« Or, pour savoir si cette idée peut s’allier avec celles des spectacles, il suffit d’examiner ce que c’est que le spectacle ; il suffit de remarquer, avec Tertullien, que c’est une assemblée d’hommes mercenaires, qui, ayant pour but de divertir les autres, abusent des dons du Seigneur, pour y réussir, excitent en eux-mêmes les passions autant qu’ils le peuvent, pour les exprimer avec plus de force : il suffit de penser, avec saint Augustin, que c’est une déclamation indécente d’une pièce profane, où le vice est toujours excusé, où le plaisir est toujours justifié, où la pudeur est toujours offensée, dont les expressions cachent le plus souvent des obscénités, dont les maximes tendent toujours au vice et à la corruption, dont les sentiments ne respirent que langueur et mollesse, et où tout cela est animé par des airs qui, étant assortis à la corruption du cœur, ne sont propres qu’à l’entretenir et à la fortifier : il suffit de comprendre que c’est un tableau vivant des crimes passés, où on en diminue l’horreur par la manière de les peindre : il suffit de considérer, avec tous les saints docteurs, que le théâtre est un amas d’objets séduisants, d’immodesties criantes, de regards indécents, de discours impies, animés toutefois par des décorations pompeuses, par des habits somptueux, par des voix insinuantes, par des sons efféminés, par des enchantements diaboliques. […] Ceux qui sont destitués de toute occupation pénible, dont les jours se passent dans un cercle de promenades, de jeux, de visites, ont-ils besoin de délassements ? […] Ceux qui sentent ce besoin sont-ils autrement constitués que ceux qui vivaient du temps de saint Louis, qui s’en passaient bien ? […] N’est-ce pas là que, par des peintures vives qu’on y fait, les passions s’excitent dans notre âme, et que le cœur, bientôt capable de tous les sentiments qu’un acteur exprime, passe tour à tour de la tristesse à la joie, de l’espérance à la crainte, de la pitié à l’indignation ? […] On regarde l’effet comme une partie si essentielle à la pièce, que, si elle manque par cet endroit, elle passe pour un ouvrage froid et insipide.
les uns sacrifient avec zèle le plaisir du spectacle, pour assister au service divin ; les autres ne trouvent pas un moment pour entendre la messe ou le sermon, et passent trois ou quatre heures à la comédie, ou peut-être après avoir fait de la messe un spectacle profane, où ils ne sont allés que pour voir et pour être vus, ils passeront de l’Eglise au théâtre, comme on passe des coulisses sur la scène. […] Ceux qui ces jours-là, vont à la comédie s’engagent eux et leurs domestiques à beaucoup d’œuvres serviles, la toilette est plus longue et plus embarrassante, le baigneur, la coiffeuse, le valet, la femme de chambre, y passent une partie de la journée. […] La loi est expresse : Vous ne ferez travailler ni vos enfants, ni vos esclaves, ni vos animaux, ni même les étrangers qui passent sur vos terres : « Etiam filii tui, et servi, et jumentum, et advena. […] Il passera pour une folie. A la bonne heure, la religion Chrétienne passait bien pour une folie aux yeux des sages Païens : Gentibus stultitium.