Nous sommes réduits à vous invoquer, à regretter ce temps où vous couvriez la terre de vos folies et de vos crimes. […] Voilà, dans l’époque actuelle des temps, à quoi les vœux des patriotes doivent se borner. […] Trop fière de sa dignité, pour se compromettre avec les erreurs dominantes, avec la fougue entraînante des préjugés, avec la loi absurde de l’usage, elle n’a garde d’attaquer dans ce temps de vertige et de déraison, l’existence même des spectacles, tels qu’ils sont généralement établis parmi nous. […] Dans les beaux temps de la république on n’avoit point d’idée d’histrions ; de quoi eussent servi les gesticulations et les mignardises de ces gens-là aux Camille et aux Cincinnatus17 ? […] « Cependant le malheur des temps nous a réduits à compter pour rien la dégradation des qualités spirituelles, la perte presque absolue et générale de cet essor généreux de l’ame humaine, de cette fierté noble, qui ne se nourrit que de vertu et d’honneur, qui ne craint que la bassesse et l’ignominie.
Tous les temps se ressemblent en matiere de vice. […] Il faut passer légèrement sur le tableau de la volupté : elle est à craindre dans le temps où l’on conspire contre elle : il faut s’en défier lors même qu’on la pleure. […] Depuis ce temps-là on a attaché presque autant de honte au savoir des femmes qu’au vice qui leur sont le plus défendus. […] Le discours le plus libre est moins dangereux, il ne peint qu’à l’esprit, il demande du temps & de l’attention, il s’envole, il choque le plus souvent, ou on fait semblant de s’en choquer. […] Dans le portrait hideux que fait Ezechiel de la coupable Jérusalem, il la compare à une femme immodestement parée, qui s’offre à tous les regards pour séduire ; il appelle la vie le temps de ses amours, là saison des crimes : Nuda confusione plena, tempus amorum, tempus tuum.