Nous avons tous besoin de cultiver notre naturel, et de le former à tous les devoirs de la société : L'étude et les affaires nous jettent insensiblement dans une humeur un peu dédaigneuse, et si nous ne veillons sur nous-mêmes, nous trouverons que plus nous sommes retirés, moins nous sommes hommes. […] De l’entretien et de la société. §. 3. […] Ce divertissement est commun, aussi n’est-il pas de l’invention des hommes ; mais il nous vient du secret mouvement de la nature, qui ne buttee qu’à nous unir tous par les devoirs de la société. […] Outre ces premières impressions de la nature, que l’homme a de converser et de se voir volontiers avec son semblable, il a des dispositions à la société que les autres choses n’ont point ; il a l’usage de la langue, il a les signes des mains, des yeux et de toute la tête pour exprimer ses pensées, et pour découvrir son cœur. […] Quoiqu’ils ne soient venus que les uns après les autres, et qu’ils aient écrit en divers siècles, leurs déclarations sont si conformes, qu’on peut dire qu’ils ont tous été d’un même avis : Ce qui fait une preuve irréprochable, que les jeux de hasard doivent être bannis de la société des hommes comme des pestes, et une corruption générale des bonnes mœurs.
La sage Nature n’a point destiné tous les humains à être des Poëtes, des Orateurs, des Géometres, ni des Grammairiens ; mais elle les a tous destinés à vivre en société, & à s’acquitter des devoirs attachés à l’humaine condition.