L’auteur effrayé sans doute de combattre le sentiment unanime des Chrétiens de tous les siécles, y mettoit bien des précautions & des assaisonnemens ; il en excluoit sans pitié les Religieux & les Ecclésiastiques, même des loges grillées ; il ne souffroit que des piéces épurées, des acteurs vertueux, des actrices modestes, des spectateurs raisonnables ; en sorte que la pureté n’y courroit aucun risque, tel que pouvoit être le théatre de quelques Communautés Religieuses, mais tel que ne fut & ne sera jamais le théâtre public. […] Toute adoucie qu’étoit cette décision, elle causa le plus grand scandale ; sur-tout quand on découvrit que c’étoit un Docteur en Théologie, un Religieux d’une Communauté très-Réguliere qui l’avoient portée. […] Son fils, Religieux Théatin, le lui procura. […] Moliere moins scrupuleux que lui, n’avoit pas eu à tranquiliser un Confesseur, & ne s’étoit jamais exposé à un refus d’absolution, n’avoit consulté aucun Théologien, & n’avoit jamais trouvé dans sa famille de quoi faire des Religieux Théatins, qui prissent la peine de composer son appologie. […] C’étoient des actes religieux parmi ces peuples, & la représentation des avantures de leurs Dieux, c’est-à-dire des mysteres du paganisme.
S’il est vrai, comme on ne peut en douter, que tout ce qui concourt à l’abolition des principes religieux et moraux, concourt également à la destruction des empires, ne s’ensuit-il pas évidemment que ces pièces de théâtre, en établissant le règne des sens sur les débris de la morale, minent et corrodent les fondements de l’édifice social, lui creusent un abîme profond vers lequel elles le poussent insensiblement, et qui finira par l’engloutir, si la main puissante de Dieu ne vient à son secours ? […] Des chrétiens zélés pourraient-ils voir sans douleur, d’un côté les temples du Seigneur abandonnés et déserts, et de l’autre les théâtres, ces temples élevés au démon, regorger continuellement d’adorateurs qui vont en foule offrir à cet esprit de ténèbres leur encens et leurs hommages, qui témoignent un mépris dédaigneux pour les solennités religieuses, qui ne connaissent les jours spécialement consacrés au Seigneur que pour les profaner en se livrant à des divertissements souvent criminels et toujours dangereux ?