Alceste blâme toutes les démonstrations extérieures d’amitié qui ne sont pas sinceres : il veut qu’on soit sincere & qu’en homme d’honneur on ne lâche aucun mot quine parte du cœur.
Le Théatre demanderoit donc des cœurs toujours neufs : il seroit à souhaiter que nous fussions peuple à cet égard, & que nous eussions l’attention de nous maintenir dans une sorte d’ignorance.
C’est par un tel usage qu’on peut empêcher les Spectateurs de trop se distraire dans l’intervalle des Actes : « n’entendant jamais sortir de l’Orchestre que l’èxpression des sentimens qu’ils éprouvent, ils s’identifient, pour ainsi dire, avec ce qu’ils entendent, & leur état est d’autant plus délicieux qu’il règne un accord plus parfait entre ce qui frappe leurs sens & ce qui touche leur cœur. »18 Nous verrons ailleurs ce qu’on peut encore observer sur l’Orchestre des Théâtres dont les Poèmes sont récités.
dit qu’il n’y a rien de si contraire aux bonnes mœurs que ces jeux, qui insinuent le vice dans le cœur des assistants.
Si monseigneur l’archevêque de Rouen avait eu pour le roi cette déférence qui doit germer et se développer dans le cœur de tout bon Français, et s’il eût pris l’avis du Gouvernement avec lequel il aurait dû se concerter sur le mandement qu’il a fulminé, certes, cet acte qui a réveillé tant de passions, tant de craintes et d’alarmes aurait subi de sages modifications ; la société n’en aurait pas été ébranlée aujourd’hui, car le gouvernement, qui connaît à fond le génie, l’esprit et le moral des Français, aurait, il n’en faut pas douter, fourni à ce prélat les moyens d’arriver à son but, sans heurter l’esprit du siècle et causer de nouveaux troubles.
M. de Bagnols avertit la Mère Angélique de son erreur, et l’assura que ce Père était un fort bon Religieux, et même dans le cœur assez ami de la vérité.
La premiere piece de cet auteur fit dans leur cœur une plaie profonde qui saigne encore, manet altâ mente repostum ; la nouvelle piece l’a rouverte. […] Langage muet que le goût du plaisir a réduit en art, & que la Sallé avoit portée à une si grande perfection, qu’elle peignoit tous les transports, tous les rafinemens, toutes les nuances de la volupté ; de l’abondance du cœur la bouche parle, les yeux, les mains, les pieds, l’attitude ne parlent pas moins. […] Les langues ont de même des déclamations, des mots rudes, des mots coulans, qui n’annoncent pas moins les mouvemens du cœur. […] J’appelle, dit-il, les représentations des récitations, parce que les acteurs ne se sont pas donné la peine d’apprendre leurs rôles par cœur, & qu’ils y ont eu une négligence caractérisée qui naissoit encore plus de leur mauvaise volonté que de leur paresse habituelle.
La distinction subtile que le Cagot fait du pardon du cœur avec celui de la conduite, est aussi une autre marque naturelle de ces gens-là, et un avant-goût de sa Théologie, qu’il expliquera ci-après en bonne occasion. […] Car celui-ci se sentant attendrir, se ravise tout d’un coup, et se disant à soi-même, croyant faire une chose fort héroïque : « Ferme, ferme, mon cœur, point de faiblesse humaine ». […] L’Officier déclare donc que « le Prince ayant pénétré dans le cœur du fourbe par une lumière toute particulière aux Souverains par-dessus les autres hommes, et s’étant informé de toutes choses sur sa délation, avait découvert l’imposture, et reconnu que cet homme était le même, dont sous un autre nom il avait déjà ouï parler, et savait une longue histoire toute tissue des plus étranges friponneries et des plus noires aventures dont il ait jamais été parlé : que nous vivons sous un règne, où rien ne peut échapper à la lumière du Prince, où la calomnie est confondue par sa seule présence, et où l’hypocrisie est autant en horreur dans son esprit, qu’elle est accréditée parmi ses sujets ; que cela étant, il a d’autorité absolue annulé tous les actes favorables à l’Imposteur, et fera rendre tout ce dont il était saisi ; et qu’enfin c’est ainsi qu’il reconnaît les services que le bonhomme a rendus autrefois à l’État dans les armées, pour montrer que rien n’est perdu près de lui, et que son équité, lorsque moins on y pense, des bonnes actions donne la récompense ». […] Cela étant, et puisque les Philosophes les plus sensuels n’ont jamais douté que la Raison ne nous fût donnée par la Nature, pour nous conduire en toutes choses par ses lumières ; puisqu’elle doit être partout aussi présente à notre âme, que l’œil à notre corps, et qu’il n’y a point d’acceptions de personnes, de temps ni de lieux auprès d’elle : qui peut douter qu’il n’en soit de même pour la Religion, que cette lumière divine, infinie comme elle est par essence, ne doivent faire briller partout sa clarté : et qu’ainsi que Dieu remplit tout de lui-même, sans aucune distinction, et ne dédaigne pas d’être aussi présent dans les lieux du monde les plus infâmes, que dans les plus augustes et les plus sacrés ; aussi les vérités saintes, qu’il lui a plu de manifester aux hommes, ne puissent être publiées dans tous les temps et dans tous les lieux où il se trouve des oreilles pour les entendre, et des cœurs pour recevoir la grâce qui fait les chérir ?
