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10. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. Aveux importans. » pp. 83-110

Il n’est pas honnête, dit Cicéron, de s’exercer contre les Dieux, même par jeu d’esprit, nous ne devons point nous divertir à leurs dépens, ni jouer la vertu. Les spectacles sont incompatibles avec la piété, ils remplissent l’ame de passions, l’esprit d’idées, le cœur de sentimens qui la détruisent . […] Les plaisirs de l’esprit par eux-mêmes innocens peuvent être très-criminels, on confond l’esprit avec son impureté ; on croit dans un ouvrage n’aimer que l’esprit, & on n’en aime que la corruption, l’esprit n’est qu’un prétexte, & quand même on aimeroit ce qu’il y a d’ingénu, on goûte sur-tout ce qui s’y trouve de licencieux, qui favorise les passions. […] Rien ne prouve mieux l’esprit de parti que la fureur des Huguenots à chanter dans leurs Temples de misérables vers qui n’ont ni religion ni bon sens. […] Un homme de goût, un homme de bien ne jettera pas les yeux sur ces fruits détestables de la corruption de l’esprit & du cœur.

11. (1698) Théologie du cœur et de l’esprit « Théologie du cœur et de l’esprit » pp. 252-267

L’esprit s’y apprivoise peu à peu ; on apprend à la souffrir, à en parler, & l’ame s’y laisse aller. […] Les premiers ne sont point sensibles ; ils ne laissent pas cependant de nous conduire à une corruption de cœur & d’esprit. […] Cet Esprit de ténebres ne causant point en nous sur le champ les mauvais effets de la Comedie, il les produit dans la suite. […] Sont-ils autre chose que des délassemens de l’esprit, qui le mettent en état de reprendre ses saints exercices, & de les continuer avec plus de perfection ? […] Or les Comedies & les Romans ne rendent pas seulement nos esprits mal disposez pour de saintes occupations, mais elles nous donnent du dégoût pour les actions serieuses.

12. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre VIII. Des caractères & des Mœurs Tragiques. » pp. 131-152

La seconde annonce un esprit qui procéde par dégrés avec le secours de la méditation, à la recherche de la vérité. […] Il faut convenir qu’il y en a peu qui n’ayent de l’esprit. […] on a honte d’être un sot dans un siécle, ou ce n’est presque plus un mérite d’avoir de l’esprit. […] Mais il n’en est pas de l’esprit comme de l’or & de l’argent. […] Les autres sont dans l’homme, & expriment la nature de son esprit, de ses sentimens, de ses passions.

13. (1687) Instruction chrétienne pour l’éducation des filles « CHAPITRE XIII. Des jeux, des spectacles, et des bals, qui sont défendus aux Filles Chrétiennes. » pp. 274-320

Chrysostome, qu’étant dans l’esprit de Lucifer, les voûtes du Ciel ne le purent plus supporter. […] Quelles pensées peuvent porter les objets dans l’esprit ? […] Je vous l’avais bien dit que notre Dieu est un esprit infiniment pur et infiniment saint, et que suivant la parole de son Fils unique, pour être du nombre de ses véritables adorateurs, il faut l’adorer avec un esprit saint, et un cœur épuré. […] Ce savant homme dit qu’on peut regarder un bal en deux manières, ou par les yeux du corps, ou avec ceux de l’esprit. […] Réjouissez-vous, mais réjouissez-vous dans le Seigneur, c’est-à-dire, selon son Esprit, et il est bon de se relâcher quelquefois l’esprit et le corps par des récréations honnêtes et innocentes.

14. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « L. H. Dancourt, Arlequin de Berlin, à Mr. J. J. Rousseau, citoyen de Genève. » pp. 1-12

