Ensuite au son des instrumens on se rend à l’Eglise où le Seigneur conduit le vainqueur : il le place sur un espece de thrône avec un Prie-Dieu, on fait des prieres publiques pour le Roi, pour le Seigneur & sa famille, & par une priere en françois, on remercie Dieu des graces qu’il a faites aux deux Paroisses ; on le prie de continuer à les accorder. […] On devoit chanter la priere pour le Roi, selon la fondation, mais la foule ne permit pas aux Bénédictins de prendre leur place au Chœur & d’en trouver même dans leur Eglise, il fallut se contenter de le dire à voix basse chacun en particulier ; mais le Curé benit quatre grands pains qu’on appelle Brioches & ailleurs Pain béni dont trois furent distribué au peuple, comme le Pain béni à la Grand’Messe, & une fut portée chez la Rosiere qui la distribua à ses compagnes, parens & amis. […] Le Dimanche suivant, au premier coup la Messe de Paroisse, ils s’assemblerent dans la place publique, parés de rubans & de bouquets, & vont tous ensemble deux à deux chez la fille couronnée. […] Il seroit utile d’établir de pareilles fêtes parmi les garçons, du moins de les célébres alternativement entre les garçons & les filles, les mœurs des uns ne sont pas moins nécessaires que les mœurs des autres ; il est vrai que dans plusieurs Colléges on leur distribue des prix à la fin de l’année ; que l’on a des croix & des places distinguées dans les classes ; mais toutes ces couronnes ne regardent que leurs progrès dans les lettres ; il n’est point de récompense pour la vertu, elle demeure obscure, tandis que souvent on a tous les honneurs pour avoir bien fait un thême.
La prémiere Histoire que l’on ait décrite dans ce Volume est l’élection d’un Apôtre en la place de Judas. […] Ces Pelerins qui alloient par troupes, & qui s’arrêtoient dans les ruës & dans les places publiques où ils chantoient le Bourdon à la main, le Chapeau & le Mantelet chargez de Coquilles & d’Images peintes de diverses couleurs, faisoient une espece de spectacle qui plut, & qui excita la pieté de quelques Bourgeois de Paris à faire un fond pour acheter un lieu propre à élever un Theatre, où l’on representeroit ces Mysteres les jours de Fête, autant pour l’instruction du peuple, que pour son divertissement. L’Italie avoit des Theatres publics, où l’on representoit ces Mysteres, & j’en ai vû un à Veletri, sur le chemin de Rome à Naples, dans une place publique, où il n’y a pas quarante ans que l’on a cessé de representer les Mysteres de la vie du Fils de Dieu.