, il ne mérite pas moins les anathèmes de l'Evangile, et l'horreur des gens de bien, que celui des premiers siècles. […] De là l'ancienne division de jeux sacrés et funèbres pour les Dieux ou les mânes. […] (On tâche d'éluder l'autorité des Pères, en particulier de Tertullien, en disant qu'ils s'élevaient contre l'idolâtrie qui régnait alors sur le théâtre ; on verra dans tout le reste de cet ouvrage qu'il le condamne par d'autres raisons qui ne regardent pas moins la scène moderne que l'ancienne.) […] lui qui défendait dans l'ancienne loi de peindre les créatures, permettrait-il de défigurer l'homme qui est son image ?