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327. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE II. Des Spectacles des Communautés Religieuses. » pp. 28-47

Mais il y a autant de différence entre les spectacles publics et les divertissements du cloître, que entre un repas honnête avec des personnes choisies, et les débauches du cabaret ; entre une partie de jeux d’adresse avec ses amis, et les jeux de hasard dans un brelan ; entre un menuet dansé en famille dans sa maison, et un bal nocturne, un bal d’opéra, un charivari ; la même différence que entre les personnes qui le composent ; entre des femmes publiques, et des vierges consacrées à Dieu ; des actrices fardées, à demi nues, et des vierges modestement voilées ; un amas de libertins et d’impies, et une compagnie de gens pieux et réglés ; une profession livrée au vice, et un état sacré dévoué à la religion et à la vertu. […] Thomas et tout le monde, d’après la loi de Moïse, qui est expresse, c’est une chose mauvaise de se masquer, à moins qu’il ne soit absolument nécessaire pour sauver son honneur ou sa vie ; à plus forte raison d’un sexe à l’autre, d’une personne consacrée à Dieu à un Comédien. 3.° Qu’il n’est pas permis à un Religieux de quitter son habit, même pour peu de temps et pour sa commodité, comme pour jouer à la boule ; à plus forte raison par bouffonnerie. 4.° Qu’il est aussi peu convenable de cacher ses habits et de les couvrir des livrées du vice, et faire un mélange indécent et ridicule du sacré et du profane. 5.° Que ces récréations toutes mondaines ne conviennent point du tout à des personnes consacrées à Dieu, qui font une profession solennelle de renoncer au monde, et qu’elles les exposent à beaucoup de dissipation et de mollesse. […] Elle y ajoute une circonstance très vraisemblable, et très conforme aux mœurs des Incas, au génie des enfants du soleil, qu’on n’y représentait jamais que des actions vertueuses ; au lieu que parmi nous on n’y fait presque voir que des vices.

328. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre treizieme « Réflexions morales, politiques, historiques,et littéraires, sur le théatre. — Chapitre IV.  » pp. 113-155

On peut à aussi juste titre appeler les Medicis les protecteurs, les restaurateurs des vices, que les restaurateurs des sciences, & leur regne le siecle de la corruption, que le siecle de la littérature. […] Ce qu’il y a de trop certain, & n’a pas besoin d’explication, c’est que ces figures annoncent son immodestie & ses vices. […] Ce systeme, ce goût de vice, qu’on honnore du beau nom de perfection de l’art, est devenu dominant. […] Les ouvrages sont plus reguliers, on y met de l’ordre, on y repand de l’esprit, le style en est poli, les vers sont coulans ; harmonieux ; c’est art funeste est porté à une grande perfection, mais toujours fidele au libertinage qui lui donna l’être, & à fait sa fortune, quoique l’assaissonnant quelquefois d’une morale utile, & de quelques exemples de vertu, il n’a cessé de repandre le vice avec le plus déplorable succès. […] Je n’y vois rien que de petit ; ou si l’on veut absolument du grand, il faut dire qu’elle a eu de grands vices, fait de grands crimes & de grands maux, & alors peu de personnes l’égalent.

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