La seconde lecture m’a tranquillisé : mon esprit éclairé par mon amour-propre a vu dissiper le prestige, et votre lettre ne m’a plus paru que l’amusement d’un Auteur ingénieux qui voulait prouver au monde combien il est facile à l’esprit de donner au mensonge l’apparence du vrai. […] J’aurais aperçu cela du premier coup d’œil, si je n’avais pas contracté comme tant d’autres lecteurs, la mauvaise habitude de me laisser entraîner par l’esprit avant de consulter le bon sens. […] Augustin : « Je veux que vous vous ménagiez, car il est de l’homme sage de relâcher quelquefois son esprit appliqué à des affaires. » Cet Ange de l’Ecole indique ensuite l’espèce de plaisirs qu’il conseille de prendre. […] Ce spectacle est adopté en Allemagne comme en France, d’abord pour contribuer à l’éducation de la jeunesse ; en second lieu pour occuper pendant deux ou trois heures du jour des libertins qui pourraient employer mal le temps qu’ils donnent à cet amusement ; en troisième lieu pour procurer un amusement honnête à des gens sages qui, fatigués de l’application que leurs emplois exigent, ont besoin de ranimer les forces de leur esprit par un délassement utile à l’esprit même. […] Le Théâtre comme toutes les autres productions de l’esprit humain, a eu des commencements faibles.

15. (1665) Lettre sur les observations d’une comédie du sieur Molière intitulée Le Festin de Pierre « APOSTILLE » pp. 33-57

Jugez après cela si la passion ne fait point parler contre Molière et si on l’attaque par un véritable esprit de charité ou pource qu’il a fait le Tartuffe. Ce critique, peut-être trop intéressé et dont l’esprit va droit au mal, puisqu’il en trouve dans des choses où il n’y en a point de formel, ajoute que la comédie est quelquefois chez Molière « une innocente qui tourne, par des équivoques étudiés, l’esprit à de sales pensées o ». […] Quel zèle et quelle profondeur d’esprit ! […] Quoi, il mettra des équivoques qui tourneront l’esprit à de sales pensées, et l’on ne l’appellera pas athée ? […] Ces exemples sont bons pour surprendre les ignorants, mais ils ne servent qu’à justifier Molière dans l’esprit des personnes raisonnables.

16. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XV. Les spectacles éteignent le goût de la piété. » pp. 133-137

L’esprit de prière, comment le conserver, après que tant d’objets profanes ont fait sortir l’âme d’elle-même, quand elle n’est remplie que de fantômes ; et la prière qu’on adresserait à Dieu au sortir de ces représentations, supposé qu’on en fît, ne serait-elle pas plus propre à l’irriter qu’à le fléchir ? […] une expérience journalière nous apprend qu’on perd le goût de tous les biens spirituels en s’abandonnant aux plaisirs grossiers des spectacles, que les actions même sérieuses et communes deviennent à charge, qu’on n’aime plus qu’à se satisfaire, et que ce désordre est si funeste à l’homme, qu’il ruine entièrement en lui toutes les qualités de l’esprit et du cœur, et devient la source de tous les vices. […] L’esprit impur serait-il en possession de tant de chrétiens, s’ils n’allaient recevoir aux spectacles de funestes impressions qui, en éteignant dans leur cœur le goût de la piété, y allument le feu des plus fougueuses passions ? […] Quand on connaît les obligations et l’essence du christianisme, on sent que des représentations si obscènes ne peuvent s’accorder avec sa pureté ; qu’on ne peut participer à la table des démons et à celle du Seigneur, et que Bélial ne peut être adoré sur le même autel avec Jésus-Christ. » « Je ne connais pas, dit un auteur, d’esprit plus opposé à l’esprit du christianisme que l’esprit du théâtre ; j’en ai peut-être été aussi entêté qu’un autre, mais j’avoue, à ma confusion, que je n’ai jamais été moins chrétien que pendant cet entêtement.

17. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XIV. Réponse a l’objection qu’il faut trouver du relâchement à l’esprit humain : que celui qu’on lui veut donner par la représentation des passions est réprouvé même par les philosophes : beaux principes de Platon. » pp. 58-60

Réponse a l’objection qu’il faut trouver du relâchement à l’esprit humain : que celui qu’on lui veut donner par la représentation des passions est réprouvé même par les philosophes : beaux principes de Platon. On dit qu’il faut bien trouver un relâchement à l’esprit humain, et peut-être un amusement aux cours et au peuple. […] répond, que sans courir au théâtre, nous trouverons la nature si riche en spectacles divertissants, et que d’ailleurs la religion et même notre domestique sont capables de nous fournir tant d’occupations où l’esprit se peut relâcher, qu’il ne faut pas se tourmenter pour en chercher davantage : enfin que le chrétien n’a pas tant besoin de plaisir, qu’il lui en faille procurer de si fréquents et avec un si grand appareil. […] La raison de ce philosophe était qu’en contrefaisant ou en imitant quelque chose, on en prenait l’esprit et le naturel : on devenait esclave avec un esclave ; vicieux avec un homme vicieux ; et surtout, en représentant les passions, il fallait former au-dedans celles dont on voulait porter au dehors l’expression et le caractère. Le spectateur entrait aussi dans le même esprit : il louait et admirait un comédien qui lui causait ces émotions ; ce qui, continue-t-il, n’est autre chose «  que d’arroser de mauvaises herbes qu’il fallait laisser entièrement dessécher ».

