/ 385
93. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Sixième Lettre. De madame Des Tianges. » pp. 40-72

de les aimer, de nous disputer leur cœur, & d’oser nous montrer de la générosité ! […] Plus heureuse que je n’eusse oser le penser, j’ai trouvé chez la plus sage & la plus délicate des Nations, la réalité de mes rêveries. […] Comme le premier de ces deux Arts, tantôt il ennivre l’âme d’une joie vive & pure ; tantôt il y porte l’étonnement, y excite la pitié, la terreur, ou la remplit de courage : Comme le second, il fait des Tableaux ; mais (& j’ose le dire) il est en ce cas, bien au-dessus de la Peinture. […] Ils font plus ; ils osent interdire à ces jeunes Beautés l’art innocent de la parure.

94. (1764) De l’Imitation théatrale ; essai tiré des dialogues de Platon : par M. J. J. Rousseau, de Genéve pp. -47

Mais quand il nous entretient de la guerre, du gouvernement, des loix, des sciences qui demandent la plus longue étude & qui importent le plus au bonheur des hommes, osons l’interrompre un moment & l’interroger ainsi : O divin Homere ! […] Quelles ames fortes oseront se croire à l’épreuve du soin que prend le Poëte de les corrompre ou de les décourager ? […] Autrement, mon cher Glaucus, comme un homme sage, épris des charmes d’une maitresse, voyant sa vertu prête à l’abandonner, rompt ; quoiqu’à regret, une si douce chaîne, & sacrifie l’amour au devoir & à la raison ; ainsi, livrés dès notre enfance aux attraits séducteurs de la Poësie, & trop sensibles peut-être à ses beautés, nous nous munirons pourtant de force & de raison contre ses prestiges : si nous osons donner quelque chose au goût qui nous attire, nous craindrons au moins de nous livrer à nos premieres amours : nous nous dirons toujours qu’il n’y a rien de sérieux ni d’utile dans tout cet appareil dramatique : en prêtant quelquefois nos oreilles à la Poësie, nous garantirons nos cœurs d’être abusés par elle, & nous ne souffrirons point qu’elle trouble l’ordre & la liberté, ni dans la République intérieure de l’ame, ni dans celle de la société humaine. […] Pourquoi les Peintres n’osent-ils entreprendre des imitations nouvelles, qui n’ont contr’elles que leur nouveauté, & paroissent d’ailleurs tout-à-fait du ressort de l’art ?

/ 385