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190. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre VII. Troisieme suite du Fard. » pp. 171-194

Si Moliere a fait faire ce changement, la vertu lui est peu redevable. […] L’autre Hortanse Mancini, Duchesse de Mazarin, par Saint-Evremont, son amant, qualité qui fait apprécier les éloges en tout genre qu’il lui donne, & l’espece de Réligion & de vertu, qu’il lui prête. […] Est-ce pour inspirer la vertu au patterre, & pour faire preuve de modestie & de charité, qu’une actrice paroît dévergondée sur le théatre ? […] Si l’on ne veut que plaire à Dieu, on est bien à plaindre de prendre inutilement tant de peine, Dieu n’en tient aucun compte ; le fard ne blesse point son cœur, il veut des vertus & non des couleurs ; des bonnes œuvres, & non des boucles de cheveux. […] Les libertins les ouvriront, pour répaître leur corruption de l’aliment du vice ; mais peut-on en conscience exposer aux yeux, ce que la vertu est obligée de fuir, & que le vice récherche ?

191. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE VI. De l’indécence du Théatre. » pp. 114-137

Dancourt ne vaut guère mieux, il est plein de grosses gaietés (ces grosses gaietés sont des leçons de vertu). […] Par-tout même indécence, passions de toute espèce, galanterie voilée, équivoques dans les discours, juremens, nudités, fard, masque, mélange des sexes, caractere des spectateurs, même danger pour la vertu, même anathème de l’Église. […] En effet les pieces de Térence sont plus châtiées que les nôtres ; tous les Collèges les mettent entre les mains des jeunes gens ; Madame Dacier, dont la vertu ne fut jamais douteuse, Port-Royal, dont la morale sévère n’alloit que trop loin, en ont donné des traductions avec des commentaires. […] Grégoire de Nazianze, &c. gens qui non seulement par leur vertu, leur dignité, leur science, ce qui ne souffre pas même de comparaison, mais par leur esprit, leur talent, leurs ouvrages, valent tous les Sophocles, les Euripides, & tous les Mercures anciens & modernes ensemble. […] Ils ne cherchent qu’à séduire, ils se vendent au public, ne disent & ne font rien que pour inspirer les passions, & rassembler avec la plus grande licence & avec le plus dangereux artifice, dans leurs paroles, leurs parures, leurs gestes, leurs attitudes, leur conduite, tous les objets, tous les pieges, toutes les leçons, tous les moyens les plus propres à nourrir tous les vices & détruire toutes les vertus.

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