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97. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VI. Des Ariettes, & des autres parties du Chant théâtral à une seule voix. » pp. 297-328

Le Poète qui place un Récitatif à la tête d’une ariette enjouée, s’y trouve forcé par deux raisons. […] Des raisons encore plus fortes prouvent qu’il faut bannir la Ritournelle des Ariettes du nouveau genre. […] Des raisons bien plus fortes l’engagent encore à suivre avec soin la Prosodie, ou la manière de prononcer les mots. […] La raison de cette règle, c’est que souvent on n’entend pas bien les paroles modulées, & que par conséquent il est essentiel d’en donner une idée, ainsi que des passions qu’elles dépeignent. Une autre raison encore, c’est que dans un Ouvrage bien fait, rien ne doit être présenté qui ne soit lié avec ce qui précède, tant les faits que les pensées.

98. (1758) Lettre à Monsieur Rousseau sur l'effet moral des théâtres « Lettre à Monsieur Rousseau sur l'effet moral des théâtres, ou sur les moyens de purger les passions, employés par les Poètes dramatiques. » pp. 3-30

Entre mille exemples que je pourrais alléguer de cette vérité, j’en choisirai un très peu intéressant par lui-même, mais qui, par cette seule raison, sera moins sujet à discussion, et je le tire du Misanthrope que vous avez si ingénieusement décomposé. […] Du reste, quoique vous approuviez le rôle de Thyeste ; les massacres des gladiateurs ne vous paraissent pas si barbares que le spectacle d’Atrée ; et vous en attestez l’effroi de vos lecteurs7 ; et moi, j’en appelle à leur raison. […] Je vous citerai encore Alzire, à laquelle vous ne refuserez pas du moins l’avantage de présenter un beau contraste des mœurs des chrétiens, et des mœurs d’un peuple nouveau ; et d’avoir fait triompher glorieusement le christianisme, sans le secours de la foi, par la raison seule et par le sentiment, qui est encore plus sûr qu’elle. […] Mais quand il serait vrai que la raison seule pût tenir lieu de vertu, la tragédie dont je parle n’enseigne-t-elle pas aux Rois, que leur intérêt personnel, celui de leur gloire et de leurs plaisirs ne peut jamais se séparer de l’intérêt général des peuples soumis à leur empire ? […] [NDA] C’est à ceux de mes lecteurs qui vont aux spectacles, à juger si l’Abbé Dubos a eu raison ou tort de dire que le Poète ne les afflige qu’autant qu’ils le veulent, et que leurs émotions ne vont point jusqu’à la douleur.

99. (1761) Les spectacles [Querelles littéraires, II, 4] « Les spectacles. » pp. 394-420

Tant de raisons persuadent au P.  […] Dans cette idée, il donna au public les raisons qu’il avoit de condamner la comédie, & de vouloir en dégoûter les autres : mais ces raisons étoient ridicules. […] En 1756, un avocat, ou soit disant tel, a écrit contr’eux ; & quelles raisons a-t-il de les condamner ? […] Rousseau, le conseil le plus dangereux qu’on pût donner, du moins tel est mon sentiment, & mes raisons sont dans cet écrit. » Quoique ces raisons semblent ne devoir convenir qu’à la constitution de Genève, elles sont pourtant exposées très-souvent d’une manière générale. […] « Ils sont assez avancés, ou, si l’on aime mieux, assez pervertis, pour pouvoir entendre Brutus & Rome sauvée, sans avoir à craindre d’en devenir pires. » Lequel croire de M. d’Alembert ou d’un citoyen qui veut sauver sa patrie de la corruption ; qui ne lui présage qu’abomination & que malheurs, si l’on ne l’écoute ; qui eût pu s’appuyer de la raison que donne Cornelius Nepos pour marquer la différence des mœurs des Grecs & des Romains : C’est que les comédiens étoient estimés des premiers, & qu’ils étoient déshonorés chez les autres.

