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87. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre IX. Sentiments de S. Cyprien et de quelques autres Pères. » pp. 175-201

Qu’il ne prétende pas abuser de notre charité jusqu’à vouloir nous vendre sa conversion, c’est son intérêt plus que le nôtre de quitter son péché : « Ut à peccatis cesset, non nobis, sed sibi præstat. » Qu’il revienne sincèrement de ses désordres, et qu’il cesse d’engraisser des victimes pour l’enfer, « perniciose in sæculo saginatos ad æterna supplicia deducit ab hac pravitate et dedecore revoca ». […] Les crimes ne sont point ensevelis dans l’oubli, ne meurent point par le laps du temps, ils deviennent des exemples : « Scelus oblivione non sepelitur, exempla fiunt quæ facinora esse desierunt. » On retrouve le péché qu’on a commis dans sa maison, ou on y apprend ceux qu’on y peut faire. […] Je rougirais de rapporter les mots indécents, les bouffonneries dont la scène retentit, et les péchés qu’on y joue, « scenæ sales inverecundos pudet referre, et accusare quæ fiunt », les chansons des Acteurs, les intrigues des adultères, les jeux dissolus, « agentium strophas, adulterorum fallacias, scurriles jocos ». […] Il ne nous est pas plus permis d’entendre parler des adultères des hommes et des Dieux, que les Comédiens pour gagner de l’argent chantent avec toutes les grâces dont ils sont capables (à l’Opéra) : « Nec fas est nobis audire Deorum hominumque adulteria, quæ suavi verborum modulamine prœmiis inducti celebrant. » Les Chrétiens se font gloire de la modestie et de la continence, ils respectent le mariage, honorent la chasteté, et fuient l’injustice et le péché. […] C’est que la mollesse de leur chant avait, des louanges de Dieu, fait des airs de théâtre ; ce qui dérangeait même à l’Eglise les gens les plus pieux, par mille occasions de dissolution et de péché : « Cantus suavitate velut scenicis cantibus, ad extimulandas libidines, in dissolutionem et peccati occasionem cessit. » Dira-t-on que ces airs tendres et efféminés sont moins dangereux au théâtre, où tout favorise, où rien n’arrête la passion ?

88. (1757) Article dixiéme. Sur les Spectacles [Dictionnaire apostolique] « Article dixiéme. Sur les Spectacles. » pp. 584-662

Voilà les péchés secrets dont on se charge, quoi qu’on feigne de ne les pas connoître. […] Qu’on prétende après cela prévenir le péché, en ne représentant qu’un attachement légitime : légitime ou non, n’importe. […] Vous participez à leurs péchés ; & dès-lors, de combien d’iniquités n’êtes-vous pas responsable ? […] Vous regardez les rendez-vous les plus concertés, comme un délassement d’esprit ; vous traitez la liberté, la licence des conversations, de gayeté, de sel & d’enjouement aimable ; & tout ce que les saints Peres ont appellé voies du péché, occasions de péchés, avant-coureurs du péché, tout cela passe parmi vous pour politesses, pour belles manieres : voilà votre innocence. […] Tout ce qui se voit & tout ce qu’on entend aux spectacles, est une occasion de péché.

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