Celles-ci laissent le cœur dans une espèce d’inertie ; celles-là, au contraire, lui représentent sa grandeur & nourrissent sa fierté.
Ah, si l’usage d’élever des statues aux généreux mortels qui s’immolent pour le bien Public, & qui se distinguent par eur talens, n’était malheureusement aboli, tu recevrais bientôt cet honneur suprême ; mais sois sûr pour le moins d’en avoir une dans tous les cœurs.
L’illustre Chancelier d’Aguesseau pensoit bien différamment, dans son discours sur l’imitation par rapport à la tragédie ; il parle fort au long contre les spectacles, il dit entr’autres ces belles paroles, les caractères, les sentiments, les pensées, les expressions des personnages mis sur la scéne, tout conspire à reveiller, à réflecter les inclinations que nous avons pour la gloire, les richesses, l’amour, la veangeance, qui sont les mobiles du cœur humain ; les passions feintes que nous y voyons nous plaisent, par la même raison que les réelles, parce qu’elles en mettent de réelles dans notre ame, ou parce qu’elles nous rappellent celles que nous avons éprouvées : Rapiebant me spectacula plena miseriarum mearum. […] S’il ne s’accoutume à penser, à sentir noblement chez lui & chez ses amis, si dans les moindres procédés il n’est observateur scrupuleux des bienséances, qui sont l’ame de la société, & le lien de toutes les vertus ; s’il ne vuide son cœur de mille petites passions indignes de l’honête-homme, elles l’arracheront sans cesse à son tâlent, à son emploi, & en feront un comédien corrompu : où sont ces acteurs admirables ?
Le goût dominant est la volupté, le plus sur moyen de plaire, est d’irriter les mouvemens de la sensualité ; par conséquens de fortifier, d’embellir, de conserver la couleur, la fraîcheur, la délicatesse du teint, c’est à-dire, la carnation naturelle, ce sont les Lys & les Roses, & non les paillettes d’or, qui vont au cœur ; l’or au contraire, au lieu de se fondre & de s’incorporer avec les couleurs naturelles, douces & tendres, tranche, tenir, donne un air rude, un ton livide, annonce la magnificence, mais n’allume point la passion, on le répandra sur les habits, par vanité, jamais sur le coloris par volupté. […] On y reçoit des lettres, on y lit des Romans, on y donne de rendez-vous ; les adorateurs qui l’assiegent, auxquels on étale negligemment les charmes, y offrent leurs cœurs, & les brûlent à ces charmantes flammes ; on y reçoit des faveurs, on y prend des libertés, auxquelles l’état où l’on se montre invite, & qu’il facilite, en faisant semblant de refuser ; on loue, on admire, on éleve jusqu’aux cieux la beauté, les graces, les talens, les succès Dramatiques de la nouvelle Thalie, on avale à longs traits, on est ennyvré de la fumée de tant d’encens ; c’est un Ministre qui donne audience, c’est un Roi sur son Trône, qui reçoit des hommages, c’est une Déesse élevée sur l’Autel, à qui l’on rend un culte religieux, à quoi pense donc l’indiscret Daillion, d’abréger des momens délicieux, qu’on ne sauroit faire trop durer.
Tels sont les hypocrites, ils ne peuvent trop veiller sur eux-mêmes, pour ne pas se laisser démasquer ; le moindre évenement, un coup d’œil, un mot, un geste, découvre sans qu’on y pense, le fond du cœur. […] Vous avez beau plâtrer & recrépir votre visage, vous êtes très-laide & très-infirme, & sur-tout votre cœur corrompu ne renferme que la pourriture du vice.
Au contraire Anacreon, ce Poëte galant, ce grand maître du vice, demandoit qu’on lui jettât abondamment des parfums sur l’estomac, parce que de là l’odeur iroit plus directement au cœur, & y parviendroit plus vite pour échauffer sa passion : Advola, & unguentis mihi pectus irriga, ut cor citius obtineat. […] Le danger d’allumer dans les cœurs le feu de l’amour, a fait croire à quelques Casuistes qu’on ne devoit pas absolument s’en servir, même comme des remedes ; & quelques Philosophes ont porté la sévérité jusqu’à les exclure absolument.
