On fit ce changement au Triomphe de l’Amour. […] Leur sagesse, leur gravité, leur amour de la décence, ne s’accommodoient pas de ces agitations frivoles, si contraires à cet esprit, à cette majesté de gouvernement qui caractérisoit ce peuple célèbre. […] Tous les siecles se ressemblent dans l’amour du plaisir. […] Mesdames Alard & Ascelin inspirent tous les plaisirs qui sont attachés sur les leurs, & qui succèdent agréablement à ceux d’un autre genre qu’ont fait éprouver Madame Rosalie dans le rôle de l’Amour, & M. l’Arrivé dans celui d’Anacréon.
Dans un endroit où il s’agit de passer rapidement de la colere à l’amour, on fait sur la premiere une tirade, dont l’éclat & la chute étourdissent.
Tout est égal : ces yeux si beaux & si doux, ce regard modeste & touchant, ce son de voix enchanteur, cette taille dont la proportion est si parfaite, cette gorge provocante, ces beaux bras, cette jolie main, ce pied abrégé de toutes les grâces & qu’a dessiné l’Amour.
Son généreux dévouement, pour ramener et consolider le bonheur public, devient un exemple efficace qui gagne tous les cœurs, et rallume partout le feu sacré de l’amour de la Patrie.
Car le Concile d’Agde rapporté par Gratien, ordonne à tous ceux qui sont engagés dans cette profession sainte, de n’aller point aux festins des Noces, et de n’assister à ces assemblées, où l’on chante des chansons d’amour, et où l’on danse ; de peur que les yeux, et les oreilles, que la divine vocation applique aux saints ministères, ne soient souillées par la vue des mouvements qui peuvent laisser des impressions d’impureté, ou par des paroles indiscrètes, et lascives.
Ils représentent Vénus impudique, Mars adultère, et leur Jupiter, non moins prince de vices, que du royaume, qui brûle d’amour des humains, avec ses foudres : maintenant blanc comme un cygne, maintenant descendant du ciel en forme de pluie d’or : maintenant par le ministère des oiseaux se lançant pour s’amouracher de jeunes enfants et les ravir.
Pour les théâtres, la fureur n’y est pas moindre, mais l’infamie y est plus grande ; Où un Comédien représente les adultères, où il les récite, et un bouffon lascif qui fait l’amoureux, nous enseigne à faire l’amour.
Fait en présence de mon père éternel, de mon amour, de ma très digne mère Marie, de mon père saint Joseph, et de toute ma cour : l’an de grâce 1650.
Plus elle est charmante, plus elle est dangereuse ; plus elle semble honnête, plus je la tiens criminelle. » Il cite l’exemple de Chimène dans le Cid, alors si admiré et si honnête : « Elle exprime mieux son amour que sa piété, son inclination est plus éloquente que sa raison, elle excuse plus le parricide qu’elle ne le condamne ; sous ce désir de vengeance qu’elle découvre, on remarque une autre passion qui la retient, elle paraît incomparablement plus amoureuse qu’irritée ; prête à épouser le meurtrier de son père, l’amour qui triomphe de la nature, va la rendre coupable du crime de son amant. Les filles avoueront que l’amour de Chimène fait bien plus d’impression sur elles que sa piété, qu’elles sont plus touchées de la perte qu’elle fait de son amant, que de celle qu’elle fait de son père, et qu’elles sont plus disposées à imiter son injustice qu’à la condamner. » Il regarde comme impossible, depuis le péché originel l’entière pureté du théâtre, ainsi que des Poètes, parce « que les mauvais exemples plaisent plus que les bons, qu’on a plus d’inclination pour le vice que pour la vertu, qu’on exprime beaucoup mieux les passions violentes que les modérées, les criminelles que les innocentes, et que les Poètes, contre leur intention même, favorisent le péché qu’ils veulent détruire, et lui prêtent des armes contre la vertu, qu’ils veulent défendre, etc. » Sans toutes ces antithèses, ordinaires à cet éloquent et pieux Ecrivain, et qui n’affaiblissent pas la vérité qu’il enseigne, le P. le Moine, Jésuite, dans son Monarque, le P.
Elle y trouvera toujours des éxemples de fureur, d’héroisme & d’amour. […] Elle fait reparaître sans crainte, l’ambition, la cruauté, l’amour & l’héroïsme ; on lui permet encore de nous montrer plusieurs fois les sujets de ses Drames retravaillés de nouveau.
