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389. (1783) La vraie philosophie « La vraie philosophie » pp. 229-251

Solon s’étant rendu à un spectacle par complaisance, pour tout applaudissement frappe la terre avec son bâton, en s’écriant avec indignation : si vous approuvez ces propos libres & indécens, cet air évaporé sur vos théatres ; vos Comédiens donneront le ton, on commencera par les contrefaire, & on finira par les imiter ; & bien-tôt la société ne sera plus qu’un amas de Comédiens. […] Comme on ne représente sur les théatres que des galanteries, des aventures romanesques & licentieuses, les femmes sont flattées des adorations qu’on y rend à leur sexe ; elles s’habituent à être traitées en Nymphes ; de là le dédain qu’elles ont de s’occuper du soin de leur ménage ; elles abandonnent au peuple ces connoissances de détail réservées aux meres de famille, & elles préferent d’exercer tous les talens séducteurs qui ne conviennent point à une femme honnête. […] Que se passe-t-il dans le cœur d’un jeune libertin quand il voit une amante soupirer après son amant, & se rendre enfin à ses desirs ? […] L’objet de la plupart des drames même les plus estimés, n’est-il pas de nous peindre sans cesse des intrigues amoureuses, des vices que l’on s’efforce de rendre aimables, des désordres faits pour séduire la jeunesse inconsidérée, des fourberies capables de suggérer les moyens de mal faire ? […] Toujours combattu & toujours foible, je différois de me juger, par la crainte de me rendre, & par le desir de me faire grace.

390. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE VIII. Sentiment de S. Thomas. » pp. 178-198

Il répond que les choses dont l’acquisition est un crime, comme le vol, la rapine, l’usure, on doit les restituer, non pas en payer la dixme ; mais que celles qui ont été acquises par un autre péché, comme celles que gagnent les Courtisannes ou les Histrions, on n’est pas tenu de les rendre, & l’on doit en payer la dixme ; mais que l’Eglise ne doit pas les recevoir, pour ne pas paroître participer à leur péché, à moins qu’ils ne soient convertis : Quæ turpi causâ acquiruntur, sicut meretricio vel histrionatu. […] Ce n’est point la direction d’intention qui leur en rend la fréquentation méritoire, ni la pratique des vertus chrétiennes qui la leur rend utile. […] Il fait avec les plus grands éloges le détail de la vie de Spurinna, & remarque que pour rendre les repas utiles, ce sage vieillard de soixante-dix-sept ans, bien revenu de toutes les folies de la jeunesse, mêloit les avantages de l’étude avec les plaisirs de la table, & pour cela faisoit venir des Comédiens pour l’entretenir de choses utiles : Frequenter comædis cœna distinguitur ut voluptates quoque studiis condiantar. […] Thomas, contre les fausses interprétations que le relâchement lui a données, & après avoir démontré combien les spectacles sont contraires aux divines Ecritures, combien ils sont dangereux en effet, & dans le sujet des pieces, & dans la maniere de les représenter, dans les Actrices, les danses, les masques, vices communs à tous les théatres, qui rendent même la scène moderne plus obscène que les scènes Grecque & Romaine, malgré le voile de l’équivoque dont on la couvre, & le mariage qui est le dénouement de l’intrigue, il conclud que les Acteurs & les Actrices sont dans un état de péché mortel & de damnation.

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