On sent le ridicule de ce raisonnement. Quand sentira-t-on l’indignité de cette conduite ? […] Raison plausible qui fait sentir de quel caractère sont les gens qui s’y trouvent. […] Le tumulte n’étourdit pas naturellement, il y a des intervalles de raison ; et quelque affaiblie qu’elle soit dans un libertin, elle ne laisse pas de lui faire voir la malignité de ce qui lui plaît, et de lui faire sentir le poison de ce qui l’enchante.

Augustin s’accuse dans ses confessions, d’en avoir été touché jusqu’aux larmes, seulement en le lisant, & senti le feu de l’impureté s’allumer dans son cœur ; & l’on voudra faire croire que le même événement joué cent fois sur tous les théatres, peint avec les mêmes couleurs, avec tous les vers de Virgile qu’on se fait honneur de traduire, embelli par la décoration, la danse, la musique, l’action, la parure, la modestie des Actrices, fait moins d’impression sur des spectateurs tous bien inférieurs en sévérité, & la plûpart plus corrompus dans leurs mœurs, que ne le fut jamais Augustin ! […] Une autre sorte d’indécence que l’habitude ne nous permet pas de sentir, c’est le mélange des deux sexes dans les spectateurs, dans les acteurs, dans les rôles. […] De part & d’autre on s’efforce de la sentir pour la bien exprimer, de la bien exprimer pour l’inspirer ; tous deux bienfaits, tous deux parés, tous deux exercés, tous deux passionnés, peuvent-ils se regarder le plus tendrement, se dire les choses les plus galantes, sans allumer un feu criminel dans leur cœur ? […] La douceur, la finesse, les agrémens, la légèreté du style, y décellent une femme du grand monde, & ne sentent point le génie d’un homme dur, sec, serré, concis, nerveux, comme l’étoit cet Abbé. […] On ne sent pas dans le monde cette indécence, & on est surpris de mes reproches, tant on est familiarisé avec le vice.