100. (1603) La première atteinte contre ceux qui accusent les comédies « LA PREMIÈRE ATTEINTE CONTRE CEUX QUI ACCUSENT LES COMÉDIES » pp. 1-24

Tout gouvernement leur déplaît, la police les offense, se persuadant qu’il y a des temps où Dieu tient de sa main le gouvernail de ce grand vaisseau du monde, que parfois il le laisse, comme à présent ; et qu’il s’en va périr s’ils n’en sont les pilotes, ayant la charge de commander aux intelligences motrices des sphères célestes, de suivre le mouvement, la cadence, et le pas de leurs fantaisies, qui renverserait l’univers s’ils pouvaient trouver le point ferme, et les machines d’Archimède : ainsi leurs desseins menacent le ciel, leurs désirs volent sur les nues, et leurs raisons se cachent en la poudre. […] Le seul respect qu’ils portent à l’Antiquité, qui les a condamnés, les retiendrait en ce devoir ; s’ils n’avaient la raison, l’exemple, les commandements de la primitive Eglise, les autorités des SS. […] Les histoires ne nous apprennent point qu’aucun Ministre ait condamné ni aboli les danses honteuses et déshonnêtes qui se commettaient, tant aux jours des Calendes, qu’autres Fêtes, où aux Théâtres, et en divers lieux par plusieurs nations, on commettait des vices que notre pensée rejette pour leur horreur, tant de se baigner dans le vin sans regard à l’âge, au sexe, ni au lieu, que faire festins tables par les rues, chansons dissolues : Bref la raison qui est donnée aux hommes leur ôtait l’usage d’elle-même, pour les rendre pires que bêtes farouches : Et nos Pères Ecclésiastiques ne les ont pas seulement censurés, mais prêché, crié, invectivé contre eux, essayé de les réduire. […] Cela ne nous empêchera de vaincre par raison ceux qui nous surmontent d’injures ; nous n’en voulons combattre : l’Eglise nous apprend à prier et bénir, non pas à exécrer et maudire. […] C’est vous, dis-je, Assemblée glorieuse, qui pouvez polir la rouille que l’ignorance ou la malice a fait naître en leur cerveau ; tout ainsi qu’en la ville de Tarse en Cilicie, il n’y a que l’eau de la rivière de Cidne qui puisse éclaircir, dérouiller, repolir le couteau sacré à Apollon, toutes les autres le lavent sans effet ; Faites de même de celle que vous puisez en Hélicon, comme vous en arrosez les esprits qui en sont dignes : Vous pouvez adoucir ceux qui nous piquent par la pointe d’une langue aussi tranchante qu’un rafoir affilé : L’office de la raison vous invite à leur montrer sa vérité : mais peut-être en sont-ils dégoutés : Les ânes n’aiment pas les violettes, leur pastures sont de chardons : nous leur laisserons porter la Déesse Isis sans leur donner aucun lieu en votre Théâtre, puisque vous avez enlevé sur tous une gloire qui ne laisse à aucun espérance de vous égaler : leur envie ne saurait apporter de tache à la splendeur de votre mérite.

101. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « REMARQUES. SUR LE LIVRE DE J.J. ROUSSEAU, CONTRE LES SPECTACLES. » pp. 21-65

« Le hasard, mille causes fortuites, mille circonstances imprévues, font ce que la force et la raison ne sauraient faire. […] « Dans ce siècle, où règnent si fièrement les préjugés et l’erreur sous le nom de Philosophie, les hommes abrutis par leur vain savoir, ont fermé leur esprit à la voix de la raison, et leur cœur à celle de la nature. […] Le hasard est un être de raison, un mot vide, inventé par l’ignorance : ce que nous nommons hasard, ce que nous croyons fortuit, est un résultat dont nous ignorons le calcul, de même que l’axiome que nous croyons le plus certain. […] Raison originale ! […] Comment la raison était-elle avant que de naître ?

