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58. (1675) Traité de la comédie « II.  » pp. 275-276

C'est un métier qui a pour but le divertissement des autres ; où des hommes et des femmes représentent des passions de haine, de colère, d'ambition, de vengeance, et principalement d'amour. […] Il faut donc que ceux qui représentent une passion d'amour en soient en quelque sorte touchés pendant qu'ils la représentent; et il ne faut pas s'imaginer que l'on puisse effacer de son esprit cette impression qu'on y a excitée volontairement, et qu'elle ne laisse pas en nous une grande disposition à cette même passion qu'on a bien voulu ressentir. Ainsi la Comédie par sa nature même est une école et un exercice de vice, puisqu'elle oblige nécessairement à exciter en soi-même des passions vicieuses.

59. (1759) Remarques sur le Discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie « Remarques sur le discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie. » pp. 350-387

Les passions feintes que nous y voyons, nous plaisent par les mêmes raisons que les passions réelles ; parce qu’en effet elles en excitent de réelles dans notre ame ; ou parce qu’elles nous rappellent le souvenir de celles que nous avons éprouvées. […] A ce caractere susceptible des impressions de la Vertu comme de celles du Vice, se joint celui des vertus que la Tragédie nous présente : elles allarment si peu les passions favorites du cœur humain, qu’il croit pouvoir les concilier aisément avec ces passions. […] Ce n’est plus la Vertu seule, c’est un mélange de vertu & de passion qui l’émeut & qui le touche. […] Mais la fureur des Poëtes est une passion contagieuse. […] Elle réalise sans effort tout ce qui peut flatter ses passions en les remuant agréablement.

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