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65. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE III. Extrait de quelques Livres.  » pp. 72-105

Cette réflexion dont l’objet est commun à quelque chose de neuf dans son application au théatre, où personne ne songe à la mort, quoique tout la rende présente. […] Le Mercure de Décembre 1771, fait un grand éloge non seulement du mérite littéraire de cet ouvrage, en quoi il peut avoir raison ; mais encore du principe de morale & d’éducation qui met ces comédies entre les mains des jeunes gens ; je doute qu’aucun Mentor chrétien lui en fasse des remercimens & profite de son travail, quoique ce soit un Ecclésiastique qui le lui présente, qui n’a pas ici consulté les Canons & les Peres. […] La fragilité du lecteur sensible & prompt à s’enflammer, est bientôt à l’unisson de celles qu’on lui présente, & son imagination va plus loin encore. […] Le vice y est présenté avec la plus grande chaleur de style, d’action, de geste & de parure. […] Les payens alloient droit au crime, & ne connoissoient point cette débauche adoucie & voilée, qui ne présente & ne parle que sentiment, quoiqu’elle ne se livra pas moins à la chair.

66. (1790) Sur la liberté du théatre pp. 3-42

Si malgré toutes ces précautions la piece présente encore des rapprochemens trop aisés à faire, des allusions trop faciles à saisir, il est défendu aux comédiens de la jouer, et au public de l’entendre. […] On y déchire la perruque d’un commissaire ; on y met Sangsue aux prises avec Brigandeau ; mais on ne peut présenter un curé respectable à la vénération qu’il doit inspirer, ni exposer un prêtre fanatique à l’opprobre qu’il mérite8. […] Un grand nombre d’auteurs dramatiques s’est assemblé, et ils ont présenté au comité de constitution un mémoire qui n’est rempli que de vues personnelles et pécuniaires ; d’autres auteurs, dans la vûe d’intéresser les comédiens et d’être joués plus promptement, ont embrassé leur parti et ont défendu leurs priviléges, ou du moins, desirant en secret de les voir anéantir, ils n’ont pas osé les attaquer. […] Chaque infraction à la présente loi sera punie par des dommages et intérêts, d’une valeur égale à la recette totale de la réprésentation ; mais cinq ans après la mort de l’auteur, toutes ses pieces seront sensées un bien commun à tous les théâtres. […] Depuis long-temps les gens de lettres se plaingent de ce que les comédiens sont seuls les maîtres d’admettre ou de refuser les pieces qu’on leur présente, et ils ont raison.

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