18. (1757) Article dixiéme. Sur les Spectacles [Dictionnaire apostolique] « Article dixiéme. Sur les Spectacles. » pp. 584-662

Les spectacles dans leur nature sont opposés à l’esprit du Christianisme. […] L’esprit impur seroit-il en possession de tant de Chrétiens ? […] L’esprit du Christianisme est un esprit de sainteté. […] Il forme cependant, il délasse l’esprit. […] Il forme cependant & il délasse l’esprit.

19. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — article » pp. 419-420

Les Livres ne présentent point de modèle aux yeux, mais ils en offrent à l’esprit : ils donnent le ton à l’imagination & au sentiment ; l’imagination & le sentiment le donnent aux organes. […] On a vu des exemples d’une belle Déclamation sans étude, & même, dit-on, sans esprit. Oui sans doute, si l’on entend par esprit la vivacité d’une conception légère, qui se repose sur les riens, qui voltige sur les choses. Cette sorte d’esprit n’est pas plus nécessaire pour jouer le rôle d’Ariane, qu’il ne l’a été pour composer les Fables de Lafontaine & les Tragédies de Corneille. Il n’en est pas de même du bon esprit ; c’est par lui seul que le talent du bon Acteur s’étend & se plie à différens caractères : celui qui n’a que du sentiment ne joue bien que son propre rôle ; celui qui joint à l’âme, l’intelligence, l’imaginatien & l’étude, s’affecte & se pénètre de tous les caractères qu’il doit imiter ; jamais le même, & toujours ressemblant : ainsi l’âme, l’imagination, l’intelligence & l’étude doivent concourir à former un excellent Comédien.

20. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre V. De la Musique ancienne & moderne, & des chœurs. De la Musique récitative & à plusieurs parties. » pp. 80-93

Dans les entre actes, elle cause une variété nécessaire aux bons esprits sur-tout, en qui les idées se pressent rapidement, à chaque mot du récit. […] Elles trouvent l’un & l’autre dans la musique, qui donnant un cours moins vif aux esprits, répare leur force épuisée. […] Si l’on n’y en prêtoit ; l’esprit de l’auditeur étoit trop tendu, & n’avoit aucun moment pour se délasser. […] Dans la premiere supposition, l’esprit de l’auditeur étoit trop tendu, & n’avoit pas un moment pour se délasser. […] Si j’avois quelque crédit sur l’esprit des Comédiens, je leur dirois : « Vous voulez de l’argent Messieurs ?

21. (1689) Le Missionnaire de l’Oratoire « [FRONTISPICE] — Chapitre »

Vous éteignez en vous l’esprit de piété, de charité et de pénitence, l’esprit de piété et de dévotion. […] L’esprit de dévotion est comme un baume précieux, comme l’essence d’une eau cordiale : rien ne s’évente si aisément, il ne faut qu’une heure de dissolution pour ruiner en vous le recueillement et l’esprit de piété que vous aurez amassé en plusieurs semaines de méditation et d’oraison.

22. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — XXI.  » p. 480

Mais il ne s'ensuit pas que ceux qui ont véritablement besoin de se délasser l'esprit, puissent y aller sans péché; parce que la Comédie ne peut passer pour un divertissement, ne pouvant avoir l'effet qu'il est permis de chercher dans le divertissement. Car le Chrétien n'y peut rechercher qu'un simple délassement d'esprit, qui le rende plus capable d'agir chrétiennement et dans des dispositions chrétiennes. Or tant s'en faut que la Comédie y puisse servir, qu'il n'y a rien qui indispose l'âme davantage, non seulement aux principales actions chrétiennes, comme la prière; mais aux actions mêmes les plus communes, lorsqu'on les veut faire dans un esprit de Chrétien, c'est-à-dire recueilli et attentif à Dieu, qu'il faut tâcher autant que l'on peut, de conserver dans les actions extérieures. Ainsi comme le besoin que nous avons de manger ne fait pas qu'il nous soit permis de manger des viandes, qui ne servent qu'à affaiblir le corps; de même le besoin de se divertir ne peut excuser ceux qui recherchent des divertissements qui ne font que rendre leur esprit moins propre à agir chrétiennement.

