Le jeune Prince étoit un étourdi, dit Fontenelle, libre, vif, élégant, petit-maître, François, que faut-il de plus pour plaire aux femmes ? […] Ce Prince, sur le ton de la politesse Françoise, répondit qu’il avoit trop de soin de la santé de la Reine, pour vouloir qu’elle s’exposàt à la mer, qu’il avoit de son côté le plus vif désir de la voir, mais qu’il n’étoit venu qu’en bottes, & n’étoit pas dans un état décent pour paroître devant elle .
Apollon toujours équitable prétend qu’ils ont raison tous deux ; elle lui en fit les plus vifs reproches, & ses lettres contribuèrent à faire porter le fameux Édit de Nantes que Louis XIV s’est fait un devoir & un mérite de révoquer, Édit qui donne aux Huguenots plus qu’on ne leur avoit jamais accordé, il fut dressé part les Ministres Huguenots qu’Henri en chargea ; il n’en auroit pas fait davantage quand il étoit à leur tête, peut-être n’eut-il pas osé en faire tant. […] La crainte d’une invasion n’étoit pas son plus grand crime ; Elisabeth la craignoit peu, elle se voyoit bien affermie sur son trône ; l’Ecosse seule n’étoit pas en état de faire la guerre, & la France depuis la mort de François II sans enfans, n’y prenoit plus d’intérêt ; mais un principe secret & plus vif de son inimitié étoit la jalousie de beauté Marie étoit incomparablement plus belle, plus aimable, & même plus savante, mais moins rusée, moins dissimulée, moins politique, moins hautaine.