Imaginez-vous l’impression que doivent faire sur de jeunes sens leur coëffure printanniere, leurs cheveux parsemés de fleurs et de brillans, leur sein découvert, leur dos nud le médaillon de leur amant, placé sur le cœur. […] Tout en haussant les épaules de pitié, on s’est empressé d’aller s’y corrompre le cœur.
Tout fut terminé par ces paroles tranchantes et décisives : « Je suis chez moi, tout est à moi ; fille de l’opéra, je suis ma maîtresse, je ne dépends de personne. » Se peut-il, conclut l’Auteur, que d’honnêtes gens soient assez aveugles pour placer si mal leur argent et leur cœur, et consacrer leurs plus beaux jours à des filles de théâtre nées dans le libertinage ? […] Sur quoi Godefroy fait cette réflexion : « Quoique éloignée du théâtre, ses vices font voir qu’elle est toujours Comédienne de cœur ; car Comédienne et prostituée, dit cet Auteur, sont deux choses très voisines et très liées » : « Proxime confines cohærent meretrix et scenica. » On ne tient aucun compte des promesses de chasteté qu’on ne tient que par force, « quæ votum castitatis infregit, minuit, elusit ».
L’amour seul règne sur leurs cœurs.
La sainteté de la Religion que nous professons, ne demande pas seulement l'application de notre cœur à l'adoration du vrai Dieu seul, tout puissant et infiniment jaloux de sa gloire, et la soumission de notre esprit à la croyance de ses mystères incompréhensibles ; mais elle exige encore de notre devoir une pureté de vie qui ne soit corrompue ni par le dérèglement des actions, ni par la licence des paroles.
La dame qui le voit de son balcon, et qui sait qu’il le fait à son intention, lui en sait bon gré dans son cœur, et ne manque pas de lui en tenir bon compte. […] Arnoux de Saint-Jean-Baptiste, carme déchaussé, indigne secrétaire de Jésus. » « Je, Madeleine Gasselin, indigne servante de Jésus, prends mon aimable Jésus pour mon époux, et lui promets fidélité, et que je n’en aurai jamais d’autre que lui, et lui donne pour gage de ma fidélité mon cœur, et tout ce que je ferai jamais ; m’obligeant à la vie et à la mort de faire tout ce qu’il désirera de moi, et de le servir de tout mon cœur pendant toute l’éternité. […] Jesus, l’amour des cœurs.
Si l’Actrice l’a fait pour obtenir quelque grace ; la beauté a un pouvoir reconnu dans le secret, mais un étalage impudent de ses charmes, choque la vue au lieu de toucher le cœur.
Toute la jeunesse l’apprend par cœur, & l’emploie à tout moment, lorsqu’il s’agit de faire quelque mariage à la Moliere.
Hoc igitur dico & testificor in Domino, ut jam non ambuletis, sicut & gentes ambulant in vanitate sensûs sui : Je vous dis avec l’Apôtre, & je vous conjure, mes Frères, par le Seigneur, de laisser toutes ces folies, & de ne plus vivre comme les gentils qui suivent dans leur conduite la vanité de leurs pensées : enchantés des vaines apparences du Monde, ils ne cherchent qu’à remplir le vuide de leur cœur par des objets qui les amusent & les divertissent.
Par action enfin : vous n’ignorez pas que les ivrognes ne se piquent pas de pudeur et, suivant vous-même, ceux qui ont le cœur corrompu font, dans l’ivresse, toutes les mauvaises actions qu’ils se seraient interdites à jeun.
., les tartufes de justice, d’indulgence ou de pitié, de patience ou de modération, de modestie, de grandeur d’âme, d’amour filial ; et vous n’aurez aucun doute non plus qu’une satire en comédie dirigée contre une hypocrite de tendresse maternelle, comme il y en a effectivement, sur qui, par le jeu d’un Brunet ou d’un Potier, qui représenterait la marâtre, on livrerait à la risée publique le ton, les soins empressés, les caresses, les émotions ou les tendres élans du cœur d’une mère, ne portât une atteinte funeste à la plus précieuse des vertus, et ne détruisit en peu de temps l’ouvrage du génie supérieur qui a défendu si éloquemment la cause de l’enfance et mis à la mode, en les faisant chérir, les premiers devoirs de la maternité. […] C’est en parcourant trop librement cet intervalle que tant de mauvais exemples impunis et impunissables par la loi en montrent les voies détournées à la jeunesse, lui apprennent à se jouer de la morale et des principes, ôtent peu à peu à la justice et à l’humanité leur empire sur les cœurs.