Ie ne veux pas nier qu’il n’y ayt des lieux qu’il vaut mieux frequenter que le Theâtre, cela est hors de doute ; & il y en a où il seroit bon d’estre incessamment, s’il n’auoit pas esté ordonné à l’homme de trauailler, comme il luy a esté ordonné de prier Dieu. […] Ils aiment mieux vser de menage en toute autre chose pour donner plus de contentement au Public ; & il y a tel Comedien, dont l’equipage vaut plus de dix mille francs. […] Dans l’annonce ordinaire l’Orateur promet aussi de loin des pieces nouuelles de diuers Auteurs pour tenir le monde en haleine, & faire valoir le merite de la Troupe, pour laquelle on s’empresse de trauailler.
et pour me servir de la pensée d’un écrivain judicieux10, ne vaut-il pas mieux prendre sur l’autel le flambeau pour éclairer et conduire les victimes aveuglées par l’erreur, que le glaive propre à les immoler. […] En vain dira-t-on que, bientôt désert, le théâtre n’offrira plus d’intérêt et de plaisir au spectateur, s’il est circonscrit et renfermé dans les bornes d’une morale austère, et qu’autant vaudra désormais chercher nos délassements dans les discours de nos orateurs chrétiens, s’il n’est plus permis de rire au spectacle. […] Et de tant de mortels à toute heure empressés A nous faire valoir leurs soins intéressés, Il ne s’en trouve point qui, touchés d’un vrai zèle, Prennent à notre gloire un intérêt fidèle, Du mérite oublié nous fassent souvenir, Trop prompts à nous parler de ce qu’il faut punir. » Racine, dans Esther, scène 3, acte 2.