102. (1756) Lettres sur les spectacles vol.1 pp. -610

Un autre a avancé que raison assaisonnée pourroit être la devise de cet Ouvrage. […] Vous réprouvez donc avec raison ces passions qui portent un caractere si nuisible à la société. […] Il n’y a que la raison qui ne soit bonne à rien sur la Scene. […] c’est qu’il a une raison d’utilité que les autres n’avoient pas. […] Ici toute autre raison manque, hors celle qui se tire de la nature de la chose.

103. (1726) Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat « Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat » pp. 176-194

Il y a longtemps que j’ai observé que nos anciennes pièces de théâtre qui ont le plus réussi il y a 80 ans mériteraient d’être perfectionnées quelque temps après la mort des Auteurs, du moins par rapport aux mœurs, d’un côté la langue change et de l’autre la raison croît et le goût se raffine ; il nous paraît aujourd’hui dans ces pièces des défauts, qui ne paraissaient point à nos pères, gens d’esprit, il y a cinquante ans : or ces pièces ainsi perfectionnées vaudraient ordinairement beaucoup mieux, soit pour le plaisir, soit pour l’utilité de l’auditeur, que les pièces nouvelles, c’est qu’il est bien plus facile au même Auteur de perfectionner un ouvrage qui a déjà plusieurs beautés et d’en faire un excellent que d’en faire un tout neuf qui soit exempt de défauts, et rempli de plus grandes beautés et en plus grand nombre que l’ancien qui était déjà fort bon. […] Cette pièce réformée porterait le nom du Réformateur jusqu’à ce qu’elle fût elle-même un jour réformée quelques années après sa mort ; il est aisé de voir que les ouvrages excellents ne périraient pas faute de quelques retranchements et de quelques additions nécessaires pour les rendre aussi beaux et plus utiles dans le siècle suivant qu’ils l’étaient dans le siècle précédant ; car il faut toujours faire en sorte que les spectacles se perfectionnent à mesure que la raison humaine se perfectionne, et la meilleure manière d’avancer beaucoup en peu de temps vers la perfection, c’est de se servir de ce qu’il y a de bon dans les ouvrages des morts, en diminuant ou corrigeant ce qu’il y a de défectueux, et en embellissant ce qu’il y a de beau. […] La raison nous dicte donc de travailler à fortifier dans les Citoyens, un des deux principaux motifs des actions des hommes, qui est l’amour de la distinction entre nos pareils ; mais elle nous dicte en même temps les règles pour bien discerner les distinctions petites, vulgaires, incommodes au commerce, d’avec les distinctions précieuses qui procurent toujours la commodité et l’utilité des autres ; ce sont ces distinctions qui sont les seules véritablement dignes de louanges et désirables dans le commerce, il ne faut jamais que le désir de la gloire marche sans la connaissance de la bonne gloire ; or je suis persuadé que le théâtre bien dirigé par le Bureau des spectacles peut beaucoup servir à rendre les spectateurs non seulement très désireux de gloire et de distinction, mais encore très connaisseurs en bonne gloire et en distinction la plus précieuse afin que les hommes estiment de plus en plus l’indulgence ; la patience, l’application au travail, les talents et les qualités les plus utiles à leurs familles, à leurs parents, à leurs voisins, à leurs amis, à leur nation et au reste du genre humain. […] Mais par la même raison, il me paraît contre le bon sens et contre la bonne police de permettre de parodier et de tourner en ridicule d’excellentes pièces sérieuses, où la vertu est honorée et le vice puni ; cet excès dans les parodies est la suite de la corruption de nos mœurs ; le Poète pour procurer du plaisir au spectateur et pour gagner plus d’argent ne s’embarrasse pas de confondre le bon avec le mauvais, l’estimable avec le ridicule, le grand avec le méprisable, l’odieux avec l’aimable, comme si toutes ces choses étaient égales pour le bonheur et pour le malheur de la société, et comme si le but de la raison n’était pas d’unir toujours dans les spectacles l’utilité de la société au plaisir du spectateur.

