D’Auberval & la Dallard y exécutent si parfaitement un pas de deux, figurant le tendre empressement d’un Faune pour une Nymphe afflgée du penchant qui l’entraîne, résistant à ce penchant, fuyant celui qui en est l’objet, lui résistant d’abord avec fermeté, cédant enfin à l’un & à l’autre (quel édifiant tableau !). […] Les mêmes pièges tendus à la vertu se trouvent dans les décorations, la plupart très-indécentes. […] Ce n’étoit pas l’objet des amours du Prince, c’étoit sa niece, & la parenté, sur-tout dans les ascendans, écarte l’idée du crime ; on la fait venir dans la salle du repas, comme tous les jours dans les familles on fait danser un enfant pour s’amuser & le faire briller ; une jeune Princesse, sans doute bien élevée & décente, qui n’étoit point exercée à tendre des pieges à la vertu, & ne prétendoit pas à la conquête de son vieux oncle au préjudice de sa mere, si neuve, si simple, que ne sachant que demander, elle va consulter sa mère, court répéter ses paroles, reçoit la tête de Jean-Baptiste, & la lui donne. […] Mais le moment où le Sultan a jeté le mouchoir à la favorite ; son visage, ses regards, tout son maintien prenoit rapidement une forme nouvelle, elle s’arrachoit du théatre avec le désespoir & l’excès d’accablement des ames vives & tendres.
La catastrophe, c’est-à-dire les sentiments de haine et d’horreur qu’on concevra contre l’Auteur de la mort de Géta et de Justine, en seront plus violents ; et en ce cas les Spectateurs pourront les plaindre l’un et l’autre tant qu’ils voudront : d’un côté, la compassion la plus tendre ; de l’autre, l’horreur du crime de Caracalla rempliront tout ce qu’on peut souhaiter dans une Tragédie. […] La loi naturelle ne permet pas de se procurer un bien au préjudice d’un tiers, et la passion de Créuse, pour Jason ne tend qu’à ce but. […] Je n’ai pû me résoudre à condamner un pareil amour ; d’autant plus que, dans toute la Tragédie, il n’y a point de ces Scènes molles et efféminées, qui tendent à corrompre le cœur, et contre lesquelles je me suis tant de fois et si vivement déclaré. […] Dans les Scènes entre Romulus et Hersilie, je trouve du côté de Romulus des expressions de sentiment vives et tendres, qui me paraissent devoir être supprimées.