Le prince d’amour ou le lieutenant du prince d’amour ; dont l’élection a eu lieu le jour de la Pentecôte ; il est en corset et culottes à la romaine de moire blanche et argent, tout unie ; le manteau uni glacé d’argent, chapeau à plumets, et de figure avantageuse ; il est précédé à la procession par des tambours, et des violons qui jouent l’air du prince d’amour ; il a son guidon, son capitaine des gardes, ses bâtonniers, et autres grands officiers, qui l’accompagnent à la procession, ils ont tous dans ce travestissement assisté à la messe à la métropole ; l’abbé de la ville, le lieutenant du prince d’amour, et tous les fonctionnaires de leur suite, ont de gros bouquets à la main, avec lesquels ils saluent les dames et toutes les personnes de leur connaissance. » Après un autre intervalle on voit arriver : « 39. […] On étendait à cette heure, devant la porte du maître de la confrérie de l’Assomption, une grande tapisserie sur laquelle on appliquait des lettres en or, qui rendaient et formaient quelques vers exprimant les qualités distinctives de ce maître, et de son amour pour Marie. […] Fait en présence de mon père éternel, de mon amour, de ma très digne mère Marie, de mon père S. […] Jesus, l’amour des cœurs.
Ces farces sont journalieres sur tous les Théatres : l’amour insensé des Spectacles empêche d’ouvrir les yeux.
C. par de nouvelles protestations de consécration & d’amour.
Ainsi tout le dessein d’un poète, toute la fin de son travail, c’est qu’on soit comme son Héros épris des belles personnes, qu’on les serve comme des divinités ; en un mot qu’on leur sacrifie tout, si ce n’est peut-être la gloire, dont l’amour est plus dangereux que celui de la beauté même.
Veut-on consacrer le Théâtre aux matières profanes, aux événements les plus horribles, aux parricides, aux empoisonnements, aux passions outrées, aux amours incestueuses.
qui a mieux connu la corruption du cœur de l'homme qu'aucun Père de l'Eglise, déplore dans ses Confessions l'amour qu'il avait avant sa conversion pour les Comédies, et le plaisir qu'il sentait à y être ému de douleur.
Elle augmente leur beauté, elle en est la fleur, elle sert d’excuse à la laideur, elle est le charme des yeux, l’attrait des cœurs, la caution des vertus, l’union & la paix des familles, la sureté des mœurs, le charme du plaisir, sans elle l’amour seroit sans gloire, c’est sur elle que se prennent les plus flateuses conquêtes, elle met le prix aux faveurs, elle est si nécessaire au plaisir qu’il en faudroit conserver dans le temps même destiné à la perdre ; c’est une coquetterie rafinée, une espece d’enchere que les belles mettent à leurs appas, une maniere d’augmenter les charmes en les cachant. […] L’amour fertile en invention l’est aussi en systeme de doctrine, qu’il accommode à ses vues, & tire habilement parti de ses dogmes. […] La scene, la poësie, les romans rappellent sans cesse ce langage muer, & lisent dans les cœurs par les couleurs, les regards, les parures, les gestes, qui président à la toilette ; l’empire des passions, l’amour est le vrai baigneur, la vaie femme de chambre. […] c’est la mere des amours ; peut-on manquer d’être admiré ?
S’ils veulent peindre le sublime amour de la liberté, c’est dans les républiques anciennes, chez les Grecs et chez les Romains qu’ils doivent puiser leur sujet ; et s’ils veulent exposer toutes les injustices et les atrocités d’un gouvernement despotique, ils ne peuvent guère offrir au spectateur que des Musulmans. […] M. de Cailhava, dans son dernier écrit, qui a pour titre : Les causes de la décadence du théâtre, et les moyens de le faire refleurir, a parfaitement démontré que cette décadence n’étoit occasionnée que par le défaut de rivalité et de concurrence ; mais plus littérateur que publiciste, il a moins considéré le grand intérêt de la conservation des principes qui tiennent à notre liberté, que son amour pour l’art dramatique qu’il a cultivé avec succès. […] Ne vaudroit-il pas mieux qu’on jouât sur ces théâtres, pour un prix modique, les pieces de nos bons auteurs, que de débiter au peuple ces pieces infâmes qui lui inspirent le goût du vice, au lieu de l’amour des vertus. […] un roi, maître suprême, En qui vous révérez la Divinité même : Des grands, que son pouvoir a seul rendu puissans ; Du bras qui les soutient, apuis reconnoissans : Un peuple doux, sensible….. une famille immense, A qui le seul amour dicte l’obéissance ; Qui laisse tous ses droits à son pere asservis, Sûre qu’il veut toujours le bonheur de ses fils.
Il en reste des médailles, comme des Empereurs Romains, où il est représenté avec les attributs de la divinité : quels cantiques n’ont pas chanté en son honneur, les savants & les savantes, jusqu’à Madame d’Acier, dont le tendre amour pour Homere, a rempli tant de volumes, & soutenu une si rude guerre. […] Des sonnets pour la belle Laure, il a décrit ses amours, il devoit donc être couronné de Mirthe à Cithere, & non pas de laurier à Rome. […] Un tendre amour suffit, & vaut un Apollon.