104. (1759) Lettre sur la comédie pp. 1-20

Au défaut de solides raisons, j’appellois à mon secours tous les grands & frêles raisonnements des Apologistes du Théâtre ; je tirois même des moyens personnels d’Apologie de mon attention à ne rien écrire qui ne pût être soumis à toutes les Loix des mœurs : mais tous ces secours ne pouvoient rien pour ma tranquillité. […] Si la prétention de ce caractère, si répandue auiourd’hui, si maussade comme l’est toute prétention, & si gauche dans ceux qui l’ont malgré la nature & sans succès, n’étoit qu’un de ces ridicules qui ne sont que de la fatuité sans danger, ou de la sottise sans conséquence, je ne m’y serois plus arrêté ; l’objet du portrait ne vaudroit pas les frais des crayons : mais outre sa comique absurdité, cette prétention est de plus si contraire aux régles établies, à l’honnêteté publique, & au respect dû à la Raison, que je me suis cru obligé d’en conserver les traits & la censure, par l’intérêt que tout Citoyen qui pense doit prendre aux droits de la Vertu & de la Vérité. […] Après avoir apprécié, dans sa raison, ce phosphore qu’on nomme l’Esprit, ce rien qu’on appelle la Renommée, ce moment qu’on nomme la Vie, qu’il interroge la Religion qui doit lui parler comme à moi ; qu’il contemple fixement la mort ; qu’il regarde au-delà, & qu’il me juge. […] Pourquoi perdre à douter avec une absurde présomption, cet instant qui nous est laissé pour croire & pour adorer avec une soumission fondée sur les plus fermes principes de la saine raison ?

105. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre V bis. Le caractère de la plus grande partie des spectateurs force les auteurs dramatiques à composer licencieusement, et les acteurs à y conformer leur jeu. » pp. 76-85

Des leçons pour apprendre les subtilités du vice, ou des exemples pour s’affermir dans le crime, ou des aliments des passions pour en repaître leur cœur, ou des peintures fabuleuses pour retracer à leur imagination de trop coupables vérités. » Le théâtre ne leur plaît qu’autant qu’on a soin de ne pas contrarier, jusqu’à un certain point, leurs penchants, qu’on y ménage, qu’on y flatte même leurs passions favorites, qu’on y donne aux vices qui leur sont les plus naturels un vernis d’héroïsme et de grandeur qui adoucisse à leurs propres yeux ce qu’auraient d’odieux des couleurs trop vraies et des images trop ressemblantes : comme ils sont plus susceptibles d’impressions nuisibles et dangereuses que d’impressions bonnes et utiles, une morale exacte, une raison sévère les ennuient et les rebutent. […] Ne sont-ils pas trop intéressés à se prêter au goût des spectateurs pour qu’ils ne travaillent pas de la manière la plus propre à se concilier leurs suffrages, pour qu’ils n’emploient pas toute leur imagination à séduire l’imagination des autres hommes, au lieu de s’attacher à éclairer leur raison, pour que leur goût le plus ordinaire ne soit pas le goût du vice bien plus que celui de la vertuai ? […] Cette intention ne garantit pas des mauvais effets des passions qui triomphent sur le théâtre ; c’est toujours le cœur qui prend le plus de part aux spectacles ; il en est même pour cette raison le premier juge, puisque ce n’est que relativement à l’émotion qu’on y éprouve, qu’on applaudit plus ou moins à la représentation, si on se sent plus fortement ému par le vif intérêt que l’on prend à l’action ; si on se sent transporté sur le lieu de la scène, et comme dans la situation du personnage qui nous attache le plus ; si on l’entend parler, et si on le voit agir comme on parlerait et comme on agirait soi-même, étant animé de la même passion : alors le cœur prononce que le poète et les acteurs ont bien réussi à intéresser les spectateurs. […] La raison pour laquelle presque toutes les pièces de théâtre sont fondées sur une intrigue amoureuse, c’est que les femmes, qui parent les spectacles, ne veulent point souffrir qu’on leur parle d’autre chose que d’amour.

106. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Troisième Lettre. De madame d’Alzan. » pp. 25-27

P lus d’espoir, plus de raison, plus de bonheur ! […] Aujourd’hui, que la première émotion calmée me permet d’écouter la raison, je ne vois plus que votre magnanimité.

107. (1702) Lettre de M. l’Abbé de Bellegarde, à une Dame de la Cour. Lettre de Lettres curieuses de littérature et de morale « LETTRE. de M. l’Abbé de Bellegarde, à une Dame de la Cour, qui lui avait demandé quelques réflexions sur les pièces de Théâtre. » pp. 312-410

Je crois, Madame, que vous ne feriez pas mal de lire quelqu’un de ces Auteurs, puisque vous voulez, dites-vous, vous dire à vous-même les raisons pourquoi vous riez ou vous pleurez à la Comédie. […] C’est avec raison qu’on a blâmé Euripide d’avoir représenté Médée, qui égorgeait ses propres enfants ; il faut avoir l’âme barbare pour pouvoir souffrir un spectacle si horrible. […] Cette maxime est incontestable : Une fausseté accompagnée de vraisemblance, et qui ne choque point la droite raison, est préférable à une vérité incroyable. […] Je vous dirai seulement les raisons qu’on allègue de part et d’autre ; vous en jugerez vous-même, et vous suivrez les avis de votre Directeur. […] Je vous laisse, Madame, le choix du parti que vous avez à prendre, après avoir examiné toutes les raisons de part et d’autre.

108. (1838) Principes de l’homme raisonnable sur les spectacles pp. 3-62

Mais serait-ce une raison d’en conclure qu’on doit les multiplier encore ! […] Nous ne songeons qu’à émouvoir les passions par le mélange de l’un et de l’autre ; et les hommages que nous rendons quelquefois à la raison, ne détruisent pas l’effet des passions que nous avons flattées. […] Au défaut de solides raisons, j’appelais à mon secours tous les grands et frêles raisonnements des apologistes du Théâtre ; mais tous ces secours ne pouvaient rien pour ma tranquillité. […] Et, ce que je dis de celui-là, je le dis de tous : la raison et la décence les interdisent aux jeunes personnes. […] Cette réponse nous donne lieu d’observer qu’un Chrétien, s’il veut être conséquent, doit à plus forte raison dire aussi : Puisque la raison et la religion ne défendent les spectacles, je n’irai sûrement point.

109. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE VII. Du Père Porée. » pp. 149-177

Cette condamnation ne porte pas moins sur le spectacle : mêmes raisons, mêmes dangers, mêmes prétextes. […] La raison, enivrée, enchaînée de fleurs, est couchée à ses pieds. […] Son discours sur les romans donne à ces vérités une nouvelle force, par une identité de raison évidente. […] C’est à quoi conduisent les principes par-tout établis de cette morale lubrique, qu’il faut obéir à l’amour, que c’est le privilège du bel âge & tout le bonheur de la vie, que ses chaînes sont préférables à la liberté, ses loix à la raison, ses douceurs à la vertu. […] Guimenius rejette avec raison une opinion si relâchée, qui même ne sauveroit pas la comédie, puisque celui qui y va volontairement, non-seulement ne fuit pas, mais cherche l’occasion du péché, ce que tout le monde condamne : car qui aime le péril y périra.

110. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE IV. Apologie des Dames. » pp. 119-155

Que conclure donc, sinon que les femmes laissant moins échapper de marques de corruption sont en effet moins corrompues, que leur attachement à la Vertu prouve qu’elles sont plus raisonnables, et qu’étant plus raisonnables, il convient de les faire parler raison ? […] Quels « objets célestes » aux yeux de la Raison ! […] Il n’est donc pas si déplacé que vous feignez de le croire de mettre la raison dans la bouche des Dames, et le petit Jean de Saintréef a raison d’ajouter à son repas l’agrément de le voir préparé par une belle main. […] Elle avait donc de la raison. […] Détrompez-vous par l’expérience ; vous entendrez toutes les mères non seulement vertueuses, mais tant soit peu sensées, prêcher toujours la raison et la pudeur à leurs filles ; tant qu’elles sont dans leurs mains, ces jeunes personnes sont des Agnès dont la simplicité, la candeur et la modestie annoncent la sagesse.

