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365. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome II « La criticomanie. » pp. 1-104

Que doit-il résulter de ce scandale inouï pour les jeunes spectateurs, ou pour les enfants qui, d’instinct, d’après le mouvement de leur cœur, et d’après leur éducation, doivent regarder comme de droit naturel le devoir d’aimer leurs parents, et le précepte de les respecter comme indispensable, absolu et tel que leur propre intérêt et la honte d’y manquer devraient du moins empêcher des enfants d’aller jusqu’à outrager ainsi l’auteur de leurs jours ? […] Je trouve que ce fut avec bien de la raison que d’autres ont encore dit avant moi que les comédies dirigées contre les vieux maris sont également pernicieuses aux mœurs, parce que les femmes qui ont vu applaudir toutes les ruses, les tours perfides et scandaleux, les infidélités qu’une épouse fait à son mari, à cause qu’il est trop vieux, ne doivent plus avoir de peine à se persuader qu’on peut en faire autant à un mari trop jeune, léger, volage, et toutes les fois, bien qu’il soit d’un âge convenable, qu’on ne jouit pas d’un plus grand bonheur, ou qu’on est plus malheureuse avec lui que s’il était vieux, ce qui arrive assez souvent ; comme quand il est ou qu’on le trouve froid, indifférent, d’un mauvais caractère, grondeur, bourru, méchant, contrariant ; quand il n’est ni beau, ni bien fait, ou qu’une maladie l’a changé, affaibli et vieilli ; quand il refuse de fournir toutes les choses nécessaires à la coquetterie ; en un mot, lorsque, par tant d’autres raisons, par sa propre inconstance à elle-même, l’épouse vient à se croire mal assortie, cesse d’aimer son mari jeune, et se trouve aussi malheureuse et dans la même position que celle qui n’a jamais aimé son mari vieux. […] Les femmes n’avaient rien de plus précieux que les prérogatives de leur sexe ; elles préféraient à de plus doux plaisirs les jouissances de leur propre estime et de l’estime des autres.

366. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre II.  » pp. 37-67

Et ceux qui vivent mal, qui aiment les spectacles ; les condamnent contre leur intérêt & leur idée, & débitent la morale sévere qu’ils ne pratiquent pas, & qui les condamneroient par leur propre bouche ! […] L’idée puérile de faire des piéces ou des rôles pour certains acteurs ou actrices ; une actrice a plu à l’auteur ; pour faire une galanterie à sa maîtresse, il n’envisage qu’elle, & fait parler son personnage, non selon le caractère qui lui est propre, mais dans le goût de son idôle ; c’est renverser l’ordre. […] Le vrai génie dramatique n’a aucun caractère propre, aucun style à lui, ni dans la composition, ni dans la représentation ; mais il prend tous ceux qu’il veut jouer, c’est un vrai Caméleon, qui prend toutes les couleurs des objets ; c’est un historien en action, qui n’est d’aucun pays, d’aucun siécle, d’aucun climat, mais de tous les pays, de tous les siécles & de tous les climats.

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