Ces armes sont bien différentes de l’arcenal de Cithère, du carquois, & des traits de l’amour qui blessent les cœurs. […] Un regard, une pensée sur un objet défendu, sont des péchés ; un regard, un cheveu peut faire naître à quelqu’un, de mauvaises pensées pour séduire son cœur, & le blesser par l’amour. […] La chevelure de Bérénice est une brillante constellation, leur couleur, leur frisure, leur longueur, leur naissance, leurs boucles, leurs tresses remplissent le carquois du Dieu d’amour ; on en fait des colliers, des bracelets, des chiffres ; c’est une grande faveur d’en obtenir quelqu’un.
La doctrine générale qui en résulte, c’est que la bonne éducation des filles consiste à leur donner une entiere liberté, les laisser courir seules, sur leur bonne foi, le bal, la comédie, les compagnies, & voir qui bon leur semble, comme la Léonor, dont cette conduite indulgente a fait une héroïne, tandis que la vigilance & la retraite ont fait de sa sœur Isabelle une intrigante & une effrontée ; que le soin & l’attention à éloigner les jeunes gens des dangers du crime, ne servent qu’à leur en donner plus d’envie, & leur faire chercher les moyens de se satisfaire, & que la sévérité même qu’on a pour eux, les autorise à secouer le joug, & leur est une excuse légitime ; que ces sévères instituteurs en sont toûjours la duppe, & se couvrent de ridicule ; que malgré toutes leurs mesures, l’amour, inépuisable en ressources, rend inventifs les plus innocens, & trouve enfin mille moyens pour réussir ; qu’après tout c’est un vain scrupule de se refuser à la galanterie, mal commun, dont personne n’est exempt ; qu’il est de la sagesse de ne pas être plus sage que les autres ; qu’on ne peut compter ni sur les femmes, ni sur les filles ; qu’il faut s’y attendre, s’en faire un jeu, & n’avoir pas l’inutile foiblesse de s’en embarrasser. […] Dominique, que sur les amours de Moliere avec des Comédiennes ? […] Si j’ai accepté des époux, ce n’est que de la main de mon père, toûjours soûmise a votre loi, pénétrée de votre crainte, jamais pour suivre mon inclination & mon amour (elles n’ont point d’autre guide).
Corneille a mêlé des amours profanes dans Polyeucte et dans Théodore, Boyer dans Judith. […] Mais l’Abbé auteur donne prudemment à son drame un passeport sans lequel il n’eût pas été reçu ; c’est une intrigue amoureuse, de son invention, d’un Prince Ammonite avec la fille de Jephté : « Je n’ai point, dit-il, osé bannir tout à fait l’amour profane d’un théâtre qui n’est fait que pour lui. » Il tâche d’excuser les danses sacerdotales et pastorales qu’il y mêle ; il assure qu’une grande Princesse versa des larmes à la seule lecture qu’il lui en fit (il fallait qu’elle eût le cœur bien tendre). […] Mais il faut que la galanterie profane tout ; au milieu des plus grandes vertus d’un martyr illustre, on trouve les scandaleuses amours de Pauline, sa femme, avec Sévère, à qui à travers toutes les façons de la pruderie, ou, si l’on veut, de la vertu, elle fait pourtant l’aveu de sa tendresse, quoiqu’elle se fasse un devoir de la combattre.
L’Amour Tyrannique de Scudéry fut composé par ordre du Cardinal, pour faire tomber le Cid, ou du moins en partager la gloire. […] Il l’eût volontiers déféré à la Sorbonne, si la matière eût été de sa compétence ; mais il eût été trop ridicule d’occuper de graves Théologiens des amours de Chimène, et de lancer des anathèmes théologiques sur une pièce de théâtre. […] Leur vie est une comédie perpétuelle, ils passent tous les jours, sans en apercevoir le contraste, de l’Eglise au bal, du sermon à la comédie, d’un service pour les morts à l’opéra, d’une messe pour les calamités publiques aux farces de la foire ; hommes d’état et petits-maîtres, les affaires et le jeu, le tribunal et la toilette, le bâton de commandement et une Actrice, partout jouant leur rôle, licencieux et dévots, riant et pleurant, invoquant Dieu et l’amour, Vénus et les Saints.
car les Mimes exposent un adultère, ou le montrent aux yeux ; et ces Histrions efféminés inspirent l'amour qu'ils représentent, et se revêtant de l'image de vos Dieux, ils font honneur au crime qu'ils leur imputent ; et vous font pleurer par des mouvements de tête, et les gestes qu'ils emploient pour exprimer une douleur imaginaire. » Où nous ne voyons pas une parole qui concerne le Poème Dramatique.