111. (1647) Traité des théâtres pp. -

Que les raisons dont en les veut appuyer sont futiles, et de nul poids. […] Or ce n’est pas sans raison qu’on doit bannir la Tragédie des Spectacles. […] Que les raisons dont on essaie d’appuyer les Théâtres sont tout à fait futiles. […] Ainsi ce serait à leurs Avocats de se pourvoir par devers elles, afin que leurs raisons pesées, il y fût décidé s’il faudra les tolérer à l’avenir. […] Mais quant aux règlements Ecclésiastiques, ils ne changent pas la nature de la chose sur laquelle on les fait, qui en soi demeure toujours la même, et ne devient nécessaire que par une nécessité d’ordre ; d’où vient que comme ces règlements sont établis sur de certaines raisons, qui regardent les temps, les lieux, les personnes, ces raisons cessant et changeant, on peut aussi les changer.

112. (1666) Réponse à l'auteur de la lettre « letter » pp. 1-12

Je ne veux pas pousser ces raisons plus loin, et ce que j’en ai dit est seulement pour vous faire connaître à quoi vous vous exposez d’écrire contre l’Auteur des lettres, qui peut bien en dire davantage, lui qui sait les Pères, et qui les cite si à propos. […] Je ne comprends point par quelle raison vous avez voulu leur répondre et il me semble qu’un Poète un peu politique ne les aurait pas seulement entendus. […] Cette seule raison détruit tous les faux raisonnements que vous faites, et que vous concluez en disant à tous les gens de Port-Royal que « le crime du Poète les a irrités contre la Poésies ». […] Mais en vérité pouvez-vous les avoir lues et parler de Desmarets comme vous faites, le défendre publiquement, et inventer pour lui tant de fausses raisons ? […] Ce ne peut être que par une raison fort mauvaise pour vous, n’obligez personne à la découvrir, et ne dites point de vous-même que l’Auteur des lettres a voulu écrire comme Monsieur Pascal.

113. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XII. De l’autorité des Pères.  » pp. 49-51

C’est être trop sourd à la vérité de ne sentir pas, que leurs raisons portent plus loin. […] On trouvera dans les Pères toutes ces raisons et beaucoup d’autres.

114. (1586) Quatre livres ou apparitions et visions des spectres, anges, et démons [extraits] « [Extrait 2 : Livre VI, chap. 7] » p. 590

Car sa raison est que Dieu ne veut pas que ceux qui sont dedans les Enfers retournent comptere ce qui se fait en ces lieux, afin d’obvier au malheur qui en pourrait sourdre : Les damnés qui retourneraient au monde, souffleraient ès entrailles des hommes la fureur et la rage des tourments qu’ils endurent : Ainsi les Poètes Tragiques feignent que l’Ame de Thyeste sortant des Enfers, brouille et renverse tout l’état de sa famille, met en trouble sa maison, acharnef Egiste à vengeance, incite à fureur Clytemnestre, lui souffle le venin de jalousie en l’Ame, et la fait meurtrière de son mari : et l’acte commis, pousse Oreste à venger sur Egiste et sa mère la mort de son père, et les tuer tous deux, afin qu’après leur mort, il fût tourmenté de l’horrible regard des Erinyes et Furies qui lui représentent devant les yeux l’énormité et gravité du délit perpétré. […] Et jusques ici j’aurai, ce me semble, soutenu assez bien le choc de Lavatier, résisté vigoureusement à ses efforts, évité ses atteintes, et réfuté ses raisons et arguments.

115. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [E] » pp. 399-406

Notre légèreté, notre futilité, notre enfance de raison, voila la vraie, la principale cause des succès de la Comédie-Ariette, genre tout-à-fait monstrueux, & que les efforts des plus habiles gens ne pourront faire rentrer dans la nature. […] S’ils entendent par leur Théâtre, les Pièces libres dont j’ai parlé, ils ont raison, des Comédies sensées, touchantes, insipideraient bientôt des colifichets sautillans, qui n’ont qu’un air de libertinage, de vivacité, & rien d’intéressant, rien de solide. […] Ils sont encore assez bien peints dans les deux Peres de Rose-&-Colas ; mais dans cent autres Pièces, on nous présente des êtres de raison. […] vous avez raison : mais, morbleu, laissez nos Paysans ; laissez les à des Peintres dignes d’eux, & ne les défigurez pas. […] Ainsi, lorsque dans les Deux-Frères-Rivaux, Scapin menace sa sœur de la faire mettre entre quatre mutailles, & qu’Arlequin lui répond, qu’il vaudra mieux la faite enfermer entre quatre rideaux  ; l’on rit & l’on applaudit à la naïveté de la répartie, dans un balourd, qui dit bonnement ce qu’il pense sans y entendre finesse : au-lieu que dans un homme d’esprit qui la donnerait pour une pointe, elle serait sifflée avec raison.

116. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Disseration sur la Condemnation, des Théâtres. — Chapitre IV. Que la représentation des Poèmes Dramatiques ne peut être défendue par la raison des anciens Pères de l'Eglise. » pp. 90-103

Que la représentation des Poèmes Dramatiques ne peut être défendue par la raison des anciens Pères de l'Eglise. […] Mais maintenant qu'ils sont purifiés de toutes les cérémonies de cette impiété, et que la Religion Païenne est entièrement abolie parmi les peuples de l'Occident, cette raison qui fut autrefois si puissante dans la bouche des Pères de l'Eglise, n'est plus maintenant considérable ; et cette défense qu'ils prêchaient avec quelque sorte d'anathème, n'a plus ce fondement dans notre siècle. […] Mais examinons une autre raison dont nos premiers Docteurs se sont servis, et qui semblait condamner les représentations de nos Théâtres, aussi bien que de ceux de Rome et de Grèce.

117. (1758) Réponse pour M. le Chevalier de ***, à la lettre de M. des P. de B. sur les spectacles [Essais sur divers sujets par M. de C***] « Réponse pour M. le Chevalier de***, A la lettre de M. des P. de B. sur les spectacles. » pp. 128-142

Déchirée par ces sentimens, si puissans sur les cœurs généreux, la religion, le devoir & l’amour ; elle n’ose avouer Ces foiblesses des sens que sa raison surmonte. […] Je crois en avoir assez dit pour vous faire revenir de votre prévention ; je pourrois encore ajouter quelques raisons pour achever de vous convaincre ; mais je les supprime : c’est à la réflexion à vous les présenter. […] Si, cependant, vous me demandiez si la comédie est propre à faire mourir en nous l’esprit du péché, & à nous faire rentrer dans la voie du salut, je vous avouerai franchement que je la crois peu capable d’opérer ces miracles ; je la regarde comme un objet indifférent en soi qui peut servir de délassement aux personnes occupées, & d’occupation aux personnes qui n’ont rien à faire ; mais vous auriez tort, je le répete encore, de vous imaginer que je regarde le théâtre comme une école de religion ; Non, pour changer leurs mœurs & régler leur raison, Les chrétiens ont l’Eglise & non pas le théâtre. […] Vous serez peut-être surpris de ce que je n’ai pas pris la défense de l’opéra dans le cours de cette lettre ; ce n’est pas parce que je crois ce spectacle plus dangereux que les autres, mais c’est que les mêmes raisons que j’ai alléguées ci-dessus, doivent servir à l’excuser.

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