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45. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE III. Suite du Mariage. » pp. 55-79

L’École des Maris & l’École des Femmes de Moliere, dont le fonds est pris des Adelphes de Térence & du Décameron de Bocace, & qui ont servi de modelle à vingt autres comédies, l’École des Pères, l’École des Mères, des Filles, des Garçons, des Jaloux, des, &c. semblent par leur titre promettre de sages leçons & une bonne morale sur le mariage ; mais les paroles des Comédiens, comme celles des amans, Jupiter s’en moque, perjuria ridet Jupiter ; toutes ces écoles prétendues sont l’école la plus pernicieuse pour les mœurs, singulierement pour le mariage. […] Ce dénouement n’est qu’un tissu d’infamies dont la sage Léonor dit très-vertueusement : Je sais bien qu’au moins je ne puis le blâmer. […] On le donne pour un philosophe, un sage : en voilà la preuve. Puisqu’on fait honneur d’un tel maître à la philosophie, on peut croire que les sages ne rougissent pas d’imiter celui qu’ils se font gloire de s’associer. […] Prenez toûjours conseil d’un homme sage, demandez la lumiere de Dieu pour être dirigés dans toutes vos voies par sa volonté (quelle lâche timidité !).

46. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE VI. De l’indécence du Théatre. » pp. 114-137

M. le Duc d’Orléans, Régent, la rappela, & lui fit promettre plus de circonspection sur les personnalités satyriques, & je crois bien que la crainte des leçons pathétiques que le bâton avoit souvent donné aux anciens Comédiens, a rendu les nouveaux un peu plus sages sur cet article. […] Et en général il regarde le théatre comme une école du vice ; il blâme le goût du peuple, que le gouvernement ne devoit pas souffrir, & qui a été toûjours reprouvé par les gens sages & pieux, dont il cite un grand nombre : Se hasion con tan excessivo gusto, con tanta profanidad y vanidad non ai cosa tan contraria à las buenas costombres, como assistar a las comedias, que son escuelas publicas de peccados. […] Avant même les Empereurs Romains, c’est-à-dire avant le regne de la licence théatrale, tandis que la République avoit encore des mœurs & de la décence, sous les yeux de ces sages Consuls qui en soûtenoient la majesté, de ces austères Censeurs qui en prévenoient & punissoient si sévèrement le désordre, on tenoit le même langage. […] Toutes les personnes sages suivoient la même conduite. […] Ces loix Romaines ont subsisté dans les deux Empires, & subsistent encore chez tous les peuples, malgré toutes les révolutions des religions & des États, & à l’exception de quelques têtes théatrales qui voudroient rendre tout le monde Comédien, elles ont toûjours été regardées comme très sages par l’univers entier.

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