23. (1675) Traité de la comédie « XXI.  » p. 309

Mais il ne s'ensuit pas que ceux qui ont véritablement besoin de se délasser l'esprit puissent y aller sans péché, parce que la Comédie ne peut passer pour un divertissement, ne pouvant avoir l'effet qu'il est permis d'y chercher. Car le Chrétien ne peut rechercher qu'un simple délassement d'esprit, qui le rende plus capable d'agir Chrétiennement, et dans des dispositions Chrétiennes. Or tant s'en faut que la Comédie y puisse servir, qu'il n'y a rien qui rende l'âme plus mal disposée, non seulement aux principales occupations Chrétiennes, comme la prière, mais aux actions mêmes les plus communes, lorsqu'on les veut faire dans un esprit de Chrétien, c'est-à-dire recueilli et attentif à Dieu, qu'il faut tâcher, autant que l'on peut, de conserver dans les actions extérieures; ainsi comme le besoin que nous avons de manger ne fait pas qu'il nous soit permis de manger des viandes qui ne servent qu'à affaiblir le corps; de même le besoin de se divertir ne peut excuser ceux qui cherchent des divertissements qui ne font que rendre leur esprit moins propre à agir Chrétiennement.

24. (1603) La première atteinte contre ceux qui accusent les comédies « LA PREMIÈRE ATTEINTE CONTRE CEUX QUI ACCUSENT LES COMÉDIES » pp. 1-24

Nous sommes en un temps où il se trouve des esprits semblables aux corps malades, qui s’offensent de toutes choses, et méprisent ce qu’ils ne peuvent imiter. […] Et au même temps Décime Laberie fut fait Chevalier Romain sous César, après avoir montré que sous un même feu l’or reluit et le bois se noircit ; et qu’un galant homme peut être grand en un petit art, si l’art qui n’a sujet que l’esprit peut être petit. […] Et il dit que c’est des Fêtes des Catholiques ; d’un mauvais esprit, mauvaise intelligence : il convertit tout en sa malice. […] La parole la soutient, console, anime aux actions glorieuses, la nourrit comme son ambroisie, et ainsi qu’une lumière en allume plusieurs, elle augmente sa vertu ; et à l’imitation des Chimiques, rend cet or céleste si actif, qu’il fait projection à l’infini en un esprit digne de recevoir cette manne divine. […] Mais ainsi que le diamant ne se peut polir que par son sablon même, pour combattre l’aimant, diminuer sa puissance, et lui faire démordre le fer : N’est-ce pas à cette perle des esprits qui ne peut perdre son lustre, de raffiner comme le rubis ce discours au fleuve de son éloquence.

25. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — XXIV.  » pp. 482-483

Ceux qui sont employés dans des affaires pénibles à l'esprit et peu laborieuses au corps, ont besoin de se recueillir de la dissipation qui naît naturellement de ces sortes d'emplois et non pas de se dissiper encore davantage par des divertissements qui attachent fortement l'esprit: c'est une moquerie de croire qu'on ait besoin de passer trois heures dans une Comédie à se remplir l'esprit de folies. Les hommes de ce temps-ci n'ont pas l'esprit autrement fait que ceux du temps de S.

26. (1675) Traité de la comédie « XXIV.  » pp. 312-313

Ceux qui sont employés dans des affaires pénibles à l'esprit, et peu laborieuses pour le corps, ont besoin de se recueillir de la dissipation qui naît naturellement de ces sortes d'emplois, et non pas de se dissiper encore davantage par des divertissements qui attachent fortement l'esprit. C'est une moquerie de croire qu'on ait besoin de passer trois heures dans une Comédie à se remplir l'esprit de folies. Les hommes de ce temps-ci n'ont pas l'esprit autrement fait que ceux du temps de S.

27. (1765) De l’éducation civile « De l’éducation civile » pp. 76-113

Delà, ce tas de Brochures éphémères qui absorbent un temps précieux, & qui contribuent plus qu’on ne pense à dégrader l’esprit en le rendant oiseux & incapable d’une sérieuse application. […] Mais, forcés de se prêter à des usages malheureusement indispensables, ils porteront, dans la Société, cet esprit de réflexion & d’analyse qu’ils ont puisé dans leur éducation ; cependant ils prendront bien garde que personne ne les devine, de peur de se rendre incommodes à la tourbe des esprits superficiels & des sots. […] On feroit peut-être moins de Dissertations pour décider si Corneille est supérieur à Racine, si la Motte avoit plus d’esprit que Rousseau, &c. […] L’esprit, frappé de la grandeur d’un objet, se plaît à le considérer sous ses divers aspects, à l’analyser & à le suivre dans tous ses rapports. […] Si l’on continuoit à les lire, ce seroit avec le même esprit & les mêmes dispositions que les hommes sensés portent à une farce, ou à un spectacle de marionnettes, spectacles si ravissans pour des enfans.

28. (1738) Sentimens de Monseigneur Jean Joseph Languet Evéque de Soissons, et de quelques autres Savans et Pieux Ecrivains de la Compagnie de Jesus, sur le faux bonheur et la vanité des plaisirs mondains. Premiere partie « Sentimens de quelques ecrivains De la Compagnie de Jesus, Touchant les Bals & Comedies. Premiere Partie. — Entretien troisieme. Le danger des Bals & Comedies découvert par l’Auteur des Sermons sur tous les sujets de la morale Chrétienne de la Compagnie de Jesus. » pp. 26-56

Je veux dire que ces spectacles épurez de ce qu’ils avoient de plus scandaleux autrefois, ne laissent pas de faire la même impression sur un esprit déja disposé, & d’y causer les mêmes desordres, qu’on ne peut excuser de peché mortel. […] Les images qu’elle en a si souvent devant les yeux, ne representent-elles pas à son esprit, à la moindre application qu’elle voudra faire aux choses de son salut ? […] Quand donc ces spectacles ne causeroient point d’autre mal, que de dissiper l’esprit, ne seroient-ils pas toûjours criminels ? […] qu’il y a des objets qui peuvent frapper si vivement nos sens, & faire telle impression sur nôtre esprit, qu’on a besoin des plus puissans secours de la grace pour s’en défendre ? […] Que sçavez-vous si ces objets, qui ne font point maintenant d’impression sur vôtre esprit, n’y laisseront point des traces, qui s’y renouvelleront un jour, & qui exciteront ces fortes passions que vous apprehendez si peu ?

29. (1658) L’agent de Dieu dans le monde « Des théâtres et des Romans. CHAPITRE XVIIII. » pp. 486-494

Ces expressions où l’on emploie les deux sens plus familiers de l’esprit, où la parole est animée de l’exemple, où l’on voit ce qu’elle enseigne seraient extrêmement efficaces pour porter les hommes à la vertu, et les théâtres feraient en cela plus que les prédications, si l’on n’y représentait, comme autrefois, que les choses saintes. […] Un politique usurpateur, se plaît en ces feintes, qui expriment sa conduite au naturel, qui la justifient par un applaudissement public ; ce que les autres prennent pour un divertissement lui est une étude, un secret conseil, où il corrige, retranche, ajoute beaucoup de choses par les promptes ouvertures de l’esprit, et ayant vu le dernier point où peut porter l’autorité dominante, il croit faire une grande miséricorde de n’aller pas à toutes les extrémités. […] Quand le dessein principal serait de condamner la tyrannie, en faisant voir ses progrès toujours orageux, et sa fin ordinairement misérable, ces noires pratiques salissent toujours l’esprit des assistances ; elles y laissent les idées d’un mal, dont la passion se peut servir en mille rencontres, et qu’il était meilleur d’ignorer. […] Néanmoins ces relations peuvent être beaucoup plus nuisibles, parce qu’on les lit, qu’on les retâte, qu’on les médite à loisir, le Roman est une comédie perpétuelle, pour les esprits qui aiment cet entretien. […] et comme une violence sur des esprits trop faibles pour n’